La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/2021 | FRANCE | N°19LY02639

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 25 mars 2021, 19LY02639


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Chevry a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de condamner M. F..., M. K... et la société Bureau Veritas à lui payer la somme totale de 50 853,92 euros en réparation des préjudices de toute nature qu'elle a subis ;

- de mettre à la charge de M. F..., de M. K... et de la société Bureau Veritas les dépens de l'instance et la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1707521 du 16 mai 2019, le tribu

nal administratif de Lyon a rejeté sa demande, mis à sa charge les frais de l'expertise et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Chevry a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de condamner M. F..., M. K... et la société Bureau Veritas à lui payer la somme totale de 50 853,92 euros en réparation des préjudices de toute nature qu'elle a subis ;

- de mettre à la charge de M. F..., de M. K... et de la société Bureau Veritas les dépens de l'instance et la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1707521 du 16 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande, mis à sa charge les frais de l'expertise et la somme de 1 400 euros au profit de la société Veritas en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2019, et un mémoire enregistré le 18 mai 2020, la commune de Chevry, représentée par Me I... de la Selarl Serfaty I... Camacho et Cordier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1707521 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de condamner solidairement M. C... F..., la société Bureau Véritas et M. B... K..., ou qui mieux d'entre eux le devra, à lui payer la somme de 39 466 euros TTC au titre des travaux de réfection de la station de relevage (24 970 euros TTC) et de la VMC (14 496 euros) ainsi que la somme de 11 387,92 euros au titre des préjudices qu'elle a subis ;

3°) de condamner M. C... F..., la société Bureau Véritas et M. B... K..., ou qui mieux d'entre eux le devra à lui payer les dépens, en particulier les frais d'expertise judiciaire d'un montant de 7 007,10 euros et le constat du 3 octobre de Me J..., huissier de justice, d'un montant de 350 euros TTC ;

4°) de mettre à la charge de M. C... F... la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de juger qu'elle a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 59 191,02 euros à compter du 10 octobre 2017, date d'enregistrement de sa demande, et à la capitalisation des intérêts à compter du 10 octobre 2018.

Elle soutient dans le dernier état de ses écritures que :

- la responsabilité décennale de M. F... est engagée concernant les désordres relatifs au refoulement d'eaux usées en raison du défaut de conception concernant la station de relevage rendant l'ouvrage impropre à sa destination, qui n'était pas un vice apparent mais un vice caché ayant été révélé lors des opérations d'expertise, et de sa carence dans l'obligation de conseil et de surveillance et sa mission de direction de l'exécution des travaux et de réception des travaux ;

- la responsabilité décennale de M. F... est engagée concernant les désordres relatifs à la VMC de la cantine dès lors que ceux-ci se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences après la réception et ont perduré malgré les interventions de l'entreprise K... Salah, et que l'architecte a méconnu son obligation de surveillance et de conseil ;

- la responsabilité décennale de M. F... est engagée concernant les désordres relatifs à la chaufferie dès lors que les désordres se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences après la réception, en étant relevé le 18 novembre 2013 par le rapport Fluitec, et que l'architecte a été dans l'incapacité d'obtenir de l'entreprise K... Salah l'exécution de prescriptions tendant à corriger ses malfaçons, n'a pas identifié les désordres, et a été défaillant dans son obligation de conseil au moment de la réception, et son devoir de conseil et de surveillance en matière de sécurité ;

- la responsabilité décennale de M. F... est engagée concernant les désordres relatifs au four de réchauffe en étant défaillant dans ses missions de surveillance des travaux et de conseil lors des opérations de réception ;

- la responsabilité décennale de la société Bureau Véritas est engagée pour les désordres relatifs aux installations de VMC dès lors qu'il n'a pas formulé d'observations sur les non-conformités et malfaçons mentionnées mais a également validé la conformité des installations de la VMC dans son rapport final alors qu'elles étaient non conformes à la règlementation sanitaire, et que ces désordres se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences après la réception, et sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;

