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26/08/2021 | FRANCE | N°19LY02450

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 26 août 2021, 19LY02450


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le syndicat départemental d'énergies du Rhône (SYDER) à lui verser une somme de 94 068,40 euros en réparation de préjudices nés de l'illégalité de son licenciement.

Par un jugement n° 1708517 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Lyon a fait partiellement droit à sa demande en condamnant le SYDER à lui verser une somme de 7 916,05 euros.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juin 2

019, le syndicat départemental d'énergies du Rhône, représenté par Me Petit, demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le syndicat départemental d'énergies du Rhône (SYDER) à lui verser une somme de 94 068,40 euros en réparation de préjudices nés de l'illégalité de son licenciement.

Par un jugement n° 1708517 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Lyon a fait partiellement droit à sa demande en condamnant le SYDER à lui verser une somme de 7 916,05 euros.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 juin 2019, le syndicat départemental d'énergies du Rhône, représenté par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 avril 2019 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- à titre principal, la demande de M. A... était irrecevable, faute pour celui-ci d'en avoir précisé le fondement juridique dans le délai du recours contentieux ;

- à titre subsidiaire, le tribunal a requalifié les conclusions irrecevables de la requête et ainsi a statué ultra petita ;

- M A... ne justifie d'aucun préjudice matériel ; le préjudice invoqué n'est pas directement lié à la faute commise par son licenciement illégal.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 août 2019, M. B... A..., représenté par Me Tudela, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge du syndicat départemental d'énergies du Rhône (SYDER) la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Deguerry, pour le SYDER ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 10 mars 2014, après avoir supprimé son poste, le syndicat départemental d'énergies du Rhône (SYDER) a licencié M. A..., ingénieur en chef non titulaire, recruté initialement le 2 juin 2009, alors en cours de contrat à durée déterminée jusqu'au 4 juillet 2015. Ce licenciement a été annulé par un jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Lyon, lequel a enjoint au syndicat départemental d'énergies du Rhône de réintégrer M. A.... Le SYDER n'ayant pas exécuté ce jugement, M. A... l'a mis en demeure, par un courrier du 27 juillet 2017, de lui verser une somme totale de 95 268 euros au titre des rémunérations qu'il n'a pas perçues durant sa période d'éviction, du prorata de prime de fin d'année, de la prime de précarité et des sommes mises à la charge du syndicat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le jugement. Le SYDER a gardé le silence sur cette demande. Le syndicat départemental d'énergies du Rhône fait appel du jugement du 29 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon, saisi par M. A..., l'a condamné à verser à celui-ci une somme de 7 916,05 euros en réparation des préjudices nés de l'illégalité du licenciement.

Sur la recevabilité de la demande en première instance :

2. D'une part, le décret du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative a, par son article 10, supprimé à l'article R. 421-3 du code de justice administrative la règle selon laquelle le délai de recours de deux mois ne courait qu'à compter d'une décision expresse " en matière de plein contentieux ". L'article 35 de ce décret, qui fixe les conditions de son entrée en vigueur, dispose que : " I. - Le présent décret entre en vigueur le 1er janvier 2017. / II. - Les dispositions des articles 9 et 10 (...) sont applicables aux requêtes enregistrées à compter de cette date. " Il en résulte qu'un délai de recours de deux mois court à compter du 1er janvier 2017, contre toute décision implicite relevant du plein contentieux qui serait née antérieurement à cette date. Par ailleurs, s'il résulte du principe de sécurité juridique que le destinataire d'une décision administrative individuelle qui a reçu notification de cette décision ou en a eu connaissance dans des conditions telles que le délai de recours contentieux ne lui est pas opposable doit, s'il entend obtenir l'annulation ou la réformation de cette décision, saisir le juge dans un délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an, cette règle ne trouve pas à s'appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d'une personne publique qui, s'ils doivent être précédés d'une réclamation auprès de l'administration, ne tendent pas à l'annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés. La prise en compte de la sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l'effet du temps, est alors assurée par les règles de prescription prévues par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ou, en ce qui concerne la réparation des dommages au titre de la responsabilité médicale, par l'article L. 1142-28 du code de la santé publique.

