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17/06/2021 | FRANCE | N°18LY04418

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3eme chambre - formation a 3, 17 juin 2021, 18LY04418


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) le cas échéant après expertise ordonnée avant-dire droit, d'annuler la décision référencée GRH-GTCM/ML/MF/n° 16-00885 du 1er avril 2016 par laquelle le maire de Grenoble a refusé de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux dont il souffre ;

2°) d'enjoindre au maire de Grenoble de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux survenu le 12 mai 2015, à la suite de l'accident de servi

ce du 6 décembre 2006 et, en conséquence de lui verser la somme de 329,94 euros au titre d'u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) le cas échéant après expertise ordonnée avant-dire droit, d'annuler la décision référencée GRH-GTCM/ML/MF/n° 16-00885 du 1er avril 2016 par laquelle le maire de Grenoble a refusé de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux dont il souffre ;

2°) d'enjoindre au maire de Grenoble de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux survenu le 12 mai 2015, à la suite de l'accident de service du 6 décembre 2006 et, en conséquence de lui verser la somme de 329,94 euros au titre d'un rappel de traitement correspondant à une retenue indûment pratiquée sur le mois de septembre 2015 ainsi que de prendre en charge les frais et soins directement engendrés par ce nouvel épisode douloureux.

Par un jugement n° 1603105 du 9 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour à titre principal :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 octobre 2018 et la décision du 1er avril 2016 ;

2°) d'enjoindre au maire de la commune de Grenoble de prendre une nouvelle décision reconnaissant la rechute du 12 mai 2015 de son accident de service du 6 décembre 2006 ;

3°) de dire que la commune de Grenoble devra lui verser la somme de 329,94 euros (somme brute) retenue sur sa fiche de paie de septembre 2015 et devra également prendre en charge les frais et soins directement engendrés par la rechute ;

4°) à titre subsidiaire, avant dire droit, d'ordonner une expertise médicale ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Grenoble une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure devant la commission de réforme était irrégulière car il a été privé de la garantie d'une contre-expertise à la suite de l'expertise contestée diligentée par la commission de réforme, laquelle aurait dû compter un rhumatologue et du fait de l'absence d'information du médecin de la prévention ;

- le lien direct et certain entre l'accident de service du 6 décembre 2006 et le nouvel épisode douloureux dont il a souffert à partir de mai 2015 est établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2019, la commune de Grenoble représentée par la SCP Lyon-Caen et Thiriez :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 février 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Le 6 décembre 2006, M. B..., alors employé en qualité de gardien de police municipale de la commune de Grenoble, a été victime, lors d'une séance de sport, d'un accident reconnu imputable au service lui ayant occasionné une entorse à la cheville gauche avec arrachement de la pointe de la malléole externe. Le 31 novembre 2007, l'intéressé a été " considéré comme guéri avec retour à l'état antérieur sans séquelles indemnisables ". Souffrant de nouveau de la cheville gauche à compter de février 2015, après avoir demandé que cet épisode douloureux soit attribué à l'accident du travail survenu en 2006, M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble, après expertise ordonnée avant-dire droit, d'annuler la décision 1er avril 2016 par laquelle le maire de Grenoble a refusé de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux dont il souffre et d'enjoindre au même maire de reconnaître imputable au service le nouvel épisode douloureux et, en conséquence, de lui verser la somme de 329,94 euros au titre d'un rappel de traitement correspondant à une retenue indûment pratiquée sur le mois de septembre 2015 ainsi que de prendre en charge les frais et soins directement engendrés par ce nouvel épisode douloureux. Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. B..., dont il relève appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé : " La commission de réforme doit être saisie de tous témoignages, rapports et constatations propres à éclairer son avis. Elle peut faire procéder à toutes mesures d'instructions, enquêtes et expertises qu'elle estime nécessaires (...) ". La commission de réforme a fait usage, en l'espèce, des pouvoirs que lui confèrent les dispositions précitées puisqu'à la suite du témoignage de l'appelant et des pièces produites au cours d'une première séance, le 15 janvier 2016, elle a ordonné un complément d'expertise auprès du médecin auteur de l'expertise médicale du 10 juillet 2015 diligentée par la commune de Grenoble. En revanche et contrairement à ce que soutient M. B..., la contestation de sa part des conclusions de ce rapport d'expertise initial ne saurait conduire la commission de réforme à ordonner une contre-expertise auprès d'un médecin tiers, en l'absence de dispositions prévues en ce sens et alors même que l'appelant n'a formulé aucune demande de contre-expertise devant la commission de réforme. Dans ces conditions M. B... ne peut utilement soutenir qu'il a été privé de la garantie de bénéficier d'une contre-expertise.

