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16/12/2021 | FRANCE | N°21LY02008

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 16 décembre 2021, 21LY02008


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 3 février 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100501 du 16 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 juin 2021, M. B.

.., représenté par Me Habiles, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 3 février 2021 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100501 du 16 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 juin 2021, M. B..., représenté par Me Habiles, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 avril 2021 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- le préfet aurait dû examiner sa situation à titre humanitaire et lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;

- en ne lui permettant pas de formuler des observations écrites, le préfet a méconnu l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- étant le seul à pouvoir s'occuper de son frère et de sa sœur lourdement handicapés, le préfet a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité albanaise, né le 8 juin 1989 est entré en France le 6 avril 2020, accompagné de son frère et de sa sœur. Le 1er octobre 2020, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile et ce refus a été confirmé par la Cour nationale du droit d'asile, le 15 décembre 2020. Par décisions du 3 février 2021 le préfet du Puy-de-Dôme l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a imparti un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 16 avril 2021, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (... ) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ".

3. La décision en litige, prise sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est motivée en droit par le visa de ces dispositions. Elle est aussi suffisamment motivée en fait par l'indication, en particulier, du rejet de la demande d'asile du 1er octobre 2020 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la confirmation de ce rejet par la Cour nationale du droit d'asile, le 15 décembre 2020 et du caractère récent de l'entrée de l'intéressé en France. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision du préfet du Puy-de-Dôme l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français. Par suite, M. B... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, désormais reprises aux articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, prévoyant une procédure contradictoire, qui ne sont pas applicables.

5. En troisième lieu, faute d'avoir sollicité son admission exceptionnelle au séjour au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. B... ne peut utilement soutenir que le préfet du Puy-de-Dôme aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant d'examiner son droit au séjour sur ce fondement.

6. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

7. Le requérant soutient qu'il est le seul à pouvoir s'occuper de son frère et de sa sœur qui, présentant des pathologies graves ont sollicité des titres de séjour au regard de leur état de santé, et ont engagé des démarches auprès de la maison départementale des personnes handicapées. Toutefois, il n'apporte aucun élément permettant d'établir le bien-fondé de ses allégations. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'était présent sur le territoire français que depuis moins d'un an à la date de la décision contestée et qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attache familiale en Albanie. Compte tenu de ces éléments, l'obligation de quitter le territoire français faite à M. B... qui n'établit pas pouvoir bénéficier d'un titre de séjour de plein droit en application des dispositions du 7°de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En dernier lieu, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle de M. B... ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

9. En premier lieu, la décision fixant le pays de renvoi vise notamment les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne la nationalité de l'intéressé et précise qu'elle ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle comporte, dès lors, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

11. Le requérant, dont au demeurant la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, ne produit aucun élément de nature à établir qu'il serait exposé personnellement à un risque actuel de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Albanie, du fait notamment d'un lourd conflit familial.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 25 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2021.

2

N° 21LY02008


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02008
Date de la décision : 16/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : HABILES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-16;21ly02008 ?
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