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14/12/2021 | FRANCE | N°21LY00144

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 14 décembre 2021, 21LY00144


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler les décisions du 27 avril 2020 par lesquelles le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a ordonné sa remise aux autorités italiennes ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;<

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3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler les décisions du 27 avril 2020 par lesquelles le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a ordonné sa remise aux autorités italiennes ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou de procéder à un nouvel examen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2003741 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du préfet de l'Ain du 27 avril 2020 ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2021, le préfet de l'Ain demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 décembre 2020 du tribunal administratif de Lyon en ce qu'il annule sa décision du 27 avril 2020 ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de l'intéressée ;

2°) de rejeter la demande de Mme C....

Il soutient que :

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit, quant à la charge de la preuve ;

- contrairement à ce qu'ils ont estimé, la décision ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Par une ordonnance du 28 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de l'Ain relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 décembre 2020, en ce qu'il a annulé sa décision du 27 avril 2020 ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de l'intéressée.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, Mme C..., ressortissante marocaine née en 1946, résidait depuis moins d'un an sur le territoire français, où elle est entrée à l'âge de 72 ans, pour y rejoindre son fils de nationalité italienne. Elle ne démontre pas que celui-ci, lui-même récemment installé en France, remplit effectivement les conditions requises pour être en droit de s'y maintenir au-delà d'une durée de trois mois. Par ailleurs, elle n'invoque aucune circonstance, tenant notamment à son état de santé, propre à démontrer la nécessité de la présence quotidienne de son fils à ses côtés, celui-ci étant, en outre, en droit de se rendre en Italie. Mme C... ne se prévaut d'aucune autre attache privée ou familiale en France et ne démontre pas en être dépourvue en Italie, où elle a résidé pendant trois années. Dans ces circonstances, et nonobstant l'âge de Mme C..., le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que la décision ordonnant la remise de l'intéressée aux autorités italiennes ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision du préfet de l'Ain du 27 avril 2020 ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif de Lyon.

6. En premier lieu, la décision en litige a été signée par M. D... A..., directeur de la citoyenneté et de l'intégration à la préfecture de l'Ain, qui a régulièrement reçu délégation à cet effet, par arrêté du préfet du 5 novembre 2019 publié le lendemain au recueil des actes administratifs de la préfecture. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté.

7. En second lieu, le préfet de l'Ain, qui n'était pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle de Mme C..., a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision. Par suite, Mme C..., qui n'apporte pas d'autres précisions à l'appui de ce moyen, n'est pas fondée à soutenir que la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée.

8. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ain est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 27 avril 2020 ordonnant la remise de Mme C... aux autorités italiennes et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de l'intéressée.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 décembre 2020 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Ain du 27 avril 2020 ordonnant sa remise aux autorités italiennes, ainsi que celle présentée en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 décembre 2021.

4

N° 21LY00144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00144
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-12-14;21ly00144 ?
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