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28/09/2021 | FRANCE | N°20LY03799

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 28 septembre 2021, 20LY03799


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 8 octobre 2020 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, et a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2006010 du 9 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requ

ête sommaire enregistrée le 14 décembre 2020, un mémoire de régularisation enregistré le 8 janv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 8 octobre 2020 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, et a prononcé une interdiction de circulation sur le territoire français pendant une durée de trois ans.

Par un jugement n° 2006010 du 9 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête sommaire enregistrée le 14 décembre 2020, un mémoire de régularisation enregistré le 8 janvier 2021 et un mémoire en réplique enregistré le 13 avril 2021, M. A... B..., représenté par Me Combes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 décembre 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 8 octobre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français ;

- la décision lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 16 février 2021, le préfet de l'Isère conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

Par décision du 3 mars 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 8 octobre 2020, le préfet de l'Isère a fait obligation à M. B..., ressortissant polonais, de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, et a prononcé à son encontre une interdiction de circulation sur le territoire français pendant une durée de trois ans. M. B... relève appel du jugement du 9 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : (...) 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., né en 1981, déclare être entré en France en 2009 sans qu'il ne ressorte des pièces du dossier qu'il y soit demeuré de manière continue depuis cette date. Il était incarcéré à la date de la décision en litige, suite à une condamnation, par jugement du 30 septembre 2019, à une peine d'emprisonnement de douze mois dont six avec sursis pour des faits d'agression sexuelle et harcèlement d'une personne suivi d'une incapacité n'excédant pas huit jours, commis le 22 juin 2019. Le préfet de l'Isère produit également des fiches émanant des services de police selon lesquels M. B... est défavorablement connu des services de police pour des faits d'offre ou de cession de stupéfiants, de vols à l'étalage et de destruction de bien commis entre 2010 et 2012, de troubles à la tranquillité publique et menace en 2017 et également pour un autre fait d'agression sexuelle survenu en août 2020, entre sa condamnation et son incarcération. Si l'intéressé, qui ne conteste pas la réalité de l'ensemble ces faits, fait valoir qu'il a effectué pendant sa détention un suivi auprès du centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie, le préfet de l'Isère fait valoir que, postérieurement à la décision en litige, son sursis avec mise à l'épreuve a été révoqué par jugement du 16 novembre 2020 du juge d'application des peines. Eu égard au nombre de délits dans lesquels l'intéressé est impliqué caractérisant une persistance de son comportement délinquant lors de sa présence en France, à la gravité des faits commis récemment qui ont justifié sa condamnation à une peine d'emprisonnement, et alors même que l'intéressé a en France une fille, dont il vit toutefois séparé depuis 2014, et qu'il a exercé une activité professionnelle de chauffeur routier pendant ses séjours en France, le préfet de l'Isère a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, obliger le requérant à quitter le territoire dans le délai de trente jours en se fondant sur les dispositions précitées au point 2.

4. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir qu'il est père d'une fille française née en 2013, dont il vit séparé depuis qu'elle a un an et demi, il ne produit, pour établir la persistance de ses liens avec cette dernière, dont il ne précise pas au demeurant la nature et la fréquence, que trois photographies postérieures à la date de sa séparation avec la mère de l'enfant. Dans ces conditions, faute pour l'intéressé d'apporter des éléments de nature à justifier l'existence de liens avec sa fille, la décision l'obligeant à quitter le territoire français ne méconnaît pas l'intérêt supérieur de son enfant, garanti par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

5. Enfin, compte tenu de l'absence d'intégration en France de M. B... et de la menace qu'il représente pour l'ordre public, du fait qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il entretiendrait des liens réguliers avec sa fille, et alors qu'il est célibataire et n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Pologne, où résident notamment ses parents, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur l'interdiction de circuler sur le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant interdiction de circuler sur le territoire français.

7. Aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans (...) ".

8 Compte tenu de la persistance du comportement délictueux du requérant depuis son entrée en France et de la gravité des derniers faits commis, du fait qu'il ne justifie pas entretenir de liens autres que ponctuels avec sa fille, qui peut lui rendre visite en Pologne, et de son absence d'attaches familiales proches en France, le préfet de l'Isère a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application combinée des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

2

N° 20LY03799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03799
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : COMBES DELPHINE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-28;20ly03799 ?
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