La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2020 | FRANCE | N°18LY04044

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 21 décembre 2020, 18LY04044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de La Monnerie-Le-Montel a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

à titre principal :

- de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la Mutuelle des architectes français (MAF), la SA Bureau Veritas, la SAS C... et la Mutuelle d'assurance des artisans de France (MAAF) à lui verser la somme de 103 364,77 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du dépôt de sa requête, et actualisée s

ur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir, en rép...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de La Monnerie-Le-Montel a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

à titre principal :

- de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la Mutuelle des architectes français (MAF), la SA Bureau Veritas, la SAS C... et la Mutuelle d'assurance des artisans de France (MAAF) à lui verser la somme de 103 364,77 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du dépôt de sa requête, et actualisée sur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison des désordres qui ont affecté le lot n° 5 " bardage " ;

- de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la MAF, la SA Bureau Veritas, la SA Salesse et la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) à lui verser la somme de 6 045,38 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du dépôt de sa requête, et actualisée sur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison des désordres qui ont affecté le lot n° 9 " plâtrerie-peinture-plafonds " ;

- de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie décennale, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la MAF, la SA Bureau Veritas, la SARL Chossière construction et la compagnie d'assurance Axa France Iard à lui verser la somme de 15 577,67 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du dépôt de sa requête, et actualisée sur la base de l'indice BT 01 le plus proche au jour de la décision à intervenir, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison des désordres qui ont affecté le lot n° 10 " carrelage-faïence " ;

- de condamner solidairement, sur le fondement de la garantie quasi-délictuelle, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la Maf, la SA Salesse, la SMABTP la SARL Chossière construction, la compagnie d'assurance Axa France Iard, la SAS C..., la MAAF, la SA Bureau Veritas et la société Arcelormittal à lui verser la somme de 196 968,20 euros en réparation de l'intégralité des préjudices immatériels qu'elle a subis ;

A titre subsidiaire :

- de prononcer, au titre des mêmes dommages, les mêmes condamnations des mêmes intervenants sur le fondement de leur responsabilité contractuelle ;

Dans tous les cas :

- de condamner solidairement l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la MAF, la SA Salesse, la SMABTP, la SARL Chossière construction, la compagnie d'assurance Axa France Iard, la SAS C..., la MAAF, le Bureau Veritas et la société Arcelormittal à lui verser la somme de 11 816 euros au titre des frais d'expertise ;

- de mettre une somme de 7 500 euros à la charge solidaire de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la Maf, de la SA Salesse, de la Smabtp de la SARL Chossière construction, de la compagnie d'assurance Axa France Iard, de la SAS C..., de la Maaf, du Bureau Veritas et de la société Arcelormittal au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1601247 du 20 septembre 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a :

- donné acte à la commune de La Monnerie-Le Montel de son désistement à l'encontre la SA Salesse et la Smabtp ;

- rejeté comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître les conclusions dirigées contre la Mutuelle des architectes français, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, la Compagnie Axa France Iard et la Mutuelle d'assurance des artisans de France ;

- condamné solidairement, au titre du lot n° 5, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la SA Bureau Veritas et la SAS C... sur le fondement de leur responsabilité décennale à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel une somme de 5 901,96 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2016 ;

- condamné in solidum au titre du lot n° 5, l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la SA Bureau Veritas et de la SAS C... sur le fondement de leur responsabilité contractuelle à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel une somme de 70 940,52 euros TTC, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2016 ;

- condamné in solidum au titre du lot n° 9, l'EURL d'architecture Raymond et la SA Bureau Veritas sur le fondement de leur responsabilité contractuelle à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel une somme de 1 209,08 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2016 ;

- condamné in solidum au titre du lot n°10 l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la SA Bureau Veritas et la SARL Chossière construction sur le fondement de leur responsabilité contractuelle à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel une somme de 15 577,67 euros TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2016 ;

- condamné in solidum l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, la SARL Chossière construction, la SAS C..., la SA Bureau Veritas et la société Arcelormittal sur le fondement de la responsabilité délictuelle à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel une somme de 121 035,08 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2016 ;

- rejeté comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître les conclusions d'appel en garantie dirigées par la Mutuelle des architectes français, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, la Compagnie Axa France Iard et la Mutuelle d'assurance des artisans de France contre les constructeurs ;

- mis à la charge solidaire de la SA Bureau Veritas, de l'EURL Alexandre Raymond, de la SAS C..., de la SARL Chossière construction et de la société Arcelormittal les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 11 816,02 euros ;

- rejeté les conclusions présentées par la Mutuelle des architectes français, la Mutuelle d'assurance des artisans de France, la Compagnie d'assurance Axa France Iard, l'EURL Alexandre Raymond, la SA Bureau Veritas, la SAS C... et la SARL Chossière construction, parties perdantes, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté les conclusions présentées par la SA Salesse et la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- condamné solidairement la SA Bureau Veritas, l'EURL Alexandre Raymond, la SAS C..., la SARL Chossière construction et la société Arcelormittal à verser une somme de 2 000 euros à la commune de La Monnerie-Le Montel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 14 novembre 2018 et des mémoires enregistrés les 31 octobre 2019 et 1er avril 2020, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société par actions simplifiées (SAS) Bureau Véritas Construction, venant aux droits de la SA Bureau Veritas, représenté par la Selarl GVB, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601247 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tous les chefs lui faisant grief ;

2°) de prononcer sa mise hors de cause ;

3°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il a prononcé une condamnation in solidum à son encontre, sans faire droit à ses recours dirigés contre les autres intervenants ;

