Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2018 par lequel la rectrice de l'académie de Dijon l'a suspendu de ses fonctions à titre conservatoire, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux, les deux arrêtés du 18 mars 2019 l'ayant affecté en zone de remplacement de la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Nièvre, du 28 mars 2019 au 31 août 2019, à l'échéance de sa suspension de fonctions, d'autre part, d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Dijon de le rétablir dans ses fonctions de professeur de mathématiques au collège Aumenier-Michot de La Charité-sur-Loire.
Par jugement n° 1900923 lu le 27 septembre 2019, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 novembre 2019 et le 24 juillet 2020, M. A..., représenté par Me Pelletier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et les décisions susmentionnées ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté litigieux du 27 novembre 2018 méconnaît l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, dès lors, d'une part, que les faits qui lui sont reprochés, dont il conteste la matérialité, ne peuvent être regardés comme étant constitutifs d'une faute, ne présentent pas de caractère de vraisemblance et de gravité suffisants et, d'autre part, qu'aucun inconvénient pour le déroulement des procédures en cours ne résultait de son maintien en fonction ;
- les arrêtés du 18 mars 2019, sont entachés d'une insuffisance de motivation ;
- ils sont entachés d'un vice de procédure, la commission administrative paritaire n'a pas été consultée alors qu'il a changé de résidence administrative en méconnaissance de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 ;
- ils méconnaissent l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983, dès lors qu'ils ont pour effet de modifier son affectation à l'issue des quatre mois de suspension, alors même qu'il ne fait pas l'objet de poursuites pénales ;
- cette affectation est incompatible avec son état de santé ;
- ils sont illégaux en raison de d'illégalité de l'arrêté du 27 novembre 2018.
Par mémoires enregistrés les 22 juin et 6 octobre 2020, la rectrice de l'académie de Dijon conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Par ordonnance du 7 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;
- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., professeur certifié de mathématiques, affecté au collège Aumenier-Michot de La Charité-sur-Loire, dans la Nièvre, a, par une décision du 27 novembre 2018, fait l'objet d'une mesure de suspension à titre conservatoire pour une durée maximale de quatre mois. A l'échéance de sa suspension de fonctions, deux décisions du 18 mars 2019, l'ont rattaché administrativement à la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Nièvre et affecté en zone de remplacement pour la période du 28 mars 2019 au 31 août 2019. Il relève appel du jugement du 27 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes d'annulation de la décision du 27 novembre 2018, du rejet implicite de son recours gracieux et des arrêtés du 18 mars 2019.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 27 novembre 2018 et le rejet de son recours gracieux :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline ". La suspension d'un fonctionnaire, prononcée en application de ces dispositions, est une mesure conservatoire, prise dans l'intérêt du service lorsque les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité.
3. Or, il ressort des éléments recueillis par l'administration, notamment de deux rapports de la principale du collège, des témoignages concordants des parents d'élèves et d'une élève, que M. A... a adopté une attitude et tenu des propos intrusifs sur la vie privée de deux de ses élèves. Ces faits présentaient dès lors, à la date de la décision litigieuse, un degré de vraisemblance suffisant. Dans la mesure où ils pouvaient altérer la confiance et l'autorité nécessaires à l'exercice de la fonction enseignante, ils étaient également d'une gravité suffisante pour fonder une mesure de suspension de fonctions.
4. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 2, pris en toutes ses branches, doit être écarté et que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 27 novembre 2018 et du rejet de son recours gracieux.
En ce qui concerne les arrêtés du 18 mars 2019 :
5. Aux termes du troisième alinéa du même article 30 : " Si, à l'expiration d'un délai de quatre mois, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire, le fonctionnaire qui ne fait pas l'objet de poursuites pénales est rétabli dans ses fonctions. S'il fait l'objet de poursuites pénales et que les mesures décidées par l'autorité judicaire ou l'intérêt du service n'y font pas obstacle, il est également rétabli dans ses fonctions à l'expiration du même délai. Lorsque, sur décision motivée, il n'est pas rétabli dans ses fonctions, il peut être affecté provisoirement par l'autorité investie du pouvoir de nomination, sous réserve de l'intérêt du service, dans un emploi compatible avec les obligations du contrôle judiciaire auquel il est, le cas échéant, soumis (...) ".
6. Réserve faite de poursuites pénales assorties d'un contrôle judiciaire interdisant l'exercice de certaines activités ou la fréquentation de certains lieux, ou bien du prononcé d'une sanction disciplinaire emportant exclusion du service ou déplacement d'office, tout agent suspendu doit, à l'échéance de la mesure provisoire dont il a fait l'objet, être réintégré dans les fonctions qu'il occupait avant sa suspension. M. A..., qui n'ayant pas été poursuivi pénalement ne pouvait avoir fait l'objet d'un contrôle judiciaire s'opposant à son retour au collège Aumenier-Michot de La Charité-sur-Loire, devait y être réintégré à l'issue de sa suspension de quatre mois. Par suite, la rectrice n'a pu, sans méconnaître les dispositions précitées, le rattacher à la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Nièvre pour l'affecter en zone de remplacement.
7. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 18 mars 2019. Ledit jugement doit être annulé dans cette mesure, ainsi que les arrêtés du 18 mars 2019.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1900923 lu le 27 septembre 2019 du tribunal administratif de Dijon est annulé en tant qu'il a rejeté la demande d'annulation des arrêtés du 18 mars 2019 par lesquels la rectrice de l'académie de Dijon a rattaché administrativement M. A... à la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Nièvre et l'a affecté en zone de remplacement et les arrêtés précités, sont annulés.
Article 2 : L'État versera la somme de 1 200 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Dijon.
Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.
N° 19LY04368 4