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17/12/2020 | FRANCE | N°20LY01479

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 17 décembre 2020, 20LY01479


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour de six mois avec droit au travail, dans le délai de huit jours à compter de la notification du ju

gement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre su...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour de six mois avec droit au travail, dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1906278 du 27 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2020, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1906278 du 27 mars 2020 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Loire a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou à défaut une autorisation provisoire de séjour de 6 mois et, dans l'attente, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail sous 8 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard;

4°) de condamner l'Etat à verser à Me B... la somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé dès lors qu'il vise à tort les dispositions de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien et les articles L. 311-1 et L. 311-11-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne précise pas en quoi l'examen de sa situation ne contrevient pas à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention précitée et a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors que son fils D... A... ne peut bénéficier en Algérie du traitement nécessaire à ses crises d'épilepsie, le zonisamide ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'irrégularité du refus de séjour, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2020, la préfète de la Loire conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gayrard, président assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 26 avril 2019, le préfet de la Loire a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme E... et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination. Par un jugement du 27 mars 2020, dont Mme E... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

2 En premier lieu, la circonstance que l'arrêté litigieux vise à tort les dispositions du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, s'agissant d'une demande de titre de séjour sollicitée par une ressortissante algérienne en raison de l'état de santé de son enfant, est sans incidence sur la motivation, ni même la légalité, de l'arrêté attaqué. En visant les textes applicables et en indiquant que le fils de Mme E... peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Algérie, qu'elle est entrée récemment sur le territoire français où elle ne dispose d'aucune attache familiale, et qu'elle ne démontre pas d'insertion particulière dans la société française alors qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches culturelles et familiales dans son pays d'origine, le préfet de la Loire a suffisamment motivé en quoi sa décision ne contrevenait ni aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni à celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de l'arrêté querellé ne peut qu'être écarté.

3 En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

4 Il ressort des pièces du dossier que le fils de la requérante, né le 27 octobre 2003 en Algérie, est atteint d'une épilepsie généralisée idiopathique pour laquelle il était traité par Depakine et Tegretol. Par son avis du 10 décembre 2018, si le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de cet enfant nécessitait une prise en charge médicale dont l'absence pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour l'intéressé, il a toutefois estimé qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, il pouvait y bénéficier d'un traitement approprié et que son état de santé pouvait lui permettre de voyager sans risque. Si la requérante fait valoir que le traitement à base de zonisamide qui est actuellement dispensé à son fils, en remplacement de la Depakine mal tolérée, ne serait pas disponible en Algérie, elle n'établit, ni même n'allègue, qu'un traitement adéquat ne serait pas disponible en Algérie, pays dans lequel son enfant a été pris en charge jusqu'à l'âge de quatorze ans. Dès lors, les éléments produits tant en première instance qu'en appel ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration en date du 10 décembre 2018. Par suite, en estimant que l'intérêt supérieur de l'enfant au regard de son état de santé n'était pas méconnu par les décisions querellées, le préfet de la Loire n'a ni commis une erreur de droit, ni entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation.

5 Il ressort des pièces du dossier que Mme E... est entrée en France le 17 novembre 2017 avec son fils, ne déclare aucune attache familiale ou privée en France, ni ne fait état d'élément sur son intégration dans la société française Dès lors, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, la décision de refus de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié.

6 Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été évoqués aux points précédents, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

7 Eu égard aux points précédents, la requérante ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français. Pour les mêmes motifs que ceux vus précédemment, les moyens tirés de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ou encore de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet, doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 26 avril 2019 par lequel le préfet de la Loire a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination, ainsi que par voie de conséquence, celles à fin d'injonction et d'astreinte. Il y a lieu également de rejeter ses conclusions à fin de mise à la charge de l'État des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

N° 20LY01479 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01479
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : ROYON

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-17;20ly01479 ?
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