- la responsabilité décennale de la société Bureau Véritas est engagée concernant les désordres relatifs à la chaufferie dès lors qu'elle n'a pas formulé d'observations sur les non-conformités et malfaçons mentionnées mais a également validé la conformité des installations de la chaufferie dans son rapport final, alors qu'était en cause un élément de sécurité lié à un établissement recevant du public, et que ces désordres n'étaient pas apparents et se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences après la réception, et sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;

- son préjudice est indéniable et trouve sa principale origine dans la défaillance de l'architecte dans sa mission de surveillance des travaux et pour avoir gravement manqué à son devoir de conseil lors des opérations de réception ;

- elle est fondée à solliciter la somme de 30 486 euros TTC (25 405 euros HT) au titre de l'installation d'une station propre de relevage afin de séparer les deux réseaux puisque la station existante était sous-dimensionnée pour recevoir à la fois les eaux usées de huit logements et ceux de la cantine ;

- elle est fondée à solliciter la somme de 14 996 euros au titre de la réfection de la VMC incluant la dépose des installations existantes ;

- elle est fondée à solliciter la somme de 11 387,92 euros en réparation de ses préjudices comprenant une perte d'exploitation de la cantine liée au non fonctionnement du four (surcoût de 80 repas froid : 302,40 euros et heures supplémentaires payées au personnel : 94,22 euros), l'obligation d'achat d'un nouveau four (achat : 5 229,60 euros et installation : 824,40 euros + 236,40 euros), la recherche de défaut de chauffage (575,80 euros) et l'expertise Fluitec (3 360 euros) ;

- les frais d'expertise doivent être mis à la charge de M. F... eu égard aux graves fautes qu'il a commises ;

- sa condamnation à verser la somme de 1 400 euros au profit de la société Veritas en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative n'est ni motivée ni justifiée, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, alors que selon le rapport d'expertise, le bureau Véritas n'a pas formulé d'observations sur les non-conformités et malfaçons ;

- les dépens, en particulier les frais d'expertise d'un montant de 7 007,10 euros TTC, seront mis à la charge de M. F... au regard de la violation réitérée de ses obligations de surveillance et de contrôle.

Par des mémoires enregistrés les 13 septembre 2019 et 15 septembre 2020, M. C... F..., architecte, représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter les demandes de la commune de Chevry dirigées à son encontre et de confirmer le jugement contesté, le cas échéant par substitution de motifs ;

2) à titre subsidiaire, de rejeter la demande de la commune de Chevry au titre des frais relatifs aux travaux sur le réseau d'eaux usées, de limiter le montant de l'indemnisation mise à sa charge concernant les désordres de refoulement d'eaux usées aux sommes de 950 euros HT pour la vérification de l'installation et de 765,10 euros TTC pour les préjudices subis (surcoût entretien) et de rejeter le surplus des demandes ; à tout le moins, de limiter l'indemnisation au titre des travaux de reprise du réseaux de refoulement d'eaux usées à 4 005,10 euros TTC, de limiter l'indemnisation au titre des travaux de reprises de la VMC à 5 568 euros TTC, et de rejeter le surplus des demandes ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner in solidum M. K..., la société Cabinet Thermiques Fradet, la société Batir maîtrise d'oeuvre, et la société Bureau Véritas à le relever et garantir intégralement ou à proportion des imputabilités retenues par la cour, de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit de la commune de Chevry dont les frais irrépétibles et les frais d'expertise judiciaires ;

4°) à titre subsidiaire, de condamner in solidum M. K..., la société Cabinet Thermiques Fradet, la société Batir maîtrise d'oeuvre, et la société Bureau Véritas aux entiers dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les demandes de la commune fondées sur la responsabilité contractuelle de l'architecte sont irrecevables dès lors qu'elles reposent sur une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance, en l'occurrence la garantie décennale ;

- l'action de la commune à l'encontre de l'architecte est irrecevable dès lors que la commune a soldé ses honoraires et donc mis fin à la relation contractuelle les liant ;

- le désordre consistant dans le refoulement des eaux usées dans la cantine étant apparent à la réception, la garantie décennale n'est pas applicable ;

