La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2021 | FRANCE | N°20LY03189

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 06 mai 2021, 20LY03189


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un

mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2002424 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2002424 du 7 juillet 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées du préfet de l'Isère du 12 septembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 6 novembre 1996, qui déclare être entrée en France le 10 mars 2018, a sollicité le 8 janvier 2019 son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Elle relève appel du jugement du 7 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2019 du préfet de l'Isère refusant de l'admettre au séjour, l'obligeant à quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de l'éloignement.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. Mme C... fait valoir qu'elle est entrée en France en mars 2018 avec son fils, né le 7 octobre 2017, que son époux, de même nationalité, les y a rejoints en octobre 2018, que le couple a eu un second enfant, né le 7 août 2019, et qu'elle dispose d'attaches familiales sur le territoire français, où vivent son oncle et sa tante. Toutefois, Mme C... n'est pas dépourvue d'attaches familiales en Algérie, où résident notamment ses parents ainsi que son frère et sa soeur, et où elle a elle-même vécu jusqu'à l'âge de vingt-et-un ans. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante entretiendrait des liens étroits avec les membres de sa famille vivant en France, dont elle a vécu séparée jusqu'en 2018, ni qu'elle y aurait noué des liens privés d'une particulière intensité, ainsi qu'elle l'allègue sans en justifier. Sa fréquentation assidue à des cours de français ne permet pas davantage de lui conférer un droit au séjour. En outre, aucun obstacle ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale en Algérie. Au vu de l'ensemble de ces circonstances, notamment de la durée et des conditions de son séjour, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts qu'elle poursuit. Dès lors, cette décision n'a méconnu ni les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

4. En l'absence de toute argumentation supplémentaire, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés au point 3, les moyens tirés de la méconnaissance, par l'obligation de quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de Mme C..., doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

5. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

6. Si Mme C... soutient qu'elle a été victime d'un mariage forcé, qui l'a contrainte à quitter l'Algérie, et qu'un retour dans son pays d'origine l'expose, de ce fait, à des menaces et des violences de la part de sa famille et de celle de son époux, il ressort toutefois des pièces versées par la requérante elle-même qu'elle vit en France avec son époux, où celui-ci l'a rejointe, et qu'ils ont eu un second enfant. Dans ces conditions, Mme C..., par une argumentation non circonstanciée, n'établit pas que le mariage qu'elle a contracté aurait présenté le caractère d'un mariage forcé. Elle n'apporte pas davantage d'élément à l'appui de ses allégations relatives aux risques de violences exercées contre elle par sa famille et sa belle-famille à raison de sa fuite pour échapper à ce prétendu mariage forcé. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2021.

2

N° 20LY03189


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03189
Date de la décision : 06/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-05-06;20ly03189 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award