4°) de répartir la condamnation entre les différents intervenants selon le degré de gravité de leurs fautes respectives, ou de condamner l'EURL Alexandre Raymond, la société C..., la société Chossière construction et la société Arcelormittal à la relever et garantir intégralement ou à la garantir de toute condamnation qui excèderait la part qui serait fixée comme sa charge qui, à défaut d'être nulle, ne saurait qu'être symbolique ;

5°) de rejeter l'appel en garantie de l'Eurl Alexandre Raymond et de la MAF ;

6°) de rejeter la demande de la commune tendant à l'indemnisation de la location du chapiteau ;

7°) de condamner la commune de La Monnerie-Le Montel, comme tout succombant, aux dépens ;

8°) de mettre à la charge de la commune de La Monnerie-Le Montel, comme tout succombant, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa responsabilité décennale concernant les chéneaux ne pouvait être engagée, en l'absence de de réception opposable des ouvrages en ce qui la concerne, dès lors que la réception suivant la résiliation des marchés des entreprises n'est opposable qu'à ces dernières ;

- chaque résiliation ayant été assortie d'une liste de réserves, les désordres relevaient de la garantie de parfait achèvement, qui ne pèse pas sur le contrôleur technique mais sur l'entrepreneur ;

- le contrôleur technique n'est pas un constructeur au sens de l'article 1792-1 du code civil et il n'est pas davantage mandataire du maître de l'ouvrage ou locateur d'ouvrage ;

- il est soumis à la garantie décennale dans les limites de sa mission ;

- elle n'a pas été en mesure d'accomplir sa mission en l'absence de communication des documents d'exécution, notamment concernant le dossier technique incomplet de la société C... ;

- le contrôleur technique se borne à émettre des avis au seul profit du maître d'ouvrage mais ne peut donner des conseils aux locateurs d'ouvrage ou préconiser des mesures ;

- les défauts des chéneaux proviennent de fautes d'exécution et donc d'un défaut de "contrôle du chantier" et le contrôleur technique n'est pas en charge des mises au point de détails de chantier qui relèvent, suivant les contrats, de la maîtrise d'oeuvre ou de l'entreprise ;

- le jugement contesté n'est pas motivé concernant sa condamnation au titre de la responsabilité contractuelle, pour les désordres affectant le bardage vertical, les oculis, les cloisons et les plafonds ainsi que les carrelages ;

- la commune ne démontre pas que le bardage vertical, les cloisons, les plafonds et les carrelages constituent des éléments d'équipement indissociablement liés aux ouvrages de fondation, d'ossature et de clos et de couvert entrant dans le cadre de sa mission L, alors que l'expert n'avait pas retenu sa responsabilité pour les désordres affectant ces éléments ;

- sa mission étant limitée aux éléments d'équipement indissociables des ouvrages de fondation, d'ossature et de clos et de couvert, sa responsabilité contractuelle ne pouvait être retenue pour les désordres relatifs au bardage vertical, aux oculis, aux cloisons, aux plafonds et au carrelage, qui constituent des éléments d'équipement dissociables ;

- le contrôle technique n'a un devoir de de conseil que dans les limites de ses missions ;

- en jugeant qu'elle "n'établissait pas la réalité des fautes" de ses co-intervenants qu'elle appelait en garantie, le tribunal n'a tenu aucun compte du fait que l'expert judiciaire avait clairement déterminé les quotes-parts de responsabilité imputables selon leurs manquements à chacun des intervenants concernés et avait même totalement exclu la responsabilité du contrôleur technique pour certains désordres ;

- la quote-part de responsabilité que le tribunal a mis en définitive à la charge du contrôleur technique doit donc être diminuée ;

- il ne peut en tout état de cause que réitérer l'appel en garantie qu'il avait formé en première instance, à l'encontre de l'EURL Alexandre Raymond, de la Société C..., de la Société Chossière construction, dont la responsabilité peut être retenue même si elle est en liquidation - et de la Société Arcelormittal ;

- cette garantie lui sera accordée in solidum pour tout ce qui excèderait la part qui pourrait être fixée en définitive comme la charge du contrôleur technique et ce, sur le fondement des dispositions de l'article 1240 du code civil ;

- seules les fautes respectives de ces entreprises, telles que caractérisées par l'Expert, ou un manquement dans leurs obligations de constructeur ont pu être la cause réelle et déterminante des désordres ;

- l'Eurl Alexandre Raymond et la MAF seront déboutés de leur appel en garantie ;

- la demande de la commune tendant à l'indemnisation de la location du chapiteau sera rejetée.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2019, la société Arcelormittal Construction France, représentée par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1601247 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tous les chefs lui faisant grief ;

2°) de rejeter toute demande à son encontre ;

3°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il a alloué une somme de 121 035,08 euros à la Commune La Monnerie le Montel, assortie d'intérêts ;

4°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il a prononcé une condamnation solidaire des parties sur tous les chefs de condamnation ;

5°) de rejeter les appels en garantie formés à son encontre par l'Eurl Raymond, la société Bureau Veritas, et l'entreprise C..., ou, à défaut, de les condamner à la garantir ;

6°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il a alloué une somme de 11 816,02 euros TTC au titre des frais d'expertise et 2 000 euros TTC au titre de l'article L. 761-1 du code de la Justice Administrative ;

7°) par la voie de l'appel incident, de juger que sa part de responsabilité ne saurait excéder 10 % du préjudice immatériel qui relève du lot toiture.

