La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2020 | FRANCE | N°18LY03609

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 10 décembre 2020, 18LY03609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Yes a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2015 par lequel le maire de la commune de Claix a retiré une décision tacite par laquelle il ne s'était pas opposé à une déclaration préalable de travaux, intervenue le 5 mars 2015.

Par un jugement n° 1507780 du 26 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 2

6 septembre 2018 et le 26 avril 2019, la SCI Yes, représentée par Me C..., demande à la cour :

1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Yes a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2015 par lequel le maire de la commune de Claix a retiré une décision tacite par laquelle il ne s'était pas opposé à une déclaration préalable de travaux, intervenue le 5 mars 2015.

Par un jugement n° 1507780 du 26 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés respectivement le 26 septembre 2018 et le 26 avril 2019, la SCI Yes, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 26 juillet 2018 ainsi que l'arrêté du 23 octobre 2015 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Claix la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le retrait est illégal dès lors qu'il est intervenu plus de trois mois après que la non-opposition à déclaration préalable ait été tacitement obtenue et que le motif tiré de la fraude n'est pas fondé ; la commune connaissait parfaitement la consistance des travaux avant la naissance de l'autorisation tacite et ne pouvait se prévaloir d'élément nouveau au soutien de la décision de retrait ;

- il n'y a pas de manoeuvres frauduleuses dès lors que les travaux entrepris ne créent pas de surface plancher et que la création de logements dans le volume existant n'est pas interdite ;

- la création de logements n'emporte aucune conséquence sur l'exposition aux risques naturels des occupants de la construction.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 29 mars et le 20 mai 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Claix, représentée par la SCP Fessler Jorquera et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- elle n'a eu connaissance de la création de deux logements supplémentaires et de l'augmentation de la surface plancher qu'après la naissance de la décision de non opposition tacite ; aucune pièce jointe à l'appui de la déclaration préalable déposée par la société requérante le 5 février 2015 ne permettait de comprendre la réelle consistance des travaux, ce qui lui enlève toute sincérité ;

- les manoeuvres frauduleuses sont établies par les déclarations divergentes de la société requérante auprès des autorités fiscales et des services instructeurs de la mairie, auxquels elle a sciemment omis de déclarer la création de deux logements supplémentaires ainsi que l'augmentation de surface plancher ayant permis la réalisation de ces deux logements ;

- la création de ces deux logements augmente l'exposition des personnes ou la vulnérabilité des biens aux risques naturels en méconnaissance du plan de prévention des risques naturels (PPRN) en vigueur et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 16 mai 2019 par une ordonnance du 29 avril précédent en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... E..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me A..., substituant Me C..., pour la SCI Yes, ainsi que celles de Me B... pour la commune de Claix ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 23 octobre 2015, le maire de la commune de Claix a retiré une décision tacite, intervenue le 5 mars 2015, par laquelle il ne s'était pas opposé à une déclaration préalable de travaux présentée par la SCI Yes. Celle-ci relève appel du jugement du 26 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Pour retirer la décision de non-opposition à déclaration préalable tacitement obtenue par la société Yes le 5 mars 2015, le maire de Claix s'est fondé sur le fait que cette déclaration, déposée le 5 février 2015, n'était pas sincère dès lors que, sous couvert de réaliser de simples aménagements elle visait à régulariser des travaux antérieurs, à l'origine de la création de surfaces de plancher et de deux nouveaux logements, en méconnaissance du règlement de la zone BI du plan de prévention des risques naturels (PPRN), laquelle est une zone de crue de rivière où les constructions et création de surfaces nouvelles sont interdites.

