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14/01/2021 | FRANCE | N°18LY03543

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 14 janvier 2021, 18LY03543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 17 septembre 2015 par laquelle le directeur général des Hospices civils de Lyon l'a mise à la retraite d'office pour invalidité, de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation de leur résistance abusive à la reclasser sur un emploi adapté à son état de santé, enfin, de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon les frais de l'instance.

Par un jugement n° 1600642

du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à sa demande.

Pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 17 septembre 2015 par laquelle le directeur général des Hospices civils de Lyon l'a mise à la retraite d'office pour invalidité, de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation de leur résistance abusive à la reclasser sur un emploi adapté à son état de santé, enfin, de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon les frais de l'instance.

Par un jugement n° 1600642 du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 septembre 2018, et un mémoire enregistré le 29 janvier 2019, les Hospices civils de Lyon, représentés par Me B... demandent à la cour :

- d'annuler ce jugement du 20 juillet 2018 ;

- de rejeter les conclusions de Mme A... en première instance dirigées contre la décision du 17 septembre 2015 ;

- de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les conclusions de Mme A..., par la voie de l'appel incident, tendant à leur condamnation pour résistance abusive, constituent une demande nouvelle en appel et sont par suite irrecevables ;

- le fonctionnaire dont l'état physique est altéré n'a de droit à reclassement que dans la mesure où il est apte à exercer les fonctions dans l'emploi de reclassement ;

- Mme A... a été déclarée inapte par le comité médical à exercer toute fonction même en reclassement ; cette inaptitude absolue a été retenue par l'expert, puis la commission de réforme et la CNRACL ; cette inaptitude n'est pas sérieusement contestée par l'intéressée qui ne fait valoir que des motifs familiaux et financiers à l'appui de sa demande de reprise ;

- elle n'a présenté aucune demande de reclassement avant l'engagement de la procédure de mise à la retraite pour invalidité ;

- elle ne peut infirmer les avis successifs d'inaptitude par la production d'un certificat de son médecin généraliste ni en demandant à être consultée pour une reprise de travail par le médecin du travail ;

- c'est à tort que le tribunal n'a retenu que la tendinopathie de Mme A... alors que l'inaptitude de Mme A... résulte d'un syndrome anxio-dépressif sévère.

Par un mémoire enregistré le 20 novembre 2018, Mme C... A..., représentée par Me D..., demande à la cour de rejeter la requête, de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser une somme de 6 000 euros au titre de résistance abusive et de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure de mise à la retraite d'office aurait dû être interrompue avec l'avis du médecin du travail du 13 mai 2015 la déclarant apte à exercer certaines fonctions ;

- elle est apte à exercer une activité professionnelle ;

- les Hospices civils de Lyon n'ont pas satisfait à leur obligation de recherche de reclassement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;

- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;

- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Adjointe administrative de service hospitalier titulaire depuis 2002 aux Hospices civils de Lyon, Mme C... A..., souffrant d'un syndrome anxio-dépressif, a été affectée en 2009 sur un poste de brancardier. Du 6 octobre 2011 au 27 septembre 2012, hors une semaine en janvier 2012, vingt jours en février 2012 et du 4 mars au 28 juillet 2012, elle a été placée en congé de maladie ordinaire, interrompu du 28 septembre au 28 décembre 2012 par un mi-temps thérapeutique, et repris jusqu'au 22 décembre 2013 pour être suivi par une mise en disponibilité d'office pour raison de santé jusqu'au 30 avril 2015. Sur avis du comité médical du 6 novembre 2014, les Hospices civils de Lyon ont entamé une procédure de mise à la retraite pour invalidité, qui, après avis du médecin-expert de l'administration et de la commission départementale de réforme, lesquels ont conclu à l'inaptitude définitive de l'intéressée à l'exercice de toute fonction, a abouti à son admission à la retraite pour invalidité à compter du 1er mai 2015, sur avis favorable de la CNRACL, par une décision du 17 septembre 2015. Les Hospices civils de Lyon demandent l'annulation du jugement du 20 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.

