Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler :
- la décision du 27 novembre 2017 par laquelle l'inspectrice du travail de la Côte d'Or a autorisé la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Côte d'Or à procéder à la rupture conventionnelle de son contrat de travail ;
- la décision implicite du ministre du travail de rejet de son recours contre la décision de l'inspectrice du travail du 27 novembre 2017.
Par un jugement n° 1801909 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 2 avril 2019, et des mémoires enregistrés le 13 décembre 2019, le 13 octobre 2020 et le 3 novembre 2020, présentés pour M. A..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1801909 du 29 janvier 2019 du tribunal administratif de Dijon ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'inspectrice du travail ne pouvait autoriser la rupture conventionnelle dès lors qu'il n'était pas justifié qu'il allait effectivement percevoir le montant de l'indemnité conventionnelle qui devait lui revenir dès lors qu'en vertu de l'avenant du 18 mai 2009 à l'accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail il doit être procédé au versement de l'indemnité conventionnelle de licenciement, si elle est plus favorable que l'indemnité légale, et que l'indemnité conventionnelle prévue par la convention collective nationale du travail du 8 février 1957, dont la caisse primaire a fait une application volontaire, est plus favorable que l'indemnité légale ;
- il n'a pas pu donner un consentement valable à la procédure de rupture conventionnelle, eu égard, d'une part, à l'existence d'un litige prud'homal préalable à la conclusion de la convention de rupture, pendant devant la cour d'appel de Reims, pour des faits, notamment, de discrimination syndicale, harcèlement moral, atteinte au contrat de travail et non-respect des accords protecteurs des salariés protégés et, d'autre part, à l'engagement d'une procédure de licenciement pour motif disciplinaire initiée par son employeur, au terme de laquelle l'inspectrice du travail avait refusé l'autorisation de le licencier ; sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail était sans lien avec la constitution d'une société dont il avait la qualité de président, sans rémunération.
Par des mémoires enregistrés le 12 novembre 2019 et le 29 octobre 2020, présentés pour la CPAM de la Côte d'Or, elle conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 13 décembre 2019, le ministre du travail s'associe aux conclusions de la CPAM de la Côte d'Or en soutenant que les moyens du requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Seillet, président assesseur ;
- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... a été embauché, le 10 septembre 2007, en qualité de technicien contentieux, par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Côte d'Or. Il était investi notamment du mandat de conseiller prud'homme. Le 30 octobre 2017, M. A... et son employeur sont convenus de la rupture de ce contrat de travail. Le 27 novembre 2017, l'inspectrice du travail de la Côte d'Or a autorisé cette rupture conventionnelle. Le ministre du travail a implicitement rejeté le recours de l'intéressé contre cette décision. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions de l'inspectrice du travail du 27 novembre 2017 et du ministre du 20 mai 2018.
2. Aux termes de l'article L. 1237-11 du code du travail : " L'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. Elle résulte d'une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties ". Aux termes de l'article L. 1237-13 du même code : " La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-9. Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation. A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie ".
3. En outre, aux termes de l'article L. 1237-15 du même code, relatif aux ruptures conventionnelles négociées entre les entreprises et les salariés protégés : " Les salariés bénéficiant d'une protection (...) peuvent bénéficier des dispositions de la présente section. (...) la rupture conventionnelle est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail (...) Dans ce cas, et par dérogation aux dispositions de l'article L. 1237-13, la rupture du contrat de travail ne peut intervenir que le lendemain du jour de l'autorisation (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que les salariés investis de fonctions représentatives peuvent, le cas échéant, convenir en commun avec leur employeur de la rupture du contrat de travail qui les lie et soumettre la rupture conventionnelle ainsi obtenue à l'autorisation de l'inspecteur du travail. Il appartient à l'inspecteur du travail, saisi d'une telle demande d'autorisation, de vérifier si la procédure et les garanties destinées à préserver la liberté du consentement du salarié ont été respectées.
5. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, et sans que M. A... ne le conteste, l'avenant n° 4 du 18 mai 2009 à 1'accord national interprofessionnel sur la modernisation du marché du travail du 11 janvier 2008, étendu par arrêté du 26 novembre 2009, en vertu duquel il doit être procédé, en cas de rupture conventionnelle du contrat de travail, au versement de l'indemnité conventionnelle de licenciement si elle est plus favorable que l'indemnité légale, n'a été étendu qu'à l'égard des entreprises dont l'activité relève du champ d'application d'une convention collective de branche signée par une fédération patronale adhérente du Mouvement des entreprises de France, de l'Union professionnelle artisanale ou de la Confédération des petites et moyennes entreprises, alors que les caisses primaires d'assurance maladie ne relèvent pas d'une activité représentée par une fédération patronale, et n'entrent, dès lors, pas dans le champ d'application de cet avenant. Dès lors, seules étaient applicables en l'espèce les dispositions précitées de l'article L. 1237-13 du code du travail, dont il résulte que le montant de l'indemnité de rupture conventionnelle ne peut être inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement et M. A..., qui n'a pas été licencié, ne peut utilement se prévaloir de la circonstance, à la supposer établie, que la convention collective dont son employeur aurait fait application prévoit, en cas de licenciement, le versement d'une indemnité d'un montant plus élevé que celui de l'indemnité légale. Par suite, M. A..., qui ne prétend pas avoir reçu une indemnité d'un montant inférieur à celui de l'indemnité légale de licenciement, ne peut soutenir que l'inspectrice du travail n'aurait pas procédé, comme il lui appartenait de le faire, à la vérification de ce qu'il devait effectivement percevoir le montant de l'indemnité de rupture qui lui était due.
6. En second lieu, l'existence d'un différend entre les parties, lors de la conclusion d'une rupture conventionnelle, n'affecte pas, par elle-même, la validité de cette convention, non plus que l'existence de faits de harcèlement, sauf à ce qu'il soit établi que le harcèlement moral a altéré le consentement du salarié. Enfin, la circonstance qu'une transaction de rupture conventionnelle soit intervenue à l'issue d'une procédure disciplinaire ne suffit pas à remettre en cause la validité de cette rupture sous réserve qu'il ne soit pas porté atteinte à la liberté du consentement du salarié.
7. Il ressort des pièces du dossier qu'antérieurement à l'accord de rupture conventionnelle conclu avec son employeur, M. A... avait saisi le conseil de prud'hommes de Troyes d'une demande à des fins d'indemnisation pour des faits de discrimination syndicale et harcèlement moral, rejetée par un jugement du 15 septembre 2016 dont il avait relevé appel devant la cour d'appel de Reims, devant laquelle il avait également sollicité, le 20 septembre 2017, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur. Cette circonstance, pas davantage que celle que, par un arrêt du 30 septembre 2020 ladite cour a condamné la CPAM de la Côte d'Or à verser des indemnités au titre d'une discrimination syndicale et d'un harcèlement moral, ne suffisent, toutefois, à établir que l'accord de rupture conventionnelle signé le 30 octobre 2017 est entaché d'un vice du consentement, dès lors notamment qu'il ressort également des pièces du dossier que la demande de rupture a été présentée par M. A... lui-même, le 5 octobre 2017 et qu'il a maintenu sa demande au terme du délai de rétractation de quinze jours fixé par les dispositions de l'article L. 1237-13 du code du travail.
8. Il ressort également des pièces du dossier que les parties ont discuté de la possibilité de conclure un protocole transactionnel portant sur des indemnités qui seraient versées à M. A.... Si l'existence de pourparlers sur ce point est établie, il ne ressort pas des pièces du dossier que les parties aient entendu conditionner la validité de l'accord de rupture conventionnelle du contrat de travail à la conclusion d'une telle transaction, qui n'est d'ailleurs pas intervenue, et il n'en ressort pas davantage que le consentement de M. A... n'aurait pas été donné librement.
9. Enfin, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en raison de la procédure engagée par son employeur afin d'obtenir l'autorisation de procéder à son licenciement pour un motif disciplinaire, qui a été refusée par une décision de l'inspectrice du travail de la Côte d'Or du 8 septembre 2017 au motif de la prescription des faits à la date d'engagement de la procédure disciplinaire, M. A... n'aurait pas donné librement son accord à la rupture conventionnelle de son contrat de travail.
10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la CPAM de la Côte d'Or tendant à la mise à la charge de M. A... d'une somme au titre des frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Or et au ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2021.
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N° 19LY01228