La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/06/2021 | FRANCE | N°20LY02858

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ere chambre - formation a 3, 02 juin 2021, 20LY02858


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 avril 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1903963 du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enr

egistrée le 30 septembre 2020, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 avril 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1903963 du 17 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2020, Mme E..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 mars 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 19 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler jusqu'au réexamen de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour a été pris au terme d'une procédure irrégulière en ce qu'il se fonde sur un avis du collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) rendu le 12 décembre 2018 selon les règles applicables à compter du 1er janvier 2017 alors que sa demande de titre de séjour date du 17 novembre 2016 et qu'un avis positif du médecin de l'agence régionale de santé a été rendu le 8 février 2017 ;

- elle a été illégalement placée sous récépissés successivement renouvelés jusqu'au 19 avril 2019 ce qui constitue un détournement de procédure ;

- en fondant sa décision relative à une demande du 17 novembre 2016 sur un avis rendu par le collège de médecins de l'OFII, alors incompétent, le préfet du Rhône a commis une erreur de droit ;

- le refus de titre de séjour ne procède pas d'un examen particulier de sa situation individuelle ;

- cette décision méconnaît les dispositions le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une décision du 19 août 2020, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme E....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... C..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me A... pour Mme E... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... relève appel du jugement du 17 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 19 avril 2019 refusant de l'admettre au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme E... a déposé, le 17 novembre 2016, une demande de titre de séjour au regard de son état de santé. En application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, un avis a été émis par le médecin de l'agence régionale de santé le 8 février 2017. Il incombait au préfet du Rhône de prendre sa décision au vu de cet avis, concluant à l'impossibilité pour la requérante de bénéficier en Arménie d'un traitement approprié à son état de santé, et qu'il n'était pas tenu de suivre. Comme le soutient la requérante, le préfet du Rhône l'a maintenue abusivement sous récépissés de demande de titre de séjour pendant vingt-six mois à compter de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, la privant durant cette période des garanties attachées à l'examen de sa demande de titre de séjour dans un délai raisonnable, dont la délivrance est de plein droit pour l'étranger qui en remplit les conditions. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de Mme E... aurait évolué, ni que la requérante aurait présenté une nouvelle demande de titre de séjour postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 13 de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016. Dans les circonstances de l'espèce, et alors que le préfet du Rhône, qui n'a pas défendu dans l'instance, ne fait état d'aucun élément justifiant qu'il eût été nécessaire de saisir le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour statuer sur la demande de Mme E..., et qui a fondé sa décision sur l'avis défavorable de ce collège émis le 12 décembre 2018, a entaché sa décision d'un détournement de procédure.

3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme E... et que celle-ci est fondée à demander l'annulation de ce jugement ainsi que celle de l'arrêté du 19 avril 2019 du préfet du Rhône.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".

5. Compte tenu du motif de l'annulation prononcée ci-dessus, le présent arrêt n'implique pas, à la date à laquelle la cour statue, la délivrance d'un titre de séjour à Mme E..., mais seulement que le préfet du Rhône réexamine sa demande dans un délai de deux mois, après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés au litige :

6. Mme E... n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée. Son avocat n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à sa cliente si cette dernière n'avait pas bénéficié d'une aide juridictionnelle totale sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée. Dans ces conditions, les conclusions de Mme E... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 mars 2020 et l'arrêté du préfet du Rhône du 19 avril 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme E... dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de Mme E... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le surplus de ses conclusions sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 27 avril 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme D... C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2021.

2

N° 20LY02858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20LY02858
Date de la décision : 02/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Benedicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BARIOZ

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-02;20ly02858 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award