Sur la fin de non-recevoir opposée par les Hospices civils de Lyon aux conclusions indemnitaires de Mme A... :

2. Par sa demande en première instance, qui n'avait pas été précédée d'une demande aux Hospices civils de Lyon tendant à l'octroi d'une indemnité ni régularisée avant la lecture du jugement attaqué par le dépôt d'une telle demande, Mme A... avait saisi le tribunal administratif de conclusions tendant à la condamnation du défendeur à lui verser 3 000 euros en réparation d'une " résistance abusive à la reclasser ", que les premiers juges ont rejetée comme irrecevable faute de liaison du contentieux. Dès lors que Mme A... ne critique pas ce motif d'irrecevabilité retenu par les premiers juges et alors qu'il n'appartient pas à la cour de s'interroger d'office sur le bien-fondé de l'irrecevabilité opposée à l'intéressée par le tribunal administratif, doivent être rejetées les conclusions de Mme A..., présentées par la voie de l'appel incident, tendant à la condamnation des Hospices civils de Lyon à lui verser au même titre une somme dont le montant a été porté en appel à 6 000 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ".

4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un fonctionnaire est reconnu, par suite de l'altération de son état physique, inapte à l'exercice de ses fonctions, il incombe à l'administration de rechercher si le poste occupé par ce fonctionnaire peut être adapté à son état physique ou, à défaut, de lui proposer une affectation dans un autre emploi de son grade compatible avec son état de santé. Si le poste ne peut être adapté ou si l'agent ne peut être affecté dans un autre emploi de son grade, il incombe à l'administration de l'inviter à présenter une demande de reclassement dans un emploi d'un autre corps. Il n'en va autrement que si l'état de santé du fonctionnaire le rend totalement inapte à l'exercice de toute fonction. Toutefois, il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible à l'époque de la décision contestée.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été reconnue inapte à l'exercice de ses fonctions et à toutes fonctions successivement par le comité médical, par un avis du 6 novembre 2014, par le médecin de l'administration, par deux rapports des 3 septembre 2014 et 14 janvier 2015, et enfin par la commission de réforme le 9 avril 2015, tandis que la CNRACL a émis un avis favorable à sa mise à la retraite pour invalidité. Il ressort de l'avis du 9 avril 2015 que la commission de réforme s'est prononcée au titre, d'une part, d'une tendinopathie calcifiante de l'épaule gauche, apparue en 2011 et évaluée à un taux d'invalidité de 15 %, d'autre part, d'un syndrome anxio-dépressif chronique apparu en 1988 et évalué à un taux d'invalidité de 20 %. Néanmoins, par un certificat médical du 14 avril 2015, postérieur à l'avis de la commission de réforme devant laquelle Mme A... n'a pas comparu, son médecin généraliste n'a pas constaté d'autres contre-indications à la reprise d'une activité professionnelle que le brancardage et le port de charges supérieures à 5 kg. Le médecin du travail, consulté en visite de pré-reprise du travail par Mme A..., a confirmé le 13 mai 2015 par un courrier à l'administration cet avis d'aptitude en ajoutant une contre-indication aux gestes nécessitant de soulever le bras au-dessus des épaules, en relevant au surplus que la démarche de l'intéressée procédait d'une nécessité familiale et financière. Ces constatations médicales, dont relèvent, eu égard à la nature de la pathologie anxio-dépressive établie chez Mme A..., les mentions quant aux motivations de celle-ci, font ainsi état d'une évolution de l'état de santé de Mme A... par rapport aux éléments au vu desquels ont statué le comité médical, l'expert et la commission de réforme, qu'il revenait aux Hospices civils de Lyon, non liés par ces avis, de prendre en compte avant de décider, par la décision en litige, sa mise à la retraite d'office pour invalidité. Dans ces conditions particulières à l'espèce, eu égard aux prescriptions médicales connues par l'administration à cette date, il incombait aux Hospices civils de Lyon de mettre en oeuvre l'obligation d'offrir à Mme A... un poste de reclassement compatible avec ces prescriptions, en application des dispositions précitées au point 3, ou de justifier de l'absence de poste compatible avec son état de santé à cette même date. Il est constant que l'intéressée n'a pas été invitée à formuler une demande de reclassement, laquelle ne saurait être révélée par sa seule volonté de reprise d'activité manifestée par sa démarche auprès du médecin du travail, et qu'aucun poste ne lui a été proposé. Dès lors, les Hospices civils de Lyon ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision en litige du 17 septembre 2015. La requête des Hospices civils de Lyon ne peut dès lors qu'être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par les Hospices civils de Lyon au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 1 200 euros à verser à Mme A... au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des Hospices civils de Lyon est rejetée.

Article 2 : Les Hospices civils de Lyon verseront à Mme A... une somme de 1 200 euros en l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié aux Hospices civils de Lyon et à Mme C... A....

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2021.

N° 18LY03543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03543
Date de la décision : 14/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-03 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Mise à la retraite d'office.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SELARL JEAN-PIERRE et WALGENWITZ

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-01-14;18ly03543 ?
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