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03/11/2021 | FRANCE | N°20LY03732

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 03 novembre 2021, 20LY03732


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 novembre 2020 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2003170 du 23 novembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le

18 décembre 2020 et un mémoire enregistré le 20 avril 2021, M. C... B..., représenté par Me Cle...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 novembre 2020 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2003170 du 23 novembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 18 décembre 2020 et un mémoire enregistré le 20 avril 2021, M. C... B..., représenté par Me Clemang (SCP Clemang-Gourinat), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 novembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 16 novembre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision procède d'un détournement de pouvoir et méconnaît son droit à se marier, protégé par l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 8 de cette même convention ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les articles 12 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle procède d'un détournement de pouvoir ;

- elle n'est pas justifiée et sa durée est excessive.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2021, le préfet de la Côte-d'Or conclut qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la requête.

Il expose que le titre de séjour qu'il a délivré à M. C... B... a eu pour effet d'abroger les décisions en litige.

M. C... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 janvier 2021.

Par une ordonnance du 8 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., ressortissant marocain né en 1974, relève appel du jugement du 23 novembre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Côte-d'Or du 16 novembre 2020 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Sur l'étendue du litige :

2. Il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du préfet de la Côte-d'Or du 16 novembre 2020, M. C... B... a été assigné à résidence en vue de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français en litige. Celle-ci ayant ainsi reçu un commencement d'exécution, la délivrance d'un récépissé puis d'un titre de séjour à l'intéressé, postérieurement à l'introduction de sa requête, n'a pas eu pour effet de faire perdre leur objet à ses conclusions dirigées contre cette décision. Contrairement à ce que prétend le préfet de la Côte-d'Or, il y a toujours lieu pour la cour de statuer sur la requête de M. C... B....

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français sans délai :

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...). II. ' L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ".

4. En premier lieu, aux termes de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde et des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le droit au séjour de M. C... B... a été contrôlé à l'occasion d'une enquête diligentée en raison de son projet de mariage. Cette enquête ayant révélé l'irrégularité de son séjour sur le territoire français, l'obligation de quitter le territoire français sans délai opposée par le préfet de la Côte-d'Or s'est bornée à tirer les conséquences de la présence irrégulière en France de l'intéressé, sans qu'il ne ressorte d'aucune pièce du dossier qu'elle aurait été motivée par la volonté de faire échec à ce projet de mariage. Par ailleurs, cette décision n'a ni pour objet, ni pour effet de lui interdire de se marier. Par suite, M. C... B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle procède d'un détournement de pouvoir.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

7. M. C... B... déclare être entré en France, en dernier lieu, en mai 2017 sous couvert d'un visa. A la date de la décision en litige, il résidait ainsi sur le territoire français depuis trois ans seulement, après avoir vécu jusqu'à l'âge de 43 ans dans son pays d'origine, où demeurent notamment ses neuf frères et sœurs. S'il expose entretenir une relation avec une ressortissante française avec laquelle il avait pour projet de se marier au mois de janvier 2021, cette relation, débutée tout au plus au cours de l'année 2019, était particulièrement récente, sans qu'aucun enfant n'en soit issu. Il ne se prévaut d'aucune autre attache privée ou familiale en France. Enfin, il ne justifie d'aucune insertion particulière. Dans ces circonstances, la décision en litige ne peut être regardée comme portant au droit de M. C... B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... B... n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

10. En deuxième lieu, M. C... B... ne conteste pas qu'une obligation de quitter le territoire français sans délai pouvait être ordonnée à son encontre en application du 2° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, il ne résidait que depuis trois ans sur le territoire français, où il ne dispose d'aucune attache, à l'exception de la relation, toutefois récente, qu'il expose entretenir avec une ressortissante française. Enfin, aucun des éléments dont il se prévaut ne caractérise une circonstance humanitaire au sens des dispositions précitées. Par suite, et alors même que sa présence sur le territoire français ne constituerait pas une menace pour l'ordre public et qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, le préfet de la Côte-d'Or n'a pas commis d'erreur d'appréciation en assortissant sa mesure d'éloignement d'une interdiction de retour d'une durée d'un an sur le territoire français, comme le prévoit le III de ce même article.

11. En troisième lieu, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 5 et 7, M. C... B..., qui n'a pas apporté d'autres précisions à l'appui de ces moyens, n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français en litige méconnaît les articles 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle procède d'un détournement de pouvoir.

12. Il résulte de ce qui précède que M. C... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

13. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de son conseil tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2021.

2

N°20LY03732


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03732
Date de la décision : 03/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Procédure - Incidents - Non-lieu - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP CLEMANG-GOURINAT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-03;20ly03732 ?
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