Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
- d'une part, d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
- d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.
Par un jugement n° 2002359 du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 13 octobre 2020, présentée pour M. B..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 2002359 du tribunal administratif de Lyon du 21 juillet 2020 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai, après remise d'une autorisation provisoire de séjour sous deux jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est intervenu sans consultation de la commission du titre de séjour alors qu'il justifiait d'une durée de résidence en France d'au moins dix années, en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en l'absence d'examen particulier de sa situation individuelle ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11,11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur matérielle en ce qu'il considère qu'il n'a pas rempli les diligences nécessaires pour la transmission de son certificat médical, et d'une erreur manifeste d'appréciation de son état de santé ; il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observation.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 septembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Lyon (section administrative d'appel).
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Seillet, président-assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant bosnien né le 4 novembre 1982, entré en France irrégulièrement en avril 2009 pour y solliciter l'asile, et dont la demande initiale a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 17 juin 2009 et la demande de réexamen par une nouvelle décision de l'OFPRA du 13 octobre 2010 puis par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 29 juin 2011, a ensuite fait l'objet, par un arrêté du 14 avril 2015, de décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français. M. B... a ensuite bénéficié d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé, valable du 8 janvier 2018 au 7 août 2018, dont il a sollicité le renouvellement le 2 juillet 2019. Par un arrêté du 10 janvier 2020, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté préfectoral.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. (...) ". L'article 1er de l'arrêté du 27 décembre 2016 précise que : " L'étranger qui dépose une demande de délivrance ou de renouvellement d'un document de séjour pour raison de santé est tenu, pour l'application des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de faire établir un certificat médical relatif à son état de santé par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier. / A cet effet, le préfet du lieu où l'étranger a sa résidence habituelle lui remet un dossier comprenant une notice explicative l'informant de la procédure à suivre et un certificat médical vierge, dont le modèle type figure à l'annexe A du présent arrêté ". Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " Le certificat médical, dûment renseigné et accompagné de tous les documents utiles, est transmis sans délai, par le demandeur, par tout moyen permettant d'assurer la confidentialité de son contenu, au service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'adresse a été préalablement communiquée au demandeur ".
3. Il résulte de ces dispositions combinées que, dans le cas où le collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) chargé d'émettre un avis destiné au préfet auquel a été adressée une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade n'est pas à même de se prononcer sur l'état de santé du demandeur, faute d'avoir reçu, de la part du médecin choisi par le demandeur, le rapport médical que celui-ci doit établir ou les pièces complémentaires à ce rapport qui lui ont été réclamées, il appartient au service médical de l'OFII d'en informer l'autorité préfectorale. Il incombe alors à cette dernière de porter cet élément, qui fait obstacle à la poursuite de l'instruction de la demande de séjour, à la connaissance de l'étranger afin de le mettre à même soit d'obtenir du médecin qu'il a choisi qu'il accomplisse les diligences nécessaires soit, le cas échéant, de choisir un autre médecin agréé.
4. Il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il a été dit au point 1 M. B... a déposé une demande de renouvellement de son titre de séjour en invoquant son état de santé, le 2 juillet 2019, et, ainsi qu'il l'indique lui-même dans ses écritures, qu'il a été informé par les services préfectoraux de l'absence de transmission, par le médecin qu'il avait choisi, du rapport médical que celui-ci devait établir. Par le document qu'il produit pour la première fois en appel, au demeurant pour partie illisible, et qu'il présente comme un accusé de réception par l'OFII, le 8 novembre 2019, du certificat médical rempli par son médecin le 6 novembre 2019, M. B... ne justifie pas avoir transmis ce certificat médical à l'OFII, après avoir été invité à le faire par le préfet du Rhône alors, au demeurant, qu'à la date de l'arrêté en litige, le 10 janvier 2020, aucun avis n'avait été émis par l'OFII. Ainsi, à défaut pour M. B... d'avoir accompli les diligences nécessaires pour permettre au collège de médecins du service médical de l'OFII d'émettre un avis sur son état de santé, ce qui faisait obstacle à la poursuite de l'instruction de sa demande de séjour, le préfet du Rhône a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser la demande de titre de séjour présentée par M. B... pour ce motif.
5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône, qui a, en particulier, fait état de la présence sur le territoire français de M. B... depuis le 18 avril 2009, du titre de séjour qui lui avait été délivré en janvier 2018 et de sa situation familiale, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.
6. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 313-11, 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ainsi que le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, déjà soulevés en première instance, doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " .
8. Il ressort des pièces du dossier que le titre de séjour dont M. B... avait sollicité le renouvellement lui avait été délivré consécutivement à la réalisation, en 2016, d'un triple pontage coronarien et il ressort, en particulier, du certificat médical rédigé par son médecin traitant, le 6 novembre 2019, que son état de santé, décrit comme connaissant une évolution stable, nécessite un suivi cardiologique et un bilan cardiologique semestriels. Il n'en ressort pas, et n'est au demeurant pas allégué, qu'à la suite de l'opération chirurgicale subie, un défaut de soins que nécessite son état de santé, limités ainsi qu'il a été dit à un suivi, serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni que le traitement nécessaire à son état de santé ne serait pas disponible dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 décembre 2021.
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N° 20LY02979