Elle fait valoir que :

- sa responsabilité délictuelle ne peut être engagée dès lors qu'elle ne connaissait pas les caractéristiques de la toiture, qui est en courbe et comporte des rayons inférieurs à 40 mètres, au moment de la commande en mars 2011 du produit dénommé Hacierco 3.333.39 T et que sa préconisation et donc le produit vendu est conforme aux plans qui lui ont été soumis comprenant des rayons de courbure de la toiture qui sont tous supérieurs à 40 mètres et permettaient le cintrage à la pose ; elle n'a donc pas commis de faute ;

- à titre subsidiaire, les sommes demandées pour les différents (huit) postes du préjudice immatériel ne sont pas établies et liées aux désordres et donc le jugement contesté qui a alloué une somme de 121 035,08 euros à la commune sera annulé ;

- le tribunal a retenu les postes " perte location salle des fêtes " et " ligne de trésorerie " sans répondre à ses moyens ;

- elle ne pouvait être condamnée solidairement avec les autres locateurs d'ouvrages sur un fondement quasi-délictuel dès lors qu'elle n'a pas les mêmes obligations que les sociétés Raymond, C..., Chossière et Bureau Véritas puisqu'elle avait pour seule obligation de livrer des panneaux conformes à la commande de la société C... et que le préjudice a été généré par l'ensemble des désordres des différents lots et qu'elle n'a commis aucune faute ;

- à titre subsidiaire, en cas de condamnation solidaire des parties, la part de responsabilité de chacun des parties devra être fixée selon les conclusions de l'expertise et sa part ne pourra excéder 10 % du préjudice eu égard aux conditions de son intervention ;

- aucune faute ne lui étant imputable, l'appel en garantie formé à son encontre par l'Eurl Raymond, son assureur la Mutuelle des architectes de France, Bureau Veritas, La MAAF, l'entreprise C..., AXA et la SMABTP sera rejeté ;

- il en sera de même si un manquement était retenu à son encontre dès lors que chacunes des parties précitées a commis un manquement et ont engagé leur responsabilité propre ;

- le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté l'ensemble de ces parties de leur appel en garantie ; à défaut, elle sera garantie par les sociétés Raymond, Chossière, Bureau Véritas Construction et C....

Par un mémoire en défense enregistré le 25 mars 2019, et mémoire rectificatif enregistré le 26 mars 2019, l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond, et son assureur, la Mutuelle des Architectes Français (MAF), représentées par la Selarl Codex Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1601247 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tous les chefs leur faisant grief ;

2°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il a alloué une somme de 121 035,08 euros à la Commune La Monnerie le Montel, assortie d'intérêts ;

3°) de condamner les sociétés Bureau Véritas, C..., Chossière Construction, Salesse, Arcelor Mittal, et leurs assureurs, à les relever et garantir intégralement ;

4°) de mettre à la charge de tout succombant la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- la responsabilité de la société Arcelormittal ne fait pas débat, eu égard aux conclusions de l'expertise, et dès lors qu'elle a validé le principe de pose de la couverture de la salle omnisport ;

- sa condamnation solidaire est fondée sur le fondement de l'article 1 792-4 du code civil ;

- la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction est engagée dès lors qu'elle a failli à son obligation de conseil ;

- l'architecte a produit nombre de compte-rendus de chantier qui attestent d'un contrôle d'une exécution conforme aux prévisions.

Par des mémoires enregistrés les 14 octobre 2019 et 7 février 2020, la commune de La Monnerie-Le Montel, représentées par la Selarl DMMJB Avocats, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement contesté en ce qu'il ne lui a pas alloué la somme de 9 120 euros TTC au titre de la location du chapiteau pour le salon coutelier au titre de l'année 2014 et en conséquence de condamner solidairement l'Eurl Alexandre Raymond, la MAF, la Sarl Chossière Construction, AXA France Iard, la Sarl C..., la MAAF, la société Bureau Véritas, et la société Arcelormittal à lui verser la somme de 9 120 euros TTC sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle ;

2°) de confirmer le jugement contesté pour le surplus ;

3°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la résiliation des marchés vaut réception de l'ouvrage à l'égard de tous les intervenants et non pas seulement à l'égard de l'entreprise dont le marché est résilié et donc y compris à l'égard de la société Bureau Véritas Construction dès lors que sa prestation a bien concouru à la réalisation de l'ouvrage ;

- c'est donc sans commettre d'erreur que le tribunal a considéré que la responsabilité décennale solidaire de la société Bureau Véritas Construction était engagée s'agissant des déformations des chéneaux, qui n'étaient pas visibles et n'ont fait l'objet d'aucune réserve à la réception, dès lors qu'elle a validé la modification proposée par l'entreprise C... et concouru à la survenance du désordre ;

- la société Bureau Véritas a failli à sa mission, qui ne portait pas que sur les éléments d'équipement indissociables mais sur tous les éléments d'équipement, tant s'agissant des désordres affectant les oculis, que le bardage vertical ou encore les carrelages et les cloisons, la vérification de la bonne mise en oeuvre du bardage et de son étanchéité relevant du contrôle au titre de la mission L ;

- la société Bureau Véritas Construction a failli à sa mission en validant, le 21 septembre 2010, les plans de Sylva Conseil sans qu'une seule question n'ait été posée sur le principe du cintrage à la pose des bacs, en demandant que le 9 mai 2011 les dossiers techniques à l'entreprise alors que les travaux de couverture et de bardage ont débuté le 18 avril 2011, et en validant les chéneaux alors qu'ils n'étaient pas adaptés aux chutes de neige et au poids qu'elles engendrent ;

- la société Bureau Véritas Construction ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation envers le maître de l'ouvrage ;

- c'est sans commettre d'erreur que le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la société Bureau Véritas Construction, au titre de sa mission L, dans la survenance des désordres affectant le bardage vertical, les oculis, les cloisons et les plafonds et les carrelages, qui sont des éléments indissociables de l'ouvrage, alors que l'expert a retenu sa responsabilité concernant le bardage vertical ;

