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25/02/2021 | FRANCE | N°18LY04561

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 25 février 2021, 18LY04561


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

D'une part, la SARL Pénélope a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard correspondants. D'autre part, l'administration fiscale a transmis d'office au tribunal administratif la réclamation de la SARL Pénélope tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie

au titre de l'exercice clos en 2015.

Par un jugement n° 16001864,1800919 du 16 octo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

D'une part, la SARL Pénélope a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard correspondants. D'autre part, l'administration fiscale a transmis d'office au tribunal administratif la réclamation de la SARL Pénélope tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015.

Par un jugement n° 16001864,1800919 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 décembre 2018 et le 5 juillet 2019, la SARL Pénélope, représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 octobre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des intérêts de retard correspondants ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL Pénélope soutient que :

- elle peut bénéficier du dispositif prévu à l'article 44 sexies du code général des impôts dès lors qu'un transfert de clientèle ne caractérise pas nécessairement la reprise d'une activité préexistante, en particulier lorsque la clientèle transférée était peu développée ;

- en tout état de cause, l'activité exercée auparavant par son associé unique M. B... était une activité salariée au sein de la société Lee Cooper, ce dernier n'ayant aucune clientèle propre et ni exploité cette activité de façon autonome ; il n'y a donc pas reprise d'une activité exploitée par une entreprise par une nouvelle entreprise ;

- elle n'a pu reprendre l'activité de la société Lee Cooper France puisque celle-ci existe toujours ;

- la cession du contrat d'agent commercial détenu par la société GBO ne peut être analysée comme une cession de clientèle, la clientèle appartenant au mandant, en l'espèce la société Fun Adventure, et non au mandataire, la société GBO ; en outre, l'activité n'était que faiblement développée.

Par un mémoire enregistré le 28 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que :

- du fait de la reprise immédiate de l'exploitation de la marque Lee Cooper par la nouvelle société Lee Cooper France, il n'y a pas eu de rupture des relations commerciales entre M. B... et ses anciens clients et l'activité de représentation de la marque Lee Cooper exercée par la société Pénélope est identique à celle qu'exerçait M. B... son associé unique jusqu'en juillet 2010 ; ce dernier exerce d'ailleurs seul cette activité ; le transfert de clientèle et de moyen de la SAS Lee Cooper France au profit de la SARL Pénélope est donc établi ;

- la reprise du fichier de clientèle du concédant implique nécessairement une reprise d'activité alors même que la société nouvelle développe par la suite sa propre clientèle.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., première conseillère,

- et les conclusions de Mme H..., rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Pénélope, créée le 1er décembre 2010, par M. A... B..., gérant et unique associé, pour exercer une activité d'agent commercial dans le secteur de l'habillement, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2012, 2013 et 2014, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause le régime d'exonération et d'abattement d'impôt sur les sociétés de l'article 44 sexies du code général des impôts sous le bénéfice duquel elle s'était placée au motif qu'elle avait été créée pour reprendre des activités préexistantes exercées auparavant, l'une, par son gérant en tant que voyageur-représentant-placier et, l'autre, par la société GBO. La SARL Pénélope a, en conséquence, été assujettie, au titre des trois exercices vérifiés, à l'impôt sur les sociétés ainsi qu'à des compléments d'impôt sur les sociétés, notifiés selon la procédure contradictoire. Elle a également été assujettie, au titre de l'exercice clos en 2005, à un complément d'impôt sur les sociétés résultant de la remise en cause par l'administration du régime de faveur appliqué au titre de cet exercice. La SARL Pénélope relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après les avoir jointes, a rejeté sa demande de décharge des impositions des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 et sa réclamation transmise d'office par l'administration portant sur le complément d'impôt sur les sociétés établi au titre de l'exercice clos en 2015.

2. Aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Les entreprises soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés, à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif, jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, le bénéfice des dispositions du présent article est également accordé aux entreprises qui exercent une activité professionnelle au sens du 1 de l'article 92, ainsi qu'aux contribuables visés au 5° du I de l'article 35 (...) / Le bénéfice du présent article est réservé aux entreprises qui se créent dans les zones et durant les périodes suivantes, à la condition que le siège social ainsi que l'ensemble de l'activité et des moyens d'exploitation soient implantés dans l'une de ces zones : / 1° A compter du 1er janvier 1995 et jusqu'au 31 décembre 2010, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A ou dans les zones de redynamisation urbaine définies au A du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (...). / III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I. / L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance (...) ".

3. D'une part, il résulte de l'instruction que M. B..., associé unique de la SARL Pénélope, a exercé la profession de voyageur-représentant-placier salarié de la SAS Lee Cooper entre 2001 et juillet 2010, date de la mise en liquidation judiciaire de cette dernière société. Une nouvelle société, la société Lee Cooper France, a repris l'activité de la SAS Lee Cooper et a conclu avec la SARL Pénélope, nouvellement créée, un contrat d'agent commercial le 26 avril 2010 consistant à représenter la marque auprès de commerces de détails. Si cette activité de représentation s'est exercée dans des conditions juridiques différentes de celles de l'activité salariée que M. B... déployait précédemment auprès de la SAS Lee Cooper, elle concernait toujours le placement d'articles de prêt à porter de la marque Lee Cooper uniquement auprès de commerces de détails et avec exclusivité de représentation de la marque. La SARL Pénélope a bénéficié par ailleurs des moyens de la SAS Lee Cooper France, qui assurait la livraison des marchandises et lui fournissait des échantillons. Sa rémunération consistait en un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé par la SAS Lee Cooper France par son intermédiaire. Ainsi, cette activité était identique à celle qui était exercée pour le compte de la SAS Lee Cooper par l'associé unique de la SARL Pénélope et était exercée auprès de la même clientèle. De telles circonstances caractérisent une restructuration d'activités préexistantes, exclue du bénéfice du régime d'exonération et d'abattement prévu au I de l'article 44 sexies précité du code général des impôts.

4. D'autre part, par acte de cession du 3 janvier 2011, la SARL Pénélope a racheté à la SARL GBO, pour un prix de 24 700 euros, le mandat d'agence commerciale consenti par la SARL Fun Adventure. Ce contrat stipule que la SARL Pénélope est subrogée dans tous les droits appartenant à la SARL GBO en qualité de titulaire du contrat d'agence commerciale pour les départements cédés par la SARL GBO et est tenue de toutes ses obligations, tant dans ses rapports avec la société Fun Adventure, que dans ceux existants avec la clientèle. Le contrat stipule également que la SARL GBO est tenue de mettre la SARL Pénélope parfaitement au courant de toutes les affaires en cours, de lui présenter les clients principaux et de lui remettre le fichier et les dossiers des clients. Si la société requérante fait valoir que l'activité d'agent commercial alors exercée par la SARL GBO était très peu développée et qu'elle a entièrement développé plusieurs secteurs, elle a toutefois, de fait, repris la clientèle figurant sur les fichiers remis en exécution de la convention précitée du 3 janvier 2011 en poursuivant des relations commerciales avec certains clients figurant sur ces documents. Il résulte ainsi de l'instruction que la SARL Pénélope a repris l'activité de représentation commerciale auparavant exercée par la SARL GBO et a bénéficié d'un transfert de la clientèle constituée par l'agent commercial de cette société. Ces circonstances caractérisent ainsi la reprise d'une activité préexistante, exclue du bénéfice du régime d'exonération et d'abattement prévu au I de l'article 44 sexies précité du code général des impôts.

5. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la société requérante ne pouvant bénéficier du régime de faveur prévu au I de l'article 44 sexies du code général des impôts au titre de ses exercices clos de 2012 à 2015, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause les exonérations et abattements d'impôt sur les sociétés qu'elle avait appliqués à ce titre.

6. Il résulte de ce qui précède que la SARL Pénélope n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande et sa réclamation transmise d'office. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Pénélope est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Pénélope et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme D... présidente-assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.

2

N° 18LY04561


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04561
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-04-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : SELARL CABINET CESIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-25;18ly04561 ?
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