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21/10/2021 | FRANCE | N°21LY00055

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 21 octobre 2021, 21LY00055


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a opposé un refus à sa demande de regroupement familial présentée le 26 septembre 2018 au profit de son épouse et d'enjoindre au préfet de l'Isère d'autoriser le regroupement familial dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1903038 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif d

e Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de l'Isère a opposé un refus à sa demande de regroupement familial présentée le 26 septembre 2018 au profit de son épouse et d'enjoindre au préfet de l'Isère d'autoriser le regroupement familial dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1903038 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Vadon, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 novembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir le refus implicite opposé par le préfet de l'Isère à sa demande de regroupement familial ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère d'autoriser le regroupement familial au profit de son épouse dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure à défaut de saisine pour avis du maire de la commune de résidence en application des dispositions des articles L. 421-1, L. 421-2 et L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; si l'avis du maire est produit, cet avis ne permet pas d'identifier son signataire et a été signé par une autorité incompétente ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen attentif et particulier de sa demande ;

- la décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- si son épouse a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 10 août 2018, la demande de regroupement familial déposée le 26 septembre 2018 est antérieure à la notification de la décision du 10 août 2018 obligeant son épouse à quitter le territoire français ;

- son état de santé nécessite la présence de son épouse à ses côtés.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Conesa-Terrade a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant algérien né le 8 mai 1965, titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans, a sollicité le 26 septembre 2018, le bénéfice du regroupement familial en faveur de Mme B..., ressortissante algérienne, qu'il a épousée le 11 août 2018, présente sans titre sur le territoire français, après y être entrée irrégulièrement le 20 septembre 2014. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet au terme d'un délai de six mois suivant son accusé réception par l'autorité compétente, en application des dispositions des articles L. 421-4 et L. 421-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... relève appel du jugement du 9 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus implicite.

2. D'une part, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France.

3. D'autre part, l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, stipule que " peut être exclu du regroupement familial : (...) 2 - un membre de la famille séjournant à un autre titre ou irrégulièrement sur le territoire français (...) ".

4. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il résulte de la combinaison de ces stipulations que, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit d'exclure du regroupement familial un membre de la famille d'un algérien séjournant irrégulièrement sur le territoire français, dès lors que sa décision n'est pas de nature à porter une atteinte disproportionnée au droit du demandeur au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. M. A... soutient, en premier lieu, que faute de production de l'avis du maire de la commune de résidence en application de l'article L. 421-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de preuve que cet avis a été signé par une autorité compétente, la procédure est viciée. Toutefois, il ressort des écritures du préfet en première instance que la décision implicite litigieuse est notamment fondée sur la présence irrégulière de Mme B... sur le territoire français et l'avis du maire n'est pas requis lorsque la demande de regroupement familial est rejetée au motif qu'elle est présentée au bénéfice d'une personne qui séjourne irrégulièrement en France. Ce moyen ne peut par suite être retenu.

7. M. A... soutient, en deuxième lieu, que le préfet n'a pas procédé à un examen attentif et particulier de sa demande de regroupement familial mais il ressort des écritures du préfet de l'Isère devant le tribunal administratif de Grenoble que, pour refuser à M. A... le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, le préfet, qui s'est fondé sur la circonstance que Mme B... épouse A... réside irrégulièrement en France, a aussi procédé à un examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des incidences de son refus sur la situation de M. A... au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que M. A..., qui n'a pas demandé communication des motifs de la décision implicite de rejet qui lui a été opposée, n'est pas fondé à soutenir que sa demande de regroupement familial n'a pas fait l'objet d'un examen particulier et attentif.

8. M. A... reproche au préfet, en troisième lieu, d'avoir omis de prendre en compte sa situation d'adulte handicapé, bénéficiaire depuis 1997 de l'allocation adulte handicapé, et le fait que son état de santé nécessite la présence de son épouse à ses côtés, qu'il dispose d'un logement et de ressources garantissant des conditions d'accueil satisfaisantes, qu'il réside en France depuis plus de trente ans et est intégré, que son épouse est présente sur le territoire français depuis cinq ans, et que sa demande de regroupement familial a été déposée le 26 septembre 2018, avant que la décision du 10 août 2018 obligeant cette dernière à quitter le territoire français ne lui soit notifiée. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée irrégulièrement le 20 septembre 2014, s'est maintenue sur le territoire français en situation irrégulière jusqu'à la date de son mariage avec M. A... le 11 août 2018, après que sa demande d'asile a été rejetée et qu'elle a fait l'objet le 10 août 2018 d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Mme B... était par suite susceptible d'être exclue du bénéfice du regroupement familial en application des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien. La circonstance que le demandeur dispose d'un logement et de ressources suffisantes, perçoit l'allocation adulte handicapé depuis 1997 et allègue que son état de santé nécessiterait la présence de son épouse à ses côtés, ne sont pas de nature à établir, eu égard notamment au caractère récent du mariage, qu'en rejetant implicitement la demande de regroupement familial présentée par M. A..., le préfet de l'Isère aurait méconnu les stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ou porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ou qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de M. A....

9. Il résulte de ce qui précède que M A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet de sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

10. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés à l'occasion du présent litige doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2021.

5

N° 21LY00055


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00055
Date de la décision : 21/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle CONESA-TERRADE
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : VADON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-21;21ly00055 ?
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