- il ne peut y avoir de devoir de conseil de l'architecte au titre de ses propres manquements ni de réserves pour des ouvrages non commandés, l'expert ayant critiqué l'architecte au titre de la conception pour ne pas avoir prévu ces dispositifs et non pour ne pas avoir vérifié que des ouvrages prévus à l'origine aux marchés étaient mis en oeuvre ;

- il n'existait pas de motif de réserves au lot de M. K... en lien avec l'incident de remontées d'eau usées du mois de juin ;

- les désordres concernant le réseaux d'eaux usées du bâtiment et le dimensionnement de la pompe de relevage ont pour origine les ouvrages établis sous la maîtrise d'ouvrage de Logidia et sous la maîtrise d'oeuvre du BET Fluides Fradet et non les travaux d'aménagement intérieur de la cantine pour lesquels il s'est vu confier une mission de maîtrise d'oeuvre, et ne lui sont donc pas imputables ;

- la responsabilité de l'entreprise de M. K... est engagée pour le défaut de raccordement électrique de l'alarme de la pompe de relevage et il est bien fondé à être relevé et garanti par l'intéressée sur le fondement de la responsabilité extra contractuelle ;

- les travaux de réalisation d'un nouveau réseau propre à la cantine ne répondent pas aux conclusions de l'expert judiciaire et ne correspondent pas à une stricte réparation des désordres, mais à une amélioration devant rester à la charge du maître d'ouvrage ; il en va de même de l'installation du dégrilleur et du bac à graisse ; la commune n'est donc pas fondée à solliciter la somme de 20 609 euros HT ;

- la commune ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute qui lui est imputable en lien avec cette demande ni du préjudice en lien ;

- les désordres de fonctionnement de la VMC ne peuvent relever de la garantie décennale dès lors que des réserves ont été émises à ce titre ;

- ces désordres résultent de malfaçons d'exécution imputables à l'entreprise titulaire du marché, M. K..., qui n'étaient pas décelables par la maîtrise d'oeuvre dans le cadre de sa mission ;

- la responsabilité de la commune de Chevry se pose alors qu'elle avait fait appel à un BET Fluides pour réceptionner les ouvrages, intervention tardive mais démontrant que le maître d'ouvrage n'était pas ignorant ;

- la reprise complète de la VMC n'est pas justifiée et la commune ne justifie pas du montant de ses demandes par la production de factures de travaux ou étude d'un BET Fluides ;

- à titre subsidiaire, il sera mis hors de cause, s'agissant de désordres non décelables dans le cadre de la mission de maîtrise d'oeuvre confiée ;

- le dysfonctionnement du four résultant d'une panne d'un élément interne relève de la seule responsabilité de M. K... et ne lui est donc pas imputable dès lors qu'il n'est redevable d'aucune garantie s'agissant du fonctionnement des éléments d'équipement de la cuisine, d'autant que les équipements de cuisine ont fait l'objet d'un avenant signé entre la commune de Chevry et Monsieur K... après réception, en dehors de la maîtrise d'oeuvre qui lui a été confiée ;

- en tout état de cause, la garantie de bon fonctionnement des éléments d'équipement ne concerne que les locateurs d'ouvrage et non la maîtrise d'oeuvre et la garantie décennale ne peut trouver application ;

- les demandes d'indemnisation concernant le four dirigées à son encontre devront donc être rejetées ;

- le désordre concernant la chaufferie est uniquement imputable à M. K... et toute demande à son encontre sera rejetée ;

- les honoraires de la société Fluitec comme ceux des huissiers dans le cadre des constats d'huissiers relèvent des frais engagés pour préparer sa défense et relèvent donc de l'article L. 761-1du code de justice administrative, et non d'un préjudice en lien avec l'application ou non de la garantie décennale ;

- M. K... sera condamné à le relever et garantir intégralement pour les désordres relatifs au four (achat du four, pertes d'exploitation de la cantine, etc..), les désordres relatifs au refoulement d'eau usées, ou à tout le moins pour ce refoulement dans une proportion de 90 % minimum et pour les désordres relatifs à la chaufferie ;