- l'Eurl Alexandre Raymond a failli à sa mission de maître d'oeuvre en commettant, comme l'a relevé l'expert, des fautes contractuelles à l'origine des désordres ayant affecté les lots 5 (et non 7), 9 et 10 ;

- la société Arcelor Mittal engage sa responsabilité décennale sur le fondement de l'article 1792-4 du code civil dès lors que dès septembre 2010, elle a validé le principe du cintrage à la pose pour des rayons de courbure inférieurs à 40 mètres, dont elle a eu connaissance lors de la réunion du 9 septembre 2010, qu'il n'est pas établi que la demande issue des échanges de septembre 2010 n'a connu aucune suite, et que les plans envoyés par M. C... en mars 2011 correspondent à ceux établis par Sylva Conseil en septembre 2010, sans report du rayon de courbure de 26,481 m ;

- le jugement sera confirmé concernant le préjudice matériel pour lequel aucun des défendeurs ne remet en cause l'indemnisation allouée à la commune à ce titre ;

- il en va de même des frais d'expertise ;

- le jugement sera confirmé concernant l'indemnisation du préjudice immatériel sauf en ce qu'il a refusé de faire droit à sa demande de remboursement de location du chapiteau au titre de l'année 2014, dont elle produit la facture afférente d'un montant de 9 120 euros TTC, cette location étant en lien direct avec les préjudices qu'elle a subis concernant la salle omnisport.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 avril 2020, la Compagnie A xa France Iard, assureur de la société Chossière Constructions, représentée par Me E... de la Selarl Auverjuris, demande à la cour :

1°) de rejeter comme irrecevables les demandes présentées à l'encontre de la société Chossière Constructions eu égard à la radiation du RCS dont elle a fait l'objet ainsi qu'il résulte de l'annonce publiée au BODACC le 30 octobre 2018 ;

2°) à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour Administrative d'Appel de Lyon retiendrait sa compétence s'agissant de la garantie de la compagnie AXA FRANCE IARD, de rejeter tout demande de condamnation et/ou en garantie dirigée à son encontre en qualité d'assureur de la société Chossière Constructions ;

3°) de condamner la commune de La Monnerie-le-Montel ou toute autre partie succombante aux entiers dépens ;

4) de mettre à la charge de la commune de La Monnerie-le-Montel et le cas échéant toute autre partie succombante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a rejeté les conclusions dirigées à son encontre comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

- toute demande de condamnation et de garantie dirigée à son encontre en qualité d'assureur de la société Chossière Constructions ne pourra qu'être rejetée comme étant présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

- aucune demande de condamnation ne saurait être formulée à l'encontre de la société Chossière Construction, qui a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, puis d'une liquidation judiciaire, d'une clôture pour insuffisance d'actif, et d'une radiation du RCS, ladite société n'ayant plus d'existence légale ;

- à titre subsidiaire, aucune critique n'est formulée à l'encontre du jugement de première instance en ce qu'il a retenu que les désordres concernant le lot n° 10 ne relevaient pas de la garantie décennale des constructeurs, mais de leur responsabilité contractuelle de droit commun ; ainsi, sa garantie en qualité d'assureur responsabilité civile décennale ne saurait être mobilisée ;

- les désordres relevant de la responsabilité contractuelle ne relèvent pas de sa garantie ;

- sur le volet RC, elle ne saurait être tenue ni des travaux de réparation des désordres réservés du lot 10 ni des préjudices en résultant en application des clauses d'exclusion de l'article 2.18.17 en page 19 des conditions générales.

La clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2020 par une ordonnance du 28 juillet 2020.

La Mutuelle des Architectes Français et l'Eurl Alexandre Raymond ont produit un mémoire, enregistré le 26 novembre 2020, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Par lettres du 13 novembre 2020, du 19 novembre 2020, et du 23 novembre 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé les moyens relevés d'office suivants :

- incompétence du juge administratif pour connaître des conclusions d'appel en garantie présentées par l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond contre les assureurs des sociétés Bureau Véritas, C..., Chossière Construction, Salesse, Arcelor Mittal ;

- incompétence du juge administratif pour connaître de la demande de la commune de La Monnerie-Le Montel contre les assureurs MAF, AXA France Iard, et la MAAF, qui relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

- irrecevabilité de l'appel en garantie formé par la société Arcelormittal à l'encontre de l'Eurl Raymond, de la société Bureau Véritas et de la société C..., qui constitue des conclusions nouvelles en appel ;

- irrecevabilité des demandes de la Mutuelle des Architectes Français (MAF), qui ne justifie pas de la subrogation dans les droits et actions de son assuré, prévue par l'article L. 121-12 du code des assurances, alors qu'elle produit en appel des mémoires communs avec ce dernier, l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond ;

- irrecevabilité des demandes de la Compagnie Axa France Iard, qui ne justifie pas de la subrogation dans les droits et actions de son assuré, prévue par l'article L. 121-12 du code des assurances, la société Chossière Constructions, dont seules la responsabilité contractuelle concernant le lot 10 et la responsabilité délictuelle concernant les préjudices "immatériels" ont été retenues par le jugement contesté.

La Compagnie Axa France Iard a présenté des observations le 20 novembre 2020.

La société Arcelor Mittal a présenté des observations le 20 novembre 2020.

La Mutuelle des Architectes Français a présenté des observations le 24 novembre 2020.

