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28/09/2021 | FRANCE | N°20LY03453

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 28 septembre 2021, 20LY03453


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 9 avril 2020 par lequel le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que soit rendu l'arrêt de la cour nationale du

droit d'asile.

Par un jugement n° 2003700 du 28 juillet 2020, la magistrate désign...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 9 avril 2020 par lequel le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que soit rendu l'arrêt de la cour nationale du droit d'asile.

Par un jugement n° 2003700 du 28 juillet 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon, après avoir admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur ses conclusions à fin de suspension, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 25 novembre 2020, Mme B..., représentée par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon du 28 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 9 avril 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail jusqu'au réexamen de sa situation ;

4°) à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise sans audition préalable ni que ses observations écrites ou orales soient recueillies en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu ; elle aurait pu apporter des précisions sur la situation de ses enfants qui auraient pu influencer le sens de la décision ; elle a ainsi été privée d'une garantie substantielle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle indique que ses quatre enfants majeurs résident dans son pays d'origine ; pour les mêmes motifs, elle ne procède pas d'un examen particulier de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, tant au regard de sa durée que de l'absence de perspective d'éloignement en raison de la crise sanitaire et de la suspension du trafic aérien ;

- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision viole le principe général du droit de l'Union européenne du droit de la défense et du droit d'être entendu ;

- cette décision viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le rejet de sa demande d'asile n'est pas définitif ; elle a exercé un pourvoi contre l'ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile du 29 mai 2020, qui a été admis ; la Cour nationale du droit d'asile l'a admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle et a rendu son ordonnance, le même jour, sans attendre que son avocat désigné soit en mesure d'exercer son office en méconnaissance des droits de la défense, de son droit au recours effectif garanti par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinés à l'article 3 de cette convention, aux articles 33 de la convention de Genève et 19 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; il convient de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une décision du 28 octobre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de Mme B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante albanaise née le 11 janvier 1965, entrée en France le 30 septembre 2019, relève appel du jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon du 28 juillet 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 9 avril 2020 par lequel le préfet du Rhône l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 avril 2020 :

2. Mme B... réitère en appel ses moyens de première instance selon lesquels l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée, a été prise en méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu, est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation et d'une erreur de fait sur ses attaches familiales en Albanie, viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par la première juge.

3. Il y a également lieu d'adopter les motifs par lesquels la première juge a écarté les moyens, dirigés contre la décision fixant le délai de départ volontaire, tirés de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, de l'inexacte application du II de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur et de l'erreur manifeste d'appréciation.

4. Mme B... reprend également en appel ses moyens selon lesquels la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, viole le principe général du droit de l'Union européenne du droit de la défense et du droit d'être entendu et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces moyens ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs.

Sur les conclusions subsidiaires à fin de suspension de la mesure d'éloignement :

5. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la Cour. "

6. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la reconnaissance de la qualité de réfugié a été définitivement refusée à Mme B... par une ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile du 29 mai 2020, qui lui a été notifiée le 10 juin 2020. L'exercice d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat, dépourvu d'effet suspensif, n'a aucune incidence sur le caractère définitif de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Dans ces conditions, dès lors que les dispositions précitées de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne permettent le maintien de l'étranger sur le territoire que durant l'examen de son recours par la Cour nationale du droit d'asile, la circonstance que la requérante se soit pourvue en cassation contre l'ordonnance du 29 mai 2020 ne peut utilement être invoquée au soutien de sa demande de suspension de la mesure d'éloignement. Par suite, les conclusions de Mme B... tendant à la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement, dépourvues d'objet à la date du jugement de première instance, doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions dirigées contre l'arrêté du 9 avril 2020, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de Mme B... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail jusqu'au réexamen de sa situation ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.

5

N° 20LY03453


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03453
Date de la décision : 28/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : PETIT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-28;20ly03453 ?
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