- la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction est également engagée pour les non conformités constatées, en particulier les non conformités réglementaires (sur la sortie des gaz proche du conduit de la VMC) et sera retenue à hauteur de 10 % minimum ; elle sera donc condamnée in solidum avec M. K... à le relever et garantir intégralement pour les désordres relatifs à la VMC et à tout le moins à hauteur de 90 % ;

- M. K... et la société Bureau Véritas Construction seront condamnés au titre des autres demandes, frais d'expertise Fluitec et frais d'expertise judiciaire compris ;

- il est en outre bien fondé à former un appel en garantie contre M. K..., qui a installé les pompes de relevage suivant marché avec Logidia, la société Fradet et contre la société Batir maîtrise d'oeuvre si par extraordinaire il était fait droit aux demandes de la commune de Chevry pour les demandes fondées sur un sous-dimensionnement du réseau d'eaux usées et de la pompe de relevage, sur le fondement de la responsabilité contractuelle ou sur le fondement de la responsabilité en fonction de l'opération de construction envisagée ;

- le montant des travaux de reprise et des autres préjudices subis du fait des désordres relatifs au refoulement des eaux usées sera limité aux sommes suivantes : la somme de 950 euros HT pour la " vérification de l'installation " la somme de 765,10 euros TTC pour le surcoût au titre des opérations d'entretien ;

- très subsidiairement, la somme allouée ne pourra excéder la somme de 4 005,10 euros TTC (2 750 euros HT + TVA à 20 % + 765,10 euros TTC pour le surcoût des opérations d'entretien).

- l'indemnisation pour la VMC ne saurait en tout état de cause excéder la somme retenue par l'expert judiciaire de 4 640 euros HT soit 5 568 Euros TTC ;

- il appartient toutefois au préalable que la commune de Chevry démontre qu'elle a soldé l'entreprise K... sans lui retenir les sommes réclamées dans le cadre de la présente procédure.

Par des mémoires enregistrés les 2 octobre 2019 et 2 juillet 2020, la société Bureau Véritas Construction, venant aux droits de la société Bureau Véritas, représentée par la Selarl GVB, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de confirmer le jugement contesté ;

2°) de la mettre hors de cause, de rejeter toute demande de condamnation in solidum ou solidaire à son égard et de rejeter l'appel en garantie formé à son encontre par M. F... ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Ferney-Voltaire la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

4°) de condamner la commune de Chevry aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la commune de Chevry ne précise aucun fondement à son appel subsidiaire à son encontre et n'apporte aucun élément d'imputabilité des divers désordres à l'intervention du contrôleur technique ;

- les désordres étaient soit apparents et non réservés soit avaient fait l'objet de réserves à la réception et ne peuvent donc engager la responsabilité décennale des constructeurs ;

- elle n'est concernée ni par la réparation des désordres affectant la station de relevage pour laquelle la commune sollicite la somme de 24 970 euros TTC ni par le non fonctionnement du four de réchauffe pour lequel la commune sollicite la réparation de préjudices complémentaires, et la commune ne saurait dès lors requérir sa condamnation à lui verser la somme de 24 970 euros ainsi que les préjudices correspondants ;

- la perte d'exploitation de la cantine liée au non fonctionnement du four ne saurait lui être imputée ;

- les désordres affectant la VMC ne pourraient relever que de la garantie de parfait achèvement puisqu'ils avaient fait l'objet de réserves à la réception et le contrôleur technique n'est pas soumis à cette garantie ;

- sa responsabilité décennale ne saurait être engagée au titre de sa mission d'assistance à l'ouverture d'un établissement recevant du public portant sur les aménagements intérieurs de la cantine scolaire dès lors que la non-conformité de la ventilation et la proximité entre la prise d'air frais et le rejet de gaz brûlés ne lui sont pas imputables puisque la prévention des aléas aux installations de la VMC et de la chaufferie n'entraient pas dans sa sphère d'intervention ;

- la commune ne saurait invoquer la responsabilité contractuelle pour la première fois devant la Cour ;

- elle n'a commis aucune faute dans l'exercice de sa mission à l'origine des désordres affectant la VMC et la chaufferie ;