L'Eurl Alexandre Raymond a présenté des observations le 29 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code civil ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le décret n° 99-443 du 28 mai 1999 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F... ;

- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteur public ;

- et les observations de Me B..., pour la société Bureau Veritas Construction, celles de Me D..., représentant la commune de La Monnerie-Le-Montel, celles de Me H..., représentant la société Arcelormittal Constructions France, et celles de Me E..., représentant la société Axa France Iard.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement du 28 octobre 2008, la commune de La Monnerie-Le Montel, située dans le département du Puy-de-Dôme, a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération de réhabilitation de sa salle des sports à l'EURL d'architecture Alexandre Raymond. Par une convention du 2 juillet 2009, le contrôle technique de l'opération été confié à la SA Bureau Veritas. Par des actes d'engagement du 25 mai 2010, les lots n° 5 (couverture métallique - bardage) et n° 7 (serrurerie) ont été attribués à la SAS C..., le lot n° 9 (plâtrerie - peinture - plafonds) à la société Salesse et le lot n° 10 (carrelages-faïence) à la société Chossière construction. La société Arcelormittal est intervenue pour l'exécution du lot n° 5 en qualité de fournisseur à la société C... des bacs de toiture et des panneaux de bardage. Des désordres apparus dès le mois de novembre 2011 à la suite de fuites affectant la couverture courbe de la salle de sport (lot n° 5) ont été pris en charge par la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL). D'autres désordres ont ensuite affecté les lots n° 9 et 10, sans que les entreprises attributaires n'y remédient. La commune de La Monnerie-Le Montel a résilié par décisions des 4 janvier, 5 janvier et 9 janvier 2012 les marchés des sociétés C..., Salesse et Chossière construction.

2. La commune maître d'ouvrage a sollicité devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, à titre principal, sur le fondement de la garantie décennale, puis à titre subsidiaire, sur le fondement de la garantie contractuelle, la condamnation solidaire de l'EURL Alexandre Raymond, de la MAF, de la SA Bureau Veritas, de la SAS C..., et de la MAAF à lui verser la somme de 103 364,77 euros TTC, en réparation des désordres en lien avec les travaux du lot n°5 qui affectent les ouvrages, la condamnation solidaire de l'EURL Alexandre Raymond, de la MAF, du Bureau Veritas, de la SA Salesse et de la SMABTP à lui verser la somme de 6 045,38 euros TTC en réparation des désordres nés des travaux du lot n° 9, la condamnation solidaire de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la MAF, de la SA Bureau Veritas, de la SARL Chossière construction et de la compagnie d'assurances Axa France Iard à lui verser la somme de 14 577,67 euros TTC en réparation des désordres en lien avec les travaux du lot n° 10. La commune de La Monnerie-Le Montel a également sollicité, au titre de la responsabilité délictuelle, la condamnation de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la MAF, de la SA Salesse, de la SMABTP, de la SARL Chossière construction, de la compagnie d'assurances Axa France Iard, de la SAS C..., de la MAAF, de la SA Bureau Veritas et de la société Arcelormittal à lui verser la somme de 196 968,20 euros en réparation des préjudices immatériels qu'elle prétend avoir subis. Par un jugement n° 1601247 du 20 septembre 2018, dont la société par actions simplifiées (SAS) Bureau Véritas Construction, venant aux droits de la SA Bureau Veritas, relève appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a retenu la responsabilité décennale solidaire de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la SA Bureau Veritas et de la SAS C... au titre des travaux de reprise des désordres affectant les chéneaux du lot n° 5, la responsabilité contractuelle in solidum des mêmes constructeurs pour les travaux de reprise des désordres affectant le bardage vertical et les oculis du lot n° 5, la responsabilité contractuelle in solidum de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond et de la SA Bureau Veritas au titre des travaux de reprise des désordres affectant le lot n° 9, la responsabilité contractuelle in solidum de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la SA Bureau Veritas, et de la SARL Chossière construction au titre des travaux de reprise des désordres affectant le lot n° 10, et la responsabilité délictuelle in solidum de l'EURL d'architecture Alexandre Raymond, de la SARL Chossière construction, de la SAS C..., de la SA Bureau Veritas et de la société Arcelormittal au titre des préjudices qualifiés d'immatériels subis par la commune de La Monnerie-Le Montel en raison de la mauvaise exécution des travaux.

Sur la responsabilité décennale pour les désordres affectant les chéneaux (lot n°5) :

En ce qui concerne la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction venant aux droits de la SA Bureau Veritas :

3. Il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. Le constructeur dont la responsabilité est recherchée sur ce fondement ne peut en être exonéré, outre les cas de force majeure et de faute du maître d'ouvrage, que lorsque, eu égard aux missions qui lui étaient confiées, il n'apparaît pas que les désordres lui soient en quelque manière imputables. Par ailleurs, un constructeur dont la responsabilité est recherchée par un maître d'ouvrage n'est fondé à demander à être garanti par un autre constructeur que si et dans la mesure où les condamnations qu'il supporte correspondent à un dommage imputable à ce constructeur.

4. En premier lieu, il résulte des dispositions combinées des articles 46.1, 13.3 et 13.4 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) approuvé par le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976, et applicable au présent marché, que la résiliation du marché emporte réception des travaux sans qu'y fasse obstacle l'absence de constat contradictoire des travaux réalisés.

5. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal les 31 mai et 9 décembre 2013, que les marchés confiés à la société C... pour la réalisation des travaux du lot n° 5, à la société Salesse pour la réalisation des travaux du lot n° 9, et à la société Chossière pour la réalisation des travaux du lot n° 10 de l'opération de reconstruction de la salle omnisports ont été résiliés par la commune de La Monnerie-Le Montel, qui a fait valoir les importantes difficultés rencontrées avec ces entreprises, et notamment les malfaçons qui affectaient les parties d'ouvrage dont elles avaient la charge. Cette seule circonstance emportait réception de ces travaux à la date d'effet de la résiliation.