3. Il résulte de l'instruction que, produisant à l'appui le jugement du 19 octobre 2016 par lequel a été annulée la décision du 10 mars 2014 qui avait prononcé son licenciement, M. A..., par une demande enregistrée le 29 novembre 2017 au greffe du tribunal administratif de Lyon faisant état de sa demande préalable du 27 juillet 2017 sur laquelle le syndicat départemental d'énergies du Rhône avait gardé le silence, a sollicité la condamnation de celui-ci à lui verser les sommes de " 58 150,40 euros nets à titre de rappel de salaires (...), 2 450 euros au titre des indemnités de prime de fin d'année instituée par le SYDER pour 14 mois, 33 468 euros au titre de la prime de précarité ". Par un mémoire enregistré le 8 février 2019, M. A... concluait à la condamnation du SYDER à lui verser les sommes de " 58 150,40 euros au titre du préjudice subi du fait de la perte de son salaire, 2 450 euros au titre de l'indemnisation de la perte de revenu liée aux indemnités de prime de fin d'années, 33 468 euros au titre de la prime de précarité ".

4. Il ressort ainsi clairement de la demande du 29 novembre 2017, qui par ailleurs se plaçait sur le terrain de la responsabilité pour faute en raison de l'illégalité de la décision de licenciement dès lors qu'était produit à l'appui et invoqué le jugement du 19 octobre 2016, que M. A... recherchait la condamnation du SYDER à l'indemniser de la perte de revenus qu'il a subie en conséquence de son éviction de ses fonctions. Le délai de recours de deux mois ne saurait dès lors être opposé à l'appui de la fin de non-recevoir soulevée par le SYDER contre les conclusions contenues dans le mémoire de M. A..., enregistré le 8 février 2019 avant la clôture de l'instruction et régulièrement communiqué au conseil du SYDER le même jour, par lesquelles M. A... précisait ses conclusions initiales en demandant les mêmes sommes en réparation de son préjudice matériel à hauteur des salaires qu'il n'a pas perçus du fait de son éviction. Il suit de là que le SYDER n'est pas fondé, sans pouvoir utilement se prévaloir des conclusions à l'audience du rapporteur public, à en tirer que M. A... n'aurait pas articulé de moyen de droit à l'appui de sa requête, ne précisant pas le cadre procédural de son action en première instance, non plus qu'il n'aurait explicitement formulé ses conclusions indemnitaires que tardivement. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges, qui n'ont pas statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis, ont écarté la fin de non-recevoir opposée par le SYDER à la demande de M. A....

Sur les conclusions indemnitaires :

5. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité des personnes publiques, l'agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre, y compris au titre de la perte des rémunérations auxquelles il aurait pu prétendre s'il était resté en fonctions. Lorsque l'agent ne demande pas l'annulation de cette mesure mais se borne à solliciter le versement d'une indemnité en réparation de l'illégalité dont elle est entachée, il appartient au juge de plein contentieux, forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, de lui accorder une indemnité versée pour solde de tout compte et déterminée en tenant compte notamment de la nature et de la gravité des illégalités affectant la mesure d'éviction, de l'ancienneté de l'intéressé, de sa rémunération antérieure ainsi que, le cas échéant, des fautes qu'il a commises.

6. Il ressort des motifs, qu'il y a lieu d'adopter, du jugement attaqué que les premiers juges ont exactement apprécié le préjudice matériel de M. A... né de la perte de sa rémunération durant la période de son éviction en tirant de cette perte brute comparée aux sommes de toute nature que l'intéressé a perçues durant la même période le préjudice indemnisable, sans que la règle du service fait puisse être utilement invoquée à l'encontre du versement de cette indemnisation qui n'est par nature pas constitutive d'une rémunération.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le SYDER n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon l'a condamné à verser la somme de 7 916,05 euros à M. A....

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le SYDER. Il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat départemental d'énergies du Rhône une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés au même titre par M. A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat départemental d'énergies du Rhône est rejetée.

Article 2 : Le syndicat départemental d'énergies du Rhône versera à M. A... une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat départemental d'énergies du Rhône et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 8 juillet 2021 à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 août 2021.

N° 19LY02450


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02450
Date de la décision : 26/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-08-01 Procédure. - Introduction de l'instance. - Formes de la requête. - Obligation de motiver la requête.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : TUDELA ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-08-26;19ly02450 ?
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