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17/12/2020 | FRANCE | N°20LY02033

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 17 décembre 2020, 20LY02033


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans ou un certificat de résidence temporaire, subsidiairement de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notificatio

n du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans ou un certificat de résidence temporaire, subsidiairement de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1907948 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juillet 2020, M. B..., représenté par la SELARL BS2A Bescou et C... avocats associés, agissant par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1907948 du 16 juillet 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné du préfet de la Loire du 25 septembre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un certificat de résidence de dix ans ou un certificat de résidence temporaire, subsidiairement de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- en lui délivrant un récépissé de demande de renouvellement de carte de séjour, le préfet de la Loire a implicitement mais nécessairement reconnu qu'il était toujours titulaire du certificat de résidence de dix ans valable du 15 mai 2009 au 14 mai 2019 ; ainsi, la décision de refus de titre de séjour contestée, motivée par la circonstance que ce certificat de résidence a été retiré le 22 avril 2013, est entachée d'une erreur de droit et d'une absence d'examen particulier de sa situation ;

- les stipulations de l'article 8 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;

- les stipulations du troisième alinéa de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;

- les stipulations du 1) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;

- les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2020, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 13 avril 1977, est entré en France le 29 avril 2009 et a obtenu un certificat de résidence de dix ans valable du 15 mai 2009 au 14 mai 2019. Par un arrêté du 22 avril 2013, expédié le même jour à l'adresse de M. B... par pli recommandé avec demande d'avis de réception, puis retourné à l'expéditeur avec la mention " pli avisé et non réclamé ", le préfet de la Loire a retiré ce titre de séjour au motif qu'il avait été obtenu irrégulièrement, a obligé l'intéressé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le 16 mai 2019, M. B... a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence de dix ans. Par un arrêté du 25 septembre 2019, le préfet de la Loire a refusé de faire droit à cette demande, a obligé M. B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait le cas échéant être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise. (...) ".

3. D'autre part, aux termes du troisième alinéa de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées ".

4. Le 16 mai 2019, le préfet de la Loire a remis à M. B... un " récépissé de demande de carte de séjour ", valable jusqu'au 15 novembre 2019 et dont le seul effet, ainsi qu'il résulte des dispositions de l'article R. 311-4 citées au point 2, est d'autoriser la présence de l'intéressé sur le territoire français jusqu'à cette date. La délivrance de ce récépissé, compte tenu de la nature même de cette mesure, ne saurait dès lors valoir retrait ou abrogation de la décision du 22 avril 2013 portant retrait du certificat de résidence de dix ans valable du 15 mai 2009 au 14 mai 2019, mais a seulement eu pour effet d'abroger les décisions du 22 avril 2013 obligeant l'intéressé à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. Ainsi, pour erronées que soient les mentions indiquant que les effets du titre de séjour expirant le 14 mai 2019 sont prolongés jusqu'au 15 novembre 2019, le préfet de la Loire n'a pas, en délivrant ce récépissé, implicitement retiré ou abrogé la décision du 22 avril 2013 retirant le certificat de résidence de dix ans dont bénéficiait M. B.... Par suite, le préfet de la Loire a pu légalement, pour fonder la décision contestée du 25 septembre 2019, retenir que l'intéressé ne pouvait se prévaloir du certificat de résidence algérien, qui lui a été retiré par l'arrêté du 22 avril 2013, pour en solliciter le renouvellement automatique sur le fondement du troisième alinéa de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Pour ces mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée n'aurait pas été précédée d'un examen particulier de la situation personnelle de M. B....

5. En deuxième lieu, M. B..., qui n'était pas titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans pour les motifs énoncés au point précédent, ne saurait utilement soutenir qu'il devait bénéficier d'un renouvellement de plein droit d'un tel titre en application du troisième alinéa de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

6. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 8 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un ressortissant algérien qui aura quitté le territoire français pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmé ".

7. Dès lors, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'il n'était pas titulaire d'un certificat de résidence, M. B... ne peut utilement se prévaloir de l'absence de péremption d'un tel certificat. Ne peut ainsi qu'être écarté, en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du premier alinéa de l'article 8 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

8. En quatrième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre stipulation de cet accord, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il n'apparaît pas que M. B... aurait présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 1) ni du 5) de l'article 6 de cet accord. Le préfet de la Loire, qui n'y était pas tenu, n'a pas examiné sa demande au regard de ces dernières stipulations. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de celles-ci à l'appui de sa contestation du refus qui lui a été opposé.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. B... fait valoir qu'il séjourne régulièrement en France depuis 2009 où il bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée. Toutefois, le requérant, qui n'établit pas, par les pièces qu'il produit, résider habituellement en France depuis 2009 ni n'allègue y avoir tissé des liens personnels particuliers, a vécu pour l'essentiel en Algérie, où il est constant que vit notamment son épouse. En outre, ainsi qu'il a été dit précédemment, le certificat de résidence de dix ans qui lui avait été délivré en mai 2009 lui a été retiré le 22 avril 2013 par le préfet de la Loire au motif que ce titre avait été obtenu de manière irrégulière au moyen de manoeuvres frauduleuses d'un agent administratif, de sorte que M. B... ne saurait se prévaloir de la régularité de son séjour en France. Dans ces circonstances, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France et alors même qu'il y exerçait une activité professionnelle à la date de la décision contestée, celle-ci ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, elle ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

12. En second lieu, en l'absence de toute argumentation supplémentaire, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance, par l'obligation de quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

13. Il résulte de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français, que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi. Cette dernière décision n'ayant été prise ni en application ni sur le fondement de la décision de refus de titre de séjour, M. B... ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ce refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

2

N° 20LY02033


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02033
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-17;20ly02033 ?
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