6. La réception étant, en vertu de l'article 1792-6 alinéa 1er du code civil, " l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et constate que les constructeurs ont accompli leurs engagements contractuels ", elle est opposable à l'ensemble des constructeurs, des intervenants à l'acte de construire, y compris au contrôleur technique, alors même que cette réception résulte de la résiliation de marchés non opposable à ce constructeur. La société Bureau Véritas Construction, n'est donc pas fondée à soutenir que la réception du lot n° 5 ne lui est pas opposable.

7. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que des réserves avaient été émises pour les désordres, relatifs aux chéneaux du lot n° 5, que les premiers juges ont décrit. Ainsi, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que chaque résiliation ayant été assortie d'une liste de réserves sur les ouvrages exécutés ou restant à réaliser, ces désordres relevaient de la garantie de parfait achèvement à laquelle elle ne peut être tenue.

8. En troisième lieu et dernier lieu, aux termes de l'article L. 111-23 du code de la construction et de l'habitation : " Le contrôleur technique a pour mission de contribuer à la prévention des différents aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages. Il intervient à la demande du maître de l'ouvrage et donne son avis à ce dernier sur les problèmes d'ordre technique. Cet avis porte notamment sur les problèmes qui concernent la solidité de l'ouvrage et la sécurité des personnes ". L'article L. 111-24 du même code précise : " Le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l'ouvrage à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792, 1792-1 et 1792-2 du code civil, reproduits aux articles L. 111-13 à L. 111-15, qui se prescrit dans les conditions prévues à l'article 2270 du même code reproduit à l'article L. 111-20 ".

9. Il résulte de ces dispositions que l'obligation de garantie décennale s'impose non seulement aux architectes et aux entrepreneurs, mais également au contrôleur technique lié par contrat au maître de l'ouvrage dans la limite de la mission qui lui a été confiée.

10. En se bornant en soutenir qu'elle n'avait pas la qualité de constructeur, qu'elle ne détenait pas les dossiers techniques et les notes de calculs pour exercer sa mission, mais en ne contestant pas sérieusement que les désordres affectant les chéneaux sont imputables à sa mission relative à la solidité des ouvrages et éléments d'équipements indissociables, qui comprend un contrôle des documents de conception et d'exécution mais aussi un contrôle sur chantier, la société appelante, qui ne remet pas en cause le caractère décennal de ces désordres, n'apporte pas une contestation sérieuse à l'engagement de sa responsabilité décennale de plein droit, dont elle ne saurait s'exonérer en se prévalant du défaut de transmission de documents techniques.

En ce qui concerne la responsabilité de l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond :

11. En se bornant à soutenir que l'architecte a produit nombre de compte-rendus de chantier qui attestent d'un contrôle d'une exécution conforme aux prévisions, l'Eurl Raymond, chargée de la conception et de la direction des travaux, ne conteste pas sérieusement la mise en jeu de sa responsabilité décennale par les premiers juges, alors qu'il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, qu'elle n'a émis aucune remarque sur le type inadapté de gouttière proposé par la société C..., modifié au regard des prescriptions du cahier des clauses techniques particulières. Elle a validé ce principe de gouttière, alors que les chéneaux prévus sur une seule partie de la couverture se sont déformés et ont été partiellement arrachés, révélant que le principe constructif retenu par la maîtrise d'oeuvre était inapproprié pour un bâtiment situé dans une zone exposée à d'importantes chutes de neige. C'est donc à bon droit que sa responsabilité décennale a été engagée in solidum pour les désordres affectant les chéneaux (lot n° 5).

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bureau Véritas Construction et l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand les a condamnées, solidairement avec la société C..., à verser la somme de 5 901,96 euros TTC à la commune de La Monnerie-Le Montel au titre du lot n° 5, au titre de leur garantie décennale.

Sur la responsabilité contractuelle :

En ce qui concerne la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction venant aux droits de la SA Bureau Veritas :

S'agissant du lot n° 5 (couverture métallique-bardage) :

13. Il résulte de l'instruction que le bardage vertical, qui relevait, comme les oculis, de la mission de contrôle de la société Bureau Véritas, telle que décrite au point 8, subissait des infiltrations d'eau en raison d'une mise en place défectueuse de l'isolant, pincé entre le bardage et la bavette. Toutefois, l'expert a souligné que cette malfaçon et les conséquences du pincement de la laine de verre, à l'origine d'infiltrations, avait été relevée par le bureau de contrôle. En signalant ce défaut, la société Bureau Véritas a exécuté sa mission pour ce qui a trait au bardage mais aussi pour les oculis, affectés également par des désordres imputables au défaut d'étanchéité du bardage. C'est donc à tort que les premiers juges ont inclus sur le terrain contractuel le contrôleur technique au nombre des responsables in solidum de ces désordres.

S'agissant du lot n° 9 (plâtrerie-peinture-plafonds) :

14. Aux termes de l'article 1792-2 du code civil : " Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage ".

15. Les cloisons, plafonds et peintures de ces derniers ne constituent pas des éléments d'équipement indissociables relevant de la mission L du contrôleur technique. L'expert n'a d'ailleurs retenu aucune part de responsabilité incombant à la société Bureau Véritas, alors qu'il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que ces désordres seraient liés à une faute dans l'exécution de sa mission. C'est donc à tort que le jugement attaqué a retenu sa responsabilité contractuelle pour les désordres du lot n° 9.

