Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1702333 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. et Mme B... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes (article 1er) et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2).
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 avril 2019 et le 7 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de M. et Mme B... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, à hauteur de 29 894 euros en droits et 7 064 euros en pénalités ;
3°) de remettre à la charge de M. et Mme B... les cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, à hauteur de 21 062 euros en droits.
Il soutient que :
- les premiers juges ne pouvaient faire droit à la demande subsidiaire des époux B... tendant au bénéfice de l'exonération de la plus-value résultant de la première cession d'un logement autre que la résidence principale, les conditions posées au 1° bis du II de l'article 150 U du code général des impôts n'étant pas réunies, faute pour l'acte de cession de comporter les mentions prévues à l'article 41 duovicies-0 H de l'annexe 3 du même code et faute de mention du montant net de la plus-value reporté dans la déclaration d'ensemble des revenus, en méconnaissance du dernier alinéa du 1 de l'article 170 du code général des impôts ;
- en outre, la condition de fond tenant au remploi total ou partiel de la plus-value, dans les 24 mois suivant la cession, pour l'acquisition d'un logement affecté à l'habitation principale des contribuables n'est pas davantage remplie, les premiers juges ayant à tort fait peser la charge de la preuve sur l'administration fiscale ; après recherches, seule l'acquisition d'un terrain à bâtir pour un montant de 88 000 euros est avérée, les contribuables ne justifiant ni du dépôt d'une demande de permis de construire ni de l'engagement d'une opération de construction dans le délai de 24 mois, ni en conséquence du remploi de la totalité de la plus-value d'un montant de 135 883 euros ;
- il se réfère à ses écritures de première instance en ce qui concerne l'impossibilité pour les contribuables de bénéficier de l'exonération pour cession de l'habitation principale et demande la confirmation du jugement sur ce point, l'utilisation temporaire d'un logement ne pouvant suffire pour qu'il ait le caractère d'une résidence principale, l'exonération étant refusée lorsque le propriétaire ne revient occuper le logement que pour les besoins de la vente.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2019, M. et Mme B..., représentés par Me Moulinier, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés, demandent l'entier bénéfice de leurs écritures de première instance et persistent en particulier à soutenir que le bien vendu constituait leur résidence principale, les consommations d'électricité s'expliquant par la bonne performance énergétique du bien et la consommation d'eau étant par ailleurs normale pour une famille composée de 5 personnes.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale, selon proposition de rectification du 23 mai 2016, a remis en cause l'exonération de plus-value de cession immobilière dont avaient bénéficié M. et Mme B..., sur le fondement du 1° de l'article 150 U du code général des impôts, à l'occasion de la vente le 14 février 2014 d'une maison d'habitation présentée comme leur résidence principale, située 46 rue Brillat Savarin à Saint-Denis-lès-Bourg (Ain). Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon, après avoir jugé que M. et Mme B... ne pouvaient bénéficier de l'exonération prévue au 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts, a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes, au motif qu'ils pouvaient se prévaloir de l'exonération prévue au 1° bis du II de l'article 150 U du code général des impôts, dont bénéficie sous certaines conditions la première cession d'un logement autre que la résidence principale.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques (...), lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis (...), sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. / (...) II.- Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession ; / 1° bis Au titre de la première cession d'un logement, y compris ses dépendances immédiates et nécessaires au sens du 3° si leur cession est simultanée à celle dudit logement, autre que la résidence principale, lorsque le cédant n'a pas été propriétaire de sa résidence principale, directement ou par personne interposée, au cours des quatre années précédant la cession. / L'exonération est applicable à la fraction du prix de cession défini à l'article 150 VA que le cédant remploie, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la cession, à l'acquisition ou la construction d'un logement qu'il affecte, dès son achèvement ou son acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale. En cas de manquement à l'une de ces conditions, l'exonération est remise en cause au titre de l'année du manquement ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si un contribuable remplit les conditions légales d'une exonération.
4. L'administration fiscale ayant remis en cause le bénéfice de l'exonération pour cession de la résidence principale prévue au 1° précité, M. et Mme B... ont soutenu à titre subsidiaire, devant le tribunal administratif, qu'ils pouvaient bénéficier de l'exonération pour première cession d'un logement autre que la résidence principale prévue au 1° bis du II de l'article 150 U précité. Toutefois, s'il est établi que les contribuables ont acquis le 11 mars 2014 un terrain à bâtir au 599 chemin des bouleaux à Péronnas, pour un montant de 88 000 euros, il ne résulte pas de l'instruction, alors que le ministre le conteste en appel, qu'ils aient entrepris la construction de leur future résidence principale sur ce terrain dans les 24 mois de la cession survenue le 14 février 2014 par remploi total ou partiel du surplus du prix de cession, ni que l'affectation à leur résidence principale serait intervenue dès l'achèvement du bien, alors que M. et Mme B..., qui sont seuls en mesure de le faire, ne produisent ni contrat de construction ni aucune pièce permettant de déterminer la date de leur éventuel changement de résidence principale. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du ministre, ce dernier est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement dont il relève appel, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2014.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen invoqué à titre principal par M. et Mme B... tant en première instance qu'en appel.
6. Il résulte des termes de la proposition de rectification comme des écritures de l'administration fiscale que M. et Mme B... ont déclaré avoir occupé le logement en litige de mi-octobre ou début novembre 2013 au 1er février 2014, date à laquelle ils ont pris à bail un autre logement, avant la signature de l'acte de vente de leur maison intervenue le 14 février 2014. Si la consommation d'électricité de 92 kWh pour un montant de 7,86 euros hors taxes est très faible au cours de la période d'occupation en litige, au regard de la puissance souscrite et du classement obtenu à l'issue du diagnostic de performance énergétique, soit " E " selon les allégations non contredites du ministre, il résulte en revanche de l'instruction que la consommation d'eau relevée au titre de la même période, soit 46 mètres cubes, est comparable à celle relevée dans le logement précédemment occupé par les contribuables et cohérente avec la composition de la famille. La circonstance qu'un compromis de vente du bien ait été signé dès le 13 novembre 2013 est, par elle-même, sans incidence sur la réalité de l'occupation. Il ne résulte, par ailleurs, pas de l'instruction que M. et Mme B... aient eu un autre logement à leur disposition au cours de la période en litige. Dans ces conditions, alors que les dispositions précitées du 1° de l'article 150 U du code général des impôts n'imposent pas de durée minimale d'occupation avant la cession du bien immobilier, il est suffisamment établi que M. et Mme B... avaient effectivement, quoique brièvement, fixé leur résidence principale au 46 rue Brillat Savarin à la date de la cession. Par conséquent, ils étaient fondés à se prévaloir de l'exonération de la plus-value de cession de cette résidence principale.
7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon ait prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur les frais liés au litige :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme B... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... B... et Mme A... D... épouse B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 8 juillet 2021, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Le Frapper, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 août 2021.
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N° 19LY01666
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