- la commune ne justifie pas du montant qu'elle réclame au titre de la réfection totale de la VMC et qui ne saurait en tout cas aboutir à la mise en place d'éléments nouveaux de nature à entraîner une amélioration des caractéristiques initiales de l'ouvrage ;

- les préjudices revendiqués par la commune sont pour l'essentiel liés au non fonctionnement du four, qui ne saurait en aucun cas lui être imputé ;

- en tout état de cause, les dispositions de l'article 7.1 des conditions générales de service limite la responsabilité du vérificateur technique aux seuls dommages matériels directs, à l'exclusion de tout dommage indirect et/ou immatériel et en particulier de toute perte de chiffre d'affaires, de bénéfice, de profit d'exploitation et de frais supplémentaires et l'article 7.2 des conditions générales précise que "la responsabilité financière totale cumulée de Bureau Véritas n'excédera pas, pour la durée de l'accord, cinq fois le montant de la rémunération payée par le client en application de l'accord" ;

- la commune sera donc déboutée de sa demande de 11 387,92 euros au titre de ses préjudices en ce qu'elle est dirigée à son encontre ;

- la demande de condamnation in solidum et désormais solidaire présentée par la commune, nouvelle en cause d'appel, ne pourra qu'être rejetée, d'autant qu'il se trouve empêché de former des appels en garantie devant la cour à l'encontre de M. F... ou de l'entreprise ;

- en tout cas, compte tenu des caractéristiques et de l'étendue de la simple mission de vérification qui lui avait été confiée, la Cour ne pourra que limiter l'éventuelle quote-part de responsabilité qu'elle déciderait de mettre à sa charge, quote-part qui ne pourrait qu'être minime par rapport à celles imputables à l'entreprise et à l'architecte.

Par un mémoire enregistré le 1er octobre 2020, la société Cabinet Etudes Thermiques Fradet, représentée par la SCP Ducrot et Associés " DPA ", demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter les demandes formées à son encontre et de confirmer le jugement contesté ;

2°) à titre subsidiaire, de limiter le montant des condamnations prononcées à son encontre à la somme de 500 euros ;

3°) en tout état de cause, de condamner M. F... à lui payer les entiers dépens et la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- elle n'est susceptible d'être éventuellement concernée que par le désordre de refoulement des eaux usées dans la cantine, les trois autres désordres concernant la VMC de la cantine, la chaufferie et le four de réchauffe étant liés à l'aménagement de la cantine pour laquelle elle n'a eu aucune mission de maîtrise d'oeuvre, celle-ci étant uniquement assurée par M. F... ;

- la commune n'est pas recevable à engager la responsabilité décennale des locateurs d'ouvrage concernant le refoulement des eaux usées dans la cantine dès lors que ce désordre était apparent lors de la réception ;

- l'appel en garantie formé à son encontre par M. F... est donc infondé et le jugement contesté sera confirmé ;

- les désordres de refoulement des eaux usées dans la cantine ne lui sont pas imputables dès lors que la mise en oeuvre d'un bac séparateur de graisses relevait de la mission de maîtrise d'oeuvre de M. F... dans le cadre des travaux d'aménagement de la cuisine, n'étant pas intervenue dans le cadre de cet aménagement, et qu'elle a prévu au titre de sa mission la mise en oeuvre d'un dégrilleur ;

- à titre subsidiaire, la réalisation par la commune d'une station de relevage indépendante relève d'un élément nouveau non prévu dans les travaux d'origine et doit en conséquence rester à sa charge ;

- en conséquence, à supposer que les désordres de refoulement des eaux usées lui soient partiellement imputables, le montant des condamnations prononcées à son encontre sera limité à la somme de 500 euros correspondant à la pose d'un dégrilleur à l'entrée de la station de relevage, conformément aux préconisations de l'expert.