S'agissant du lot n° 10 (carrelage faïence) :

16. Les carrelages et faïences ne constituent pas davantage des éléments d'équipement indissociables relevant de la mission L du contrôleur technique. L'expert n'a quant à lui retenu aucune part de responsabilité dans la survenance des dommages concernant ces éléments incombant à la société Bureau Véritas, à laquelle aucune faute dans l'exercice de sa mission ne peut à ce titre être reprochée. C'est donc aussi à tort que les premiers juges ont retenu la responsabilité contractuelle in solidum de cette société pour les désordres affectant le lot n°10.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la société appelante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les articles 4, 5 et 6 du jugement attaqué, qui est toutefois suffisamment motivé, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamnée, avec les autres constructeurs concernés, à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel les sommes de 70 940,52 euros TTC, 1 209,08 euros TTC, et 15 577,67 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant le bardage vertical et les oculis du lot n° 5 (couverture métallique-bardage et oculis), le lot n° 9 (plâtrerie-peinture-plafonds), et le lot n°10 (carrelage faïence), sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

En ce qui concerne la responsabilité de l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond :

18. En se bornant à soutenir qu'elle a produit un grand nombre nombre de compte-rendus de chantier qui attestent d'un contrôle d'une exécution conforme aux prévisions, l'Eurl Raymond, architecte, ne remet pas sérieusement en cause l'engagement de sa responsabilité contractuelle pour les malfaçons des lots n°s 5 (bardage vertical et oculis) 9, et 10 par les premiers juges, alors qu'elle avait une mission de direction de l'exécution des contrats de travaux.

19. Il résulte de ce qui précède que l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamnée à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel les sommes de 70 940,52 euros TTC, 1 209,08 euros TTC, et 15 577,67 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant le bardage vertical et les oculis du lot n° 5 (couverture métallique-bardage et oculis), le lot n° 9 (plâtrerie-peinture-plafonds), et le lot n°10 (carrelage faïence), sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

Sur la responsabilité délictuelle :

En ce qui concerne la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction venant aux droits de la SA Bureau Veritas :

20. Si la société appelante conclut à l'annulation du jugement en tous les chefs lui faisant grief, elle ne soulève aucun moyen ou argumentaire permettant de remettre en cause sa responsabilité délictuelle pour les préjudices dits " immatériels ". Elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamnée, in solidum avec d'autres constructeurs, à verser à la commune de La Monnerie-Le Montel la somme de 121 035,08 euros en réparation de ces préjudices, sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

En ce qui concerne la responsabilité de l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond :

21. Si l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond demande à la cour de réformer le jugement contesté en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'une somme de 121 035,08 euros à la commune de La Monnerie Le Montel au titre de la réparation de préjudices dits " immatériels " sur le fondement de la responsabilité délictuelle, elle n'assortit cette demande d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Ses conclusions ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

En ce qui concerne la responsabilité de la société Arcelor Mittal :

22. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Le jugement contesté, qui n'a pas à répondre à tous les arguments avancés par les parties, est bien motivé concernant les préjudices " perte location salle des fêtes ", " ligne de trésorerie ", " consommation d'électricité de janvier 2012 à mai 2016 pour maintenir le bâtiment hors gel sans utilisation ", et " perte d'une partie de la subvention du conseil général ". Par suite, la société Arcelormittal n'est pas fondée à soutenir que le jugement contesté, qui décrit précisément les dommages subis par la commune, est insuffisamment motivé concernant l'indemnisation de ces préjudices sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

23. En second lieu, si la société Arcelormittal conteste tant avoir commis une faute que l'existence de certains des préjudices " immatériels " indemnisés par les premiers juges, la solution donnée à l'appel principal par le présent arrêt n'aggrave pas la situation de cette société concernant sa responsabilité délictuelle et les préjudices " immatériels " indemnisés sur ce fondement par les premiers juges. Par suite, ses demandes présentées, par la voie de l'appel provoqué, contre la commune, tendant à ce que sa responsabilité délictuelle soit écartée et ce que le jugement soit réformé en ce qu'il a alloué une somme de 121 035,08 euros au maître d'ouvrage au titre de l'indemnisation de ses préjudices " immatériels " ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne l'indemnisation du préjudice relatif à la location de chapiteaux pour le salon coutelier au titre de l'année 2014 sollicitée par la commune de La Monnerie-Le Montel :

24. La commune de La Monnerie-Le Montel recherche, par la voie de l'appel incident, la condamnation de la société Bureau Véritas Construction, appelant principal, à l'indemniser d'un préjudice à hauteur de 9 120 euros TTC, dont elle justifie la réalité en produisant une facture du 26 septembre 2014 pour la location de deux structures de 10 m x 5m avec plancher et éclairage et quatre chauffages air pulsé et fioul sur le stade de la Monnerie pour les 26, 27, 28 septembre 2014. Ce préjudice est lié directement aux désordres dès lors que la commune, qui compte environ 1 700 habitants et dont il ne ressort pas du dossier qu'elle disposerait d'autres infrastructures pour accueillir un salon d'exposition, allègue, sans être sérieusement contredite, que ce salon se tenait chaque année au sein de la salle omnisport. La commune de La Monnerie-Le Montel est ainsi fondée à rechercher la condamnation de la société Bureau Veritas Construction à lui verser cette somme de 9 120 euros TTC.

25. Toutefois, en l'absence d'aggravation de sa situation par la solution donnée à l'appel principal, la demande de la commune de La Monnerie-Le Montel, intimée, dirigée contre d'autres parties intimées et tendant à leur condamnation solidaire à lui verser cette somme de 9 120 euros TTC en réparation du préjudice relatif à la location de chapiteaux pour le salon coutelier au titre de l'année 2014, doit être rejetée comme irrecevable.

