Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Centre de Biologie Médicale, devenue société Eurofins-CBM69, a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations primitives d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2013 et 2014.
Par un jugement n°1702830 du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, déchargé l'intéressée de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2013, dans un article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, dans un article 3, rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du 23 octobre 2018 et d'ordonner à la société Eurofins-CBM69 de reverser la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés d'un montant de 228 338 euros à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2013.
Le ministre soutient que :
- la notion de détention de 95% du capital prévue à l'article 223 A du code général des impôts ne peut s'entendre que comme recouvrant à la fois la détention des droits de vote et des droits financiers de la société mère sur ses filiales ;
- il ressort des travaux parlementaires de la loi n°87-1060 du 30 décembre 1987 de finances pour 1988 que le taux de détention de 95% est un taux de contrôle défini d'après les droits de vote détenus en vertu de l'article L. 233-3 du code de commerce ;
- une autre interprétation de ces dispositions conduirait à méconnaître les principes qui ont présidé à la création du régime de l'intégration fiscale.
Par un mémoire, enregistré le 24 juillet 2019, la société Eurofins-CBM69 conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que l'article 223 A du code général des impôts dans sa version applicable en 2013 à la date de l'option n'exigeait que la détention de 95% du capital de la société et l'article 46 quater-0 ZF de l'annexe III au code général des impôts à la date de l'option était illégal car entaché d'incompétence.
Une ordonnance du 11 janvier 2021 a fixé la clôture de l'instruction au 10 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., première conseillère,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour la société Eurofins-CBM69 ;
Considérant ce qui suit :
1. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel des articles 1er et 2 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a déchargé la société Centre de Biologie Médicale, devenue la société Eurofins-CBM69, de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2013 et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 223 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable jusqu'à l'intervention de l'article 71 de la loi du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés ou d'établissements stables membres du groupe (...) ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZF de l'annexe III au même code, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts, la détention de 95% au moins du capital d'une société s'entend de la détention en pleine propriété de 95% au moins des droits à dividendes et de 95% au moins des droits de vote attachés aux titres émis par cette société (...) ".
3. Il résulte des dispositions précitées de l'article 223 A du code général des impôts, qui ne comportent aucune obscurité justifiant qu'il soit recouru, pour apprécier leur portée, aux travaux préparatoires de la loi de laquelle elles sont issues, que la possibilité, pour une société, de se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe qu'elle forme avec ses filiales est subordonnée à la seule condition que cette société détienne, dans les autres sociétés du groupe, une participation représentant au moins 95 % des parts sociales. En ce qu'il exige, pour qu'une société puisse être comprise dans le périmètre d'intégration fiscale, que la société tête de groupe détienne en outre, directement ou indirectement, en pleine propriété, 95% au moins des droits à dividendes et 95% au moins des droits de vote attachés aux titres émis par cette société, l'article 46 quater-O ZF de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, méconnaît la portée de la disposition législative dont il a pour objet de préciser les modalités d'application et est ainsi entaché d'incompétence.
4. Il résulte de ce qui vient d'être énoncé, issu d'une décision du Conseil d'Etat du 26 janvier 2021 n°439582, Selas Biomnis, et des motifs de cette décision, qu'en l'espèce, l'administration fiscale ne pouvait légalement faire application des dispositions de l'article 46 quater-0 ZF de l'annexe III au code général des impôts et refuser d'accorder à la Selas Biomnis, pour l'exercice 2013, le bénéfice de l'option qu'elle sollicitait pour le régime de l'intégration fiscale au seul motif que, si elle détenait 99,99 % des parts sociales de ses deux filiales, dont la société Eurofins-CBM69, représentant le même pourcentage dans les droits financiers, cette participation n'ouvrait droit qu'à 49,90 % des droits de vote. Par suite, c'est à tort que l'administration a assujetti la société Centre de Biologie Médicale, devenue la société Eurofins-CBM69, à une cotisation primitive d'impôt sur les sociétés pour l'exercice 2013.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a déchargé la société Centre de Biologie Médicale, devenue la société Eurofins-CBM69, de la cotisation primitive d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice 2013 et a mis à la charge de l'Etat au profit de cette société la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Eurofins-CBM69 d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la société Eurofins-CBM69 la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société Eurofins-CBM69.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée du contrôle fiscal Centre-Est.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juin 2021.
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N° 19LY00485