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03/12/2020 | FRANCE | N°20LY00582

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 03 décembre 2020, 20LY00582


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. S... G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 27 août 2019 par laquelle la préfète de la Nièvre a rejeté sa demande de regroupement familial déposée au profit de son épouse Mme O... L... et de ses enfants N... et Ismael.

Par un jugement n° 1903051 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 février 2020 et le 20 juillet 2020, M. G..., rep

résenté par Me Azou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. S... G... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 27 août 2019 par laquelle la préfète de la Nièvre a rejeté sa demande de regroupement familial déposée au profit de son épouse Mme O... L... et de ses enfants N... et Ismael.

Par un jugement n° 1903051 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 février 2020 et le 20 juillet 2020, M. G..., représenté par Me Azou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de la préfète de la Nièvre du 27 août 2019 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Nièvre de lui accorder le bénéfice du regroupement familial dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. G... soutient que :

- le jugement, qui n'a pas suffisamment tenu compte et examiné ses moyens, est irrégulier ;

- la décision n'a pas été signée par une autorité disposant d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- la préfète n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait, la situation de polygamie justifiant la décision de la préfète n'étant pas établie, ainsi qu'en attestent les pièces d'état civil qu'il a produites et qui ont été légalisées ; la préfète ne peut lui demander de rectifier un jugement de divorce, pour lequel il n'a pas été représenté et dont les délais de contestation sont expirés ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision est entachée d'erreur de droit dans la mesure où la préfète s'est fondée uniquement sur la circonstance qu'il ne satisfaisait pas à la condition de respect des principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, sans avoir examiné l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment l'atteinte portée par sa décision au droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision revêt un caractère discriminatoire, contraire aux stipulations des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant J... en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par des mémoires, enregistrés le 19 mars 2020 et le 30 juillet 2020, la préfète de la Nièvre conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par M. G... ne sont pas fondés ;

- son fils N... qui est majeur ne peut prétendre au bénéfice du regroupement familial.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., ressortissant sénégalais, né le 28 octobre 1950, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 29 mars 2025, relève appel du jugement en date du 11 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 27 août 2019 par laquelle la préfète de la Nièvre a rejeté sa demande de regroupement familial déposée le 13 mars 2019 au profit de son épouse Mme O... L..., qu'il a épousée le 30 septembre 1999, et de leurs enfants N... G..., né le 7 décembre 1999, et J... G..., né le 6 mai 2004.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : (...) 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil. ".

3. Pour refuser d'accorder le bénéfice du regroupement familial à M. G..., la préfète de la Nièvre s'est fondée sur le fait que l'intéressé ne se conforme pas aux principes essentiels qui régissent la vie familiale en France dans la mesure où il ressort du jugement du 19 janvier 1996 du tribunal de grande instance de Meaux prononçant son divorce avec Mme E... C... que le divorce a été prononcé à son tort exclusif compte tenu d'une situation de polygamie puisqu'il était marié au Sénégal avec Mme K... C... avec laquelle il avait eu deux enfants. La préfète a indiqué, dans sa décision de refus, que malgré trois courriers qui lui ont été adressés il n'a été en mesure de fournir ni le jugement de divorce relatif à cette union, ni aucun document portant révision du jugement de divorce rendu le 19 janvier 1996.

4. Il ressort des pièces du dossier que, pour prononcer le 19 janvier 1996 le divorce de M. G... et de Mme F... C... aux torts exclusifs de M. G..., le tribunal de grande instance de Meaux, s'est fondé sur les témoignages versés aux débats, émanant de Mmes K... C..., M... C... et A... D..., attestant que M. G... se serait marié au Sénégal avec une autre femme, K... C... ajoutant même que celui-ci serait le père de deux enfants issus de cette union parallèle. Il ne ressort pas des termes de ce jugement que M. G... aurait épousé au Sénégal Mme K... C..., Mme K... C... étant seulement l'auteure d'un des témoignages versés aux débats. En se fondant sur la circonstance qu'il était marié au Sénégal avec Mme K... C... avec laquelle il a eu deux enfants ainsi que le mentionne le jugement, la préfète s'est fondée sur des faits matériellement inexacts, ce qui l'a conduit au demeurant à exiger de M. G... une preuve impossible. La décision est illégale et doit, pour ce motif, être annulée.

5. Il en résulte que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. G... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Aux termes des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".

7. La présente décision n'implique pas, eu égard à ses motifs, que la préfète de la Nièvre accorde à M. G... le bénéfice du regroupement familial. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par suite, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. G... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 27 août 2019 par laquelle la préfète de la Nièvre a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. G... au profit de son épouse et de leurs deux enfants et le jugement du 11 décembre 2019 du tribunal administratif de Dijon sont annulés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. G... est rejeté.

Article 3 : L'État versera à M. G... la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. S... G... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Nièvre et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Dijon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2020.

2

N° 20LY00582


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00582
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : SELARL QUENTIN AZOU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-03;20ly00582 ?
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