26. Enfin, la demande de la commune relative à ce même chef de préjudice et dirigée contre les assureurs MAF, AXA France Iard, et MAAF, dont seules les juridictions de l'ordre judiciaire pourraient être saisies, doit être rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur les conclusions de la Compagnie Axa France Iard, assureur de la société Chossière Constructions :

27. Dès lors que la Compagnie Axa France Iard ne justifie pas de la subrogation dans les droits et actions de son assuré, la société Chossière Constructions, prévue par l'article L. 121-12 du code des assurances, dont seules la responsabilité contractuelle concernant le lot n° 10 et la responsabilité délictuelle concernant les préjudices "immatériels" ont été retenues par le jugement contesté, sa demande tendant, par la voie de l'appel provoqué, au rejet des demandes présentées à l'encontre de société Chossière Constructions comme irrecevables en raison de la clôture de sa liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif et de sa radiation du registre du commerce et des sociétés, est irrecevable et doit donc être rejetée.

Sur les appels en garantie :

28. En premier lieu, l'appel en garantie formé par la société Bureau Véritas Construction à l'encontre de l'Eurl Alexandre Raymond, de la Société C..., de la Société Chossière construction, et de la Société Arcelormittal doit être rejeté dès lors qu'elle ne démontre, pas davantage que devant les premiers juges, une faute de ces intervenants concernant les désordres affectant les chéneaux (lot n°5) pour lesquels sa responsabilité décennale a été engagée.

29. En deuxième lieu, les conclusions d'appel en garantie formées par la société Arcelormittal à l'encontre de la société Bureau Véritas, de l'Eurl Raymond et de la société C... sont nouvelles en appel, et par suite irrecevables.

30. En troisième lieu, il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement de l'indemnité d'assurance due par un assureur au titre de ses obligations de droit privé et à raison du fait dommageable commis par son assuré, et ce alors même que l'appréciation de la responsabilité de cet assuré dans la réalisation du fait dommageable qui lui est imputé relèverait du juge administratif. Il suit de là qu'il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des conclusions d'appel en garantie présentées par les parties à l'encontre des assureurs des constructeurs mis en cause. Ainsi, les conclusions d'appel en garantie présentées par l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond contre les assureurs des sociétés Bureau Véritas, C..., Chossière Construction, Salesse, Arcelor Mittal doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

31. En quatrième lieu, l'appel en garantie formé par l'Eurl Alexandre Raymond à l'encontre des sociétés Bureau Véritas, C..., Chossière Construction, Salesse, et Arcelormittal ne peut qu'être rejeté en l'absence de démonstration que ces sociétés auraient commis des fautes susceptibles de l'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité.

32. En cinquième et dernier lieu, dès lors que la Mutuelle des Architectes Français (MAF) ne justifie pas de la subrogation dans les droits et actions de son assuré, prévue par l'article L. 121-12 du code des assurances, alors qu'elle produit en appel des mémoires communs avec ce dernier, l'Eurl d'architecture Alexandre Raymond, ses conclusions d'appel en garantie présentées à l'encontre des sociétés Bureau Véritas, C..., Chossière Construction, Salesse, Arcelor Mitta, et, en tout état de cause, de leurs assureurs, doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les dépens :

33. Si la société Arcelormittal demande la réformation du jugement contesté en ce qu'il a alloué à la commune une somme de 11 816,02 euros TTC au titre des frais d'expertise, elle n'assortit cette demande d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il y a donc lieu de confirmer le jugement contesté en ce qu'il a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 11 816,02 euros, à la charge solidaire de la SA Bureau Veritas, de l'EURL Alexandre Raymond, de la SAS C..., de la SARL Chossière construction et de la société Arcelormittal.

Sur la demande de la société Arcelormittal concernant les frais non compris dans les dépens exposés en première instance :

34. La demande de la société Arcelormittal qui demande la réformation du jugement contesté en ce qu'il a alloué à la commune une somme de 2 000 euros TTC au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative, n'est assortie d'aucune argumentation susceptible d'entrainer la réformation du jugement. Ses conclusions doivent donc être rejetées.

Sur les frais non compris dans les dépens exposés en appel :

35. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la société Bureau Véritas Construction et de mettre à la charge de la commune de La Monnerie-Le-Montel la somme de 2 000 euros.

36. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par la commune de La Monnerie-Le-Montel.

37. Les conclusions présentées à ce titre par l'Eurl Alexandre Raymond, la MAF, et la Compagne Axa France Iard, qui ont la qualité de parties perdantes, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 4, 5 et 6 du jugement n° 1601247 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand sont réformés en tant que la condamnation qu'ils prononcent concerne la SA Bureau Véritas aux droits de laquelle vient la société Bureau Véritas Construction.

Article 2 : La société Bureau Véritas Construction est condamnée à verser la somme de 9 120 euros TTC à la commune de La Monnerie-Le Montel.

Article 3 : La commune de La Monnerie-Le Montel versera à la société Bureau Véritas Construction une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le jugement n° 1601247 du 20 septembre 2018 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Bureau Véritas Construction, à la commune de La Monnerie-Le Montel, à la Mutuelle des architectes français, à la Compagnie d'assurance Axa France Iard, à l'Eurl Alexandre Raymond, à la SAS C..., à Me A..., mandataire liquidateur de la SARL Chossière construction, et à la société Arcelormittal. Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. F..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2020.

2

N° 18LY04044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04044
Date de la décision : 21/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : SELARL GVB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-21;18ly04044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award