3. Pour contester cette appréciation, la société Yes fait valoir que les manoeuvres frauduleuses ne sont pas constituées et que la commune ne peut invoquer la fraude dès lors qu'elle avait connaissance de la consistance réelle des travaux ayant fait l'objet de la déclaration préalable déposée le 5 février 2015 dès la naissance de l'autorisation tacite.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme D..., gérants de la SCI Yes, ont acquis en 2013 un local à usage d'habitation d'une surface habitable de 115 m² et implantée sur la parcelle AI n° 153. Celle-ci est située en zone violette BI du PPRN, qui interdit toute construction nouvelle ou toute augmentation de surface de plancher. Cette construction a fait l'objet de travaux de rénovation des toitures et d'une création de terrasse sans création de surface, autorisés par arrêté du 13 octobre 2013 par le maire de Claix. Un procès-verbal a toutefois été dressé le 26 mars 2015 à la suite d'une visite à l'extérieur de la maison par un agent assermenté de la commune effectuée fin 2014, qui a constaté notamment que la loggia en façade sud avait été fermée, qu'un escalier extérieur sur la façade nord-est avait été édifié pour accéder à une porte aménagée à l'emplacement d'une ancienne fenêtre. Consécutivement à ces constats et à des échanges avec la commune, la SCI a déposé le 5 février 2015 une déclaration préalable de travaux pour la pose en façade Nord-Ouest d'une marquise en fer et polycarbonate, la modification en façade Nord-Est d'une porte vitrée en une fenêtre deux vantaux, la modification d'une fenêtre simple vantail en une porte fenêtre deux vantaux et la création d'un escalier extérieur en métal avec sa rambarde et, enfin, le remplacement en façade Sud-Est d'une baie vitrée par deux fenêtres dotées de deux vantaux. Toutefois, ne reprenant pas les éléments constatés irréguliers dans le procès-verbal du 26 mars 2015, tout en y déclarant une surface de plancher existante portée à 140 m², elle ne donnait à sa déclaration pas pour objet la création de surface de plancher non plus que la création de logements. Il ressort ainsi de l'ensemble des pièces du dossier que, si la SCI a entrepris, par ailleurs, des travaux ayant pour finalité, par la fermeture de la loggia du premier étage et la multiplication des accès individuels, la création de trois logements indépendants, tout en s'abstenant de déclarer l'augmentation, supérieure au demeurant à 20 m2, de la surface de plancher concomittante intervenue depuis l'acquisition du bien en la présentant comme la surface existante à la date de la déclaration en litige la SCI Yes ne peut toutefois être regardée que comme ayant limité le champ de sa déclaration aux seuls aménagements expressément énumérés dans celle-ci, en vue dès lors d'obtenir la régularisation de ceux-ci, qui ne pouvait dans ces conditions s'étendre au surplus des travaux non déclarés, notamment de création de surfaces et de logement, et en infraction avec les dispositions du PPRN, par ailleurs susceptibles de poursuites pénales. Dans ces conditions, il ne peut être considéré, comme l'ont retenu à tort les premiers juges, que la SCI Yes a, par l'objet présenté de sa déclaration, tenté d'obtenir frauduleusement la régularisation des travaux hors du champ de cette déclaration, quoiqu'il soit établi que ceux-ci n'ont pas été déclarés et aient été exécutés en infraction aux dispositions du PPRN.

5. Dans ces conditions, la SCI est fondée à soutenir que c'est à tort que le maire de Claix, à qui il appartient par ailleurs d'appliquer les dispositions pénales du code de l'urbanisme s'agissant des travaux constatés irréguliers hors du champ de la déclaration en litige, lui a opposé ce motif pour retirer l'autorisation qu'elle avait tacitement obtenue le 5 mars 2015 pour les seuls aménagements énumérés dans sa déclaration.

6. Il résulte de ce qui précède que la SCI Yes est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la commune de Claix au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la SCI Yes, qui n'est pas partie perdante en appel. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions à l'encontre de la commune de Claix.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 26 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Claix du 23 octobre 2015 est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Yes et à la commune de Claix.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Daniel Josserand-Jaillet, président ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme F... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.

md

N° 18LY03609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03609
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : DJEFFAL

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-10;18ly03609 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award