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01/07/2021 | FRANCE | N°21LY00679

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 juillet 2021, 21LY00679


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une requête n°2008910, Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par une requête n°2008916, M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'as

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Par un jugement n° 2008910, 2008916 du 17 février 2021, le magistrat désigné par la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une requête n°2008910, Mme D... F... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par une requête n°2008916, M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2008910, 2008916 du 17 février 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2021, M. E... et Mme F..., représentés par Me C... A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon du 17 février 2021 ;

2°) d'annuler les décisions du 8 décembre 2020 susvisées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeurs d'asile dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 7611 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les décisions de transfert méconnaissent les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil, de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 du Parlement européen et du Conseil ;

- il appartient au préfet de justifier que les exigences d'information visées aux articles 31 et 32 de ce règlement ont été respectées ;

- les décisions précitées méconnaissent l'article 17 de ce règlement ainsi que l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elles méconnaissent l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire, enregistré le 7 avril 2021, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. E... et Mme F... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le règlement (UE) n°603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme G..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., née le 15 juillet 1994, et M. E..., né le 4 août 1996, de nationalité nigériane, déclarent être entrés en France le 6 juillet 2020 afin d'y solliciter l'asile. Ils se sont vus délivrer une attestation de demande d'asile le 9 septembre 2020 et leurs empreintes ont été relevées le même jour. La consultation du fichier européen Eurodac ayant fait apparaître qu'ils avaient demandé l'asile en Italie, pour Mme F..., les 27 juin 2017 et 19 septembre 2018 et, pour M. E..., le 12 juin 2017, les autorités françaises ont saisi les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge des intéressés, explicitement acceptée par ces autorités le 21 octobre 2020. Par deux arrêtés du 8 décembre 2020, le préfet du Rhône a décidé de les remettre aux autorités italiennes responsables de leurs demandes d'asile. M. E... et Mme F... relèvent appel du jugement par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation de ces deux arrêtés.

2. En premier lieu, les appelants réitèrent en appel, et sans apporter aucun élément nouveau de droit ou de fait à l'appui de ceux-ci, les moyens tirés de la méconnaissance par les décisions de transfert en litige des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du même jour. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge au point 5 de son jugement. En outre, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant dès lors que ces dispositions ne concernent que le cas des demandeurs dont " l'examen de la demande relève de la compétence de la France ", ce qui n'est pas le cas des appelants.

3. En deuxième lieu, si les appelants font valoir que le préfet du Rhône a entaché ses décisions d'un vice de procédure en se dispensant de communiquer aux autorités italiennes les informations relatives à l'état de santé de leur fille et de recueillir leur avis sur les possibilités de soin qui lui seraient offertes, les dispositions des articles 31 et 32 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 invoqués sont relatives aux modalités d'exécution d'une décision de transfert et sont sans incidence sur la légalité des décisions ordonnant la remise des intéressés aux autorités italiennes.

4. En troisième lieu, le premier paragraphe de l'article 3 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 prévoit que la demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride " est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable ". Le premier paragraphe de l'article 17 de ce règlement dispose que : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ". L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise enfin ne pas faire obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue pas un droit pour les demandeurs d'asile. En outre, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

5. M. E... et Mme F... se prévalent de l'état de santé de leur fille, née le 6 août 2020 en état de grande prématurité, et soutiennent que son état nécessite des soins lesquels ne pourront être prodigués en Italie. Ils font valoir qu'en cas de retour dans ce pays, ils seront immédiatement expulsés vers le Nigéria alors que leur demande d'asile n'y a pas été examinée. Toutefois, aucun élément versé au dossier n'établit que l'état de santé de leur enfant nécessite un suivi médical régulier, ni que cet éventuel suivi ou prise en charge ne pourrait pas être assuré en Italie ni que le transfert envisagé entraînerait un risque pour la santé de leur enfant. Contrairement à ce qu'ils estiment, l'accord expresse de réadmission du 21 octobre 2020 des autorités italiennes n'a pas pour objet ni pour effet de les renvoyer au Nigéria mais d'organiser leur transfert vers l'Italie. Ils ne font par ailleurs état d'aucune décision de rejet de leur demande d'asile en Italie ni d'une mesure d'éloignement prise à leur encontre par les autorités italiennes. Par suite, doivent être écartés les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions de l'article 17 du règlement européen du 26 juin 2013.

6. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants (...) l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Pour les motifs précédemment indiqués et dès lors que les décisions en litige n'auront pas pour effet de séparer les parents de leur enfant, le moyen tiré de la méconnaissance par les décisions litigieuses des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que M. E... et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles de leur conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... F..., à M. B... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme G..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juillet 2021.

2

N° 21LY00679


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00679
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : IMBERT MINNI JULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-07-01;21ly00679 ?
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