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23/02/2021 | FRANCE | N°20LY01683

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 23 février 2021, 20LY01683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 24 juin 2019 par lequel la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1901856 du 23 janvier 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 juin 2020, M. C...

B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 janvier 2020 ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 24 juin 2019 par lequel la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1901856 du 23 janvier 2020, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 juin 2020, M. C... B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 janvier 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 24 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de deux jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

- le refus de titre de séjour méconnaît le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée des mêmes vices que le refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire enregistré le 9 juillet 2020, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.

Par décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 3 juin 2020, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Besse, président-assesseur ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant comorien né en 1975, est entré en France métropolitaine en mars 2015. Par arrêté du 24 juin 2019, la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 23 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Clermont Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; ".

3. Si M. B... soutient être le père de deux enfants français nés en 2014 et 2015, il ne produit aucun document permettant d'établir sa paternité à l'égard de ces enfants, ni d'ailleurs qu'il entretiendrait le moindre lien avec eux. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Allier a méconnu les dispositions citées au point précédent doit être écarté.

4. En deuxième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'a pas demandé la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B... fait état de la présence en France de six enfants. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 3, il n'établit pas être le père des deux enfants français nés en 2014 et 2015, avec lesquels il ne démontre pas entretenir le moindre lien. S'il fait valoir qu'il est le père de deux enfants nés en 2012 et 2014 qui vivent à Marseille avec leur mère, il n'établit pas entretenir avec ces derniers un lien affectif régulier, même s'il fait état de versements ponctuels d'argent à la mère de ses enfants ou d'appels téléphoniques. Il ressort en revanche des pièces du dossier que M. B... vit à Moulins avec ses deux derniers enfants, nés en septembre 2017 et octobre 2018, d'une relation avec une compatriote résidant régulièrement sur le territoire français, qu'il indique avoir rencontré en 2016. Toutefois, eu égard aux conditions et à la durée du séjour en France du requérant, qui n'y réside que depuis quatre années, au fait qu'il n'est pas fait état de circonstances s'opposant à ce que la cellule familiale puisse se reconstituer aux Comores, où il n'est pas dépourvu d'attaches familiales, sa mère ainsi que ses frères et soeurs y vivant, la décision de refus de séjour ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas les stipulations et dispositions citées au point précédent.

7. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

8. Compte tenu d'une part de la nature des relations entretenues par le requérant avec ses deux premiers enfants et, d'autre part, de la possibilité pour la cellule familiale de se reconstituer aux Comores, la décision de refus de séjour ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

9. Enfin, il résulte des dispositions des articles L. 3121 et R. 3122 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que lorsqu'il envisage de refuser une carte de séjour à un étranger qui remplit effectivement les conditions prévues, notamment à l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour sa délivrance et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il vient d'être dit, M. B... ne remplit pas les conditions de délivrance d'une carte de séjour au titre des dispositions du 6° ou du 7° de l'article L. 31311 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ces fondements.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, M. B... ne pouvant bénéficier de plein droit de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance de ces dispositions à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

11. En deuxième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir, pour demander l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14, qui ne prévoient pas la délivrance d'un titre de plein droit, et de ce que le préfet devait saisir la commission du titre de séjour.

12. Enfin, pour les motifs exposés aux points 6 et 8, les moyens tirés de ce que la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant doivent être écartés.

Sur la fixation du pays de destination :

13. M. B... étant de même nationalité que la mère des deux enfants avec lesquels il entretient des relations, la décision fixant le pays de destination n'est par elle-même pas susceptible d'entraîner la séparation du requérant de sa compagne et de ses enfants. Par suite, elle ne méconnait ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme G... F..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.

Le rapporteur,

Thierry Besse

La présidente,

Danièle A...

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY01683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01683
Date de la décision : 23/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : HABILES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-23;20ly01683 ?
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