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10/06/2021 | FRANCE | N°20LY03077

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5eme chambre - formation a 3, 10 juin 2021, 20LY03077


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 18 mai 2020 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par jugement n° 2003291 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement du 17 septembre 2020 ainsi que l'arrêté du 18 mai 2020 susvisé ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 18 mai 2020 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par jugement n° 2003291 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 septembre 2020 ainsi que l'arrêté du 18 mai 2020 susvisé ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de lui accorder l'aide juridictionnelle provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute d'avoir examiné le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la mesure d'éloignement méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

- le refus de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code précité ainsi que l'article L. 313-14 du même code ;

- l'arrêté méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas présenté d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 2 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme C..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen, déclare être entré en France le 24 août 2016. Il a vu sa demande d'asile définitivement rejetée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 16 octobre 2018 et il a présenté, le 7 novembre 2018, une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 18 mai 2020, le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité, a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. Selon l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, susvisée : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président. ". M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 décembre 2020. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort du jugement attaqué que le tribunal a suffisamment répondu aux points 4 et 12 de son jugement au moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle soulevé par M. A... à l'appui de sa contestation de l'arrêté pris le 18 mai 2020 à son encontre par le préfet de l'Isère. L'appréciation ainsi portée par le tribunal sur ce moyen relève du bien-fondé et non de la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, l'arrêté du 18 mai 2020 en litige du préfet de l'Isère comporte les considérations de droit et de fait qui en sont le soutien en visant notamment les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fondement de la demande de titre de séjour présentée par M. A.... Par suite, l'arrêté contesté est suffisamment motivé au regard de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. En vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique lorsque, comme en l'espèce, elle est l'accessoire d'un refus de titre de séjour et ne déroge pas au délai de départ volontaire de droit commun de trente jours.

5. En deuxième lieu, si M. A... fait valoir que l'arrêté contesté serait entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors que le préfet de l'Isère n'a pas fait état du dépôt d'une demande d'asile pour sa fille née en France le 10 décembre 2018 ni de sa demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code précité, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait porté à la connaissance de l'administration de telles informations concernant sa fille mineure avant l'édiction de l'arrêté en litige et il n'avait pas, à cette date, déposé de demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L.313-14 du code précité mais uniquement sollicité un rendez-vous pour ce faire. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

7. Par un avis du 18 février 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a indiqué que l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Si M. A... indique être suivi pour une hépatite B, il ressort des pièces produites au dossier et notamment d'un certificat médical du 17 juillet 2020 que cette pathologie ne nécessite, au jour de l'arrêté contesté, aucun traitement médicamenteux mais uniquement un suivi biologique et clinique régulier. M. A... indique également être suivi pour une bilharziose urinaire, un syndrome anxieux et avoir subi une intervention chirurgicale en septembre 2017. Toutefois, ni le certificat médical de son médecin traitant établi le 5 juin 2020 ni aucun autre élément produit au dossier ne font état d'un traitement ou suivi médical particulier pour ces pathologies dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité de nature à remettre en cause les mentions de l'avis susvisé. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 10° de l'article L. 511-4 du même code doivent être écartés.

8. En quatrième lieu, M. A... n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité ni, ainsi qu'il a été rappelé, des dispositions de l'article L. 313-14 du même code. Les moyens tirés de la méconnaissance, par l'arrêté contesté, de ces dispositions ne peuvent donc qu'être écartés comme inopérants.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (....) ". Ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire.

10. Si M. A... soutient résider en France depuis le 24 août 2016 et vivre avec sa compagne et leur fille née le 10 décembre 2018, il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il participerait et contribuerait à l'entretien et l'éducation de son enfant ni ne justifie d'une vie commune ni même d'une relation avec la mère de son enfant. Il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans en Guinée et y conserve de très fortes attaches privées et notamment familiales puisqu'y résident son épouse, leurs trois enfants mineurs et sa soeur. M. A... ne justifie en outre d'aucune intégration socioprofessionnelle en France. Dans ces conditions, l'arrêté en litige n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé protégé par les stipulations précitées une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis ni n'est entaché à ce titre d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " M. A... ne produit aucun élément tendant à démontrer qu'il serait exposé à des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le préfet de l'Isère, en prenant l'arrêté en litige désignant la Guinée comme pays de destination, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 18 mai 2020 du préfet de l'Isère portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixation du pays de destination. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire de M. D... A....

Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juin 2021.

2

N° 20LY03077


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20LY03077
Date de la décision : 10/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-10;20ly03077 ?
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