3. Aux termes de l'article 3 du même arrêté : " (...) La commission de réforme comprend : 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa compétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ". Contrairement à ce qui est soutenu, la production devant la commission de réforme d'une expertise établie par un médecin spécialiste n'implique pas que, par la suite, ce médecin spécialiste prenne part aux travaux de la commission de réforme. En l'espèce, aucune circonstance particulière n'exigeait la présence d'un spécialiste lors de l'examen, par la commission de réforme, du dossier de l'appelant, alors même que la commission de réforme a sollicité ce spécialiste pour qu'il fournisse un complément d'expertise au vu de nouveaux documents médicaux produits par M. B.... En outre et surtout, ce dernier ne justifie pas que la présence d'un médecin spécialiste de sa pathologie était nécessaire pour éclairer la commission lors de l'examen de son cas. Le moyen tiré d'un vice de procédure tenant à l'absence d'un médecin spécialiste en séance doit, dès lors, être écarté.

4. Aux termes de l'article 15 du même arrêté : " Le secrétariat de la commission informe le médecin du service de médecine professionnelle et préventive, pour la fonction publique territoriale, le médecin du travail, pour la fonction publique hospitalière, compétent à l'égard du service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission (...). Ces médecins peuvent obtenir, s'ils le demandent, communication du dossier de l'intéressé. Ils peuvent présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion de la commission. Ils remettent obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus au premier alinéa des articles 21 et 23 ci-dessous. " Il ressort des pièces du dossier que le médecin du service de médecine professionnelle et préventive a bien été informé de la tenue et de l'ordre du jour des séances des 15 janvier et 15 mars 2016 au cours desquelles le dossier de M. B... a été examiné par la commission de réforme. Par suite, le moyen, tiré de ce que le médecin de prévention n'a pas été informé de la réunion de la commission de réforme, manque en fait.

5. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; (...) Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée (...) ". Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. La rechute d'un accident de service se caractérise par la récidive ou l'aggravation subite et naturelle de l'affection initiale après sa consolidation sans intervention d'une cause extérieure.

6. Il n'est pas contesté que la date de consolidation sans séquelles de l'état de santé de M. B... à la suite de l'accident de service du 6 décembre 2006 a été fixée au 30 novembre 2007. A la suite de sa demande de rechute, présentée en 2015, soit plus de sept ans après la date de sa consolidation, la commune de Grenoble a refusé de reconnaître imputable au service les troubles décrits par l'appelant au motif que ce dernier ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre sa pathologie de mai 2015 et son accident de service survenu en décembre 2006. L'expert mandaté par la commune de Grenoble, spécialisé en rhumatologie, maladies des os et des articulations, dans son rapport du 10 juillet 2015, a confirmé la position de la collectivité en indiquant : " ...que l'agent a été considéré comme guéri en novembre 2007 avec retour à l'état antérieur ; il n'y a eu aucune symptomatologie dans les années suivantes. La douleur apparue en février-mars 2015 lors de la pratique du footing n'a pas de lien réel, direct, certain et unique avec cet AT ; elle est plurifactorielle et se rattache essentiellement au mode de vie sportif : la demande de rechute le 12.05.2015 n'est pas recevable. ". La commission de réforme, lors des séances du 15 janvier 2016 et 15 mars 2016, a rendu un avis défavorable à la demande de l'appelant. En outre, les certificats médicaux postérieurs, produits par M. B..., ne permettent pas de remettre en cause l'avis de l'expert, dès lors, d'une part, que les trois certificats médicaux des deux médecins du sport ne contredisent pas sérieusement l'avis de l'expert, d'autre part, que le certificat du 16 novembre 2018 a été établi par un spécialiste en rééducation-réadaptation fonctionnelle, qui ne possède pas la compétence médicale suffisante pour contredire utilement l'avis de l'expert. Ainsi, eu égard, d'une part, au délai important qui s'est écoulé entre la date de consolidation et l'apparition de nouvelles douleurs à la cheville gauche en 2015, d'autre part, au fait que les certificats médicaux produits n'établissent pas le lien de causalité direct et certain entre les troubles dont souffre M. B... et l'accident de service survenu en 2006, le maire de la commune de Grenoble a pu légalement refuser de reconnaître leur imputabilité au service par la décision attaquée du 1er avril 2016.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, ni d'ordonner une expertise avant-dire droit, les conclusions présentées aux fins d'injonction et d'indemnisation ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 500 euros à verser à la commune de Grenoble, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la commune de Grenoble une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 18 mai 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juin 2021.

2

N° 18LY04418


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 18LY04418
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-17;18ly04418 ?
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