La clôture de l'instruction a été fixée au 8 octobre 2020 par une ordonnance du 21 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code civil ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le décret n°99-443 du 28 mai 1999 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. H... ;

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

- et les observations de Me E..., pour la société Bureau Véritas Construction et celles de Me G... pour la société Cabinet Etudes Thermiques Fradet.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement n° 1707521 du 16 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon auquel la désignation préalable s'un expert avait été demande, a rejeté la demande au fond de la commune de Chevry tendant à la condamnation, sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs, de M. F..., M. K... et de la société Bureau Veritas, à l'indemniser des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait des désordres affectant la cantine scolaire, après avoir constaté, lors de sa mise en service à la rentrée de septembre 2013, une température trop basse dans les locaux, une ventilation bruyante et des odeurs de gaz brûlés. La commune de Chevry relève appel de ce jugement.

Sur la responsabilité contractuelle de M. F..., architecte:

2. Pour soutenir que M. F... est responsable des désordres affectant la cantine scolaire, la communauté de Chevry s'est bornée devant le tribunal administratif de Lyon à invoquer sa responsabilité décennale. Dans sa requête d'appel, la commune se prévaut désormais de la responsabilité contractuelle du maître d'oeuvre pour manquement à ses obligations de surveillance des travaux et de conseil lors des opérations de réception. Cette dernière prétention, fondée sur une cause juridique distincte de celle uniquement soumise aux premiers juges, constitue une demande nouvelle qui, présentée pour la première fois en appel, n'est pas recevable, ainsi que le fait valoir notamment M. F....

Sur la responsabilité décennale des constructeurs:

Concernant le caractère décennal des désordres :

3. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Ces constructeurs sont responsables de plein droit sur le fondement de ces principes dès lors que les désordres en cause n'étaient ni apparents ni prévisibles à la réception de l'ouvrage.

4. Il résulte de l'instruction que les désordres liés au refoulement d'eaux usées étaient apparents à la réception, prononcée avec réserves le 8 octobre 2013, bien qu'ils se sont reproduits après la réception et que leurs causes, en particulier l'absence d'un dégrilleur et d'un bac séparateur des graisses dans le réseau d'évacuation des eaux usées de la cuisine ainsi que l'absence d'alarme sonore de dysfonctionnement en état de marche, ont été identifiées lors des opérations de réception. En outre, l'installation de VMC a été réservée à la réception et n'a donc pas été réceptionnée. Enfin, les désordres affectant la chaufferie, en particulier l'éloignement du rejet d'air vicié de la chaufferie en partie extérieure (à l'angle Ouest du bâtiment), qui ont été mentionnés lors d'un compte rendu de réunion de chantier du 24 septembre 2013, étaient également apparents, et ont fait l'objet aussi de réserves. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenus que ces désordres ne présentent pas un caractère décennal.

Concernant la responsabilité décennale de M. F... pour le four de réchauffe :

5. Il ne résulte pas de l'instruction que la panne du four de réchauffe intervenue le 19 septembre 2013, dont le caractère décennal n'est pas contesté, qui, selon le rapport d'expertise est due une défaillance matérielle imputable au fournisseur du four, puisse être reprochée à M. F..., architecte, chargé d'une mission complète de maîtrise d'oeuvre, et en particulier à un manquement à ses obligations de surveillance des travaux et de conseil lors des opérations de réception.

Sur les dépens :

6. Il y a lieu, comme les premiers juges, de laisser les frais et honoraires de M. A..., expert, liquidés et taxés à la somme de 7 007,10 euros, à la charge de la commune de Chevry.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Chevry n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les conclusions présentées à ce titre par la commune de Chevry, partie perdante, doivent être rejetées.

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par M. C... F..., la société Bureau Véritas Construction et la société Cabinet Etudes Thermiques Fradet.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Chevry et les conclusions présentées en appel au titre des frais du litige par M. C... F..., la société Bureau Véritas Construction et la société Cabinet Etudes Thermiques Fradet sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Chevry, à M. C... F..., à la société Bureau Véritas Construction, à la société Cabinet Etudes Thermiques Fradet, à la société Batir maîtrise d'oeuvre, et à M. B... K....

Délibéré après l'audience du 4 mars 2021, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme C..., président-assesseur,

M. H..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2021.

2

N° 19LY02639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02639
Date de la décision : 25/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : DPA DUCROT AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-03-25;19ly02639 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award