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24/11/2020 | FRANCE | N°18LY02450

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 24 novembre 2020, 18LY02450


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Bluffy pour un développement raisonné a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 19 septembre 2016 et du 10 mars 2017 par lesquels le maire de la commune de Bluffy a accordé à la société d'économie mixte de construction du département de l'Ain (SEMCODA) un permis de construire et un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1701624 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour


Par une requête enregistrée le 2 juillet 2018 sous le n° 18LY02450, l'association Bluffy p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Bluffy pour un développement raisonné a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 19 septembre 2016 et du 10 mars 2017 par lesquels le maire de la commune de Bluffy a accordé à la société d'économie mixte de construction du département de l'Ain (SEMCODA) un permis de construire et un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1701624 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2018 sous le n° 18LY02450, l'association Bluffy pour un développement raisonné, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1701624 du tribunal administratif de Grenoble du 2 mai 2018 ainsi que les permis de construire délivrés par le maire de Bluffy à la SEMCODA les 19 septembre 2016 et 10 mars 2017 ;

2°) de mettre à la charge de la commune ou de la SEMCODA la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a intérêt pour agir ;

- elle a déposé ses statuts en préfecture en 2014, sa demande ne peut être considérée comme caduque ; de même elle dispose de la capacité pour agir en justice ; la circonstance que sa demande ne mentionne pas le siège social de l'association est sans incidence sur sa régularité ;

- le POS, tel qu'issu de la modification n° 2 approuvée par délibération du 13 avril 2010 n'est pas compatible avec le SCOT des communautés de communes du bassin annécien approuvé le 26 février 2014 et doit donc être écarté ;

- le projet n'est pas compatible avec le SCOT ; il prévoit une densification trop importante du secteur et la disponibilité en eau potable sur la commune avant la délivrance des permis n'a pas été vérifiée ;

- le projet méconnaît l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme parce qu'il induit une urbanisation démesurée et inadaptée aux besoins d'une commune rurale de 395 habitants ;

- l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme est méconnu ; le projet excède les disponibilités en eau potable de la commune en dépit de la construction d'un nouveau réservoir à Bluffy ;

- le projet méconnaît l'article NAb2-3 du règlement et l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, faute de prévoir un trottoir le long de la voie communale n° 4 sur toute sa longueur en direction du centre-bourg ; la sécurité du projet est conditionnée par la création d'un chemin d'accès empruntant la départementale n° 169 et le Chemin des Jonquilles et à un élargissement de ce chemin et ces travaux ne sont pas réalisés par la commune ;

- le projet méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ; la zone du Pré Guémet est une zone préservée à caractère naturel qui ne s'inscrit pas en continuité de l'urbanisation existante de laquelle elle est séparée par le Chemin des Jonquilles ;

- le projet méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ; de parti-pris moderne, il n'est pas intégré au bâti existant dans le village et dénature les vues sur le lac d'Annecy ;

- le projet méconnaît l'article NAb2-12 du règlement du POS ;

- le projet méconnaît l'article R.112-1 du code de la construction et de l'habitation et l'article R. 431-16 f) du code de l'urbanisme ; le projet s'implante dans une zone de risques naturels qui n'ont pas été pris en compte faute de plan de prévention des risques en vigueur sur le territoire de la commune.

Par deux mémoires en défense, enregistrés chacun le 30 décembre 2018, la SEMCODA, d'une part et la commune de Bluffy, d'autre part, représentées toutes deux par Me A..., concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'association requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au profit de chacune d'elles.

Elles soutiennent que :

- la demande de la requérants dirigée contre le permis de construire modificatif est tardive, étant intervenue à l'expiration du délai de recours contentieux ; l'affichage du permis de construire modificatif était régulier ;

- la demande de l'association requérante était caduque dès lors qu'en application des dispositions combinées des articles L. 600-1-1 et L. 600-13 du code de l'urbanisme, elle n'a pas justifié du dépôt de ses statuts en préfecture dans les trois mois suivant l'enregistrement au greffe du tribunal de sa demande ;

- faute de dépôt de ses statuts en préfecture et d'une déclaration régulière, l'association requérante n'avait pas intérêt pour agir ;

- les moyens soulevés contre les permis litigieux ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 7 mars 2019 par une ordonnance du même jour en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... C..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me A... pour la commune de Bluffy et la SEMCODA ;

Considérant ce qui suit :

1. L'association Bluffy pour un développement raisonné relève appel du jugement du 2 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des arrêtés du 19 septembre 2016 et du 10 mars 2017 par lesquels le maire de la commune de Bluffy a accordé à la société d'économie mixte de construction du département de l'Ain (SEMCODA) un permis de construire trente-deux logements et une maison des assistants maternels, au lieu-dit " Pré Guémet ".

2. En premier lieu, l'association requérante réitère, sans apporter d'élément nouveau en appel, ses moyens de première instance tirés de ce que le projet méconnaît le respect du principe d'équilibre entre le développement urbain et le respect des espaces naturels et agricoles énoncé par l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme, que le projet méconnaît l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, que le projet qui n'est pas implanté en continuité de l'urbanisation méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme et que le projet, par son aspect moderne, méconnaît l'article R. 111-27 du même code. Elle réitère également son moyen tiré de ce que le projet, parce qu'exposé à des risques naturels, a été autorisé en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 f) du code de l'urbanisme et de l'article R. 112-1 du code de la construction et de l'habitation. Ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs circonstanciés retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, il est constant que le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du bassin annécien a été adopté par délibération du syndicat mixte du 26 février 2014, soit postérieurement à la modification n° 2 du plan d'occupation des sols (POS) de Bluffy, laquelle, adoptée par délibération du 13 avril 2010, visait essentiellement à permettre l'ouverture à l'urbanisation du secteur du Pré Guémet et sur le fondement de laquelle ont été délivrés le permis de construire et son modificatif en litige. Il en résulte que l'association requérante ne peut utilement soutenir que cette modification n° 2 du POS est incompatible avec les préconisations du SCOT relatives à la ressource en eau ainsi qu'aux préconisations relatives aux objectifs de consommation foncière.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article NAb2-3 du règlement du plan d'occupation des sols : " Les occupations et utilisations du sol peuvent être refusées sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie et des engins de déneigement. / Elles peuvent être également refusées si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques, ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration, ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic (...) ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que les accès du projet sur la voie communale dite " chemin des Jonquilles " et, indirectement, sur la route départementale présentent un caractère de dangerosité dès lors que sont prévus un élargissement de cette voie communale ainsi que, sur ses côtés, la création de cheminements piétons sécurisés. Ces travaux sont prévus par une convention de projet urbain partenarial, dont la légalité ne saurait au demeurant être utilement critiquée dans le cadre du présent litige, annexée au permis de construire initial. Dans ces conditions, l'association, qui ne peut utilement faire valoir que la commune n'a pas prolongé les cheminements piétons jusqu'au chef-lieu, n'est pas fondée à soutenir que le maire a, en délivrant les autorisations en litige, fait une inexacte application des dispositions du POS précitées, ni qu'il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation pour l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

5. En quatrième lieu, l'article NAb2 -12 du règlement du POS prévoit en matière de stationnement : " pour les constructions à usage d'habitation financées par un prêt de l'Etat: 1 place par logement ; pour les autres constructions à usage d'habitation : 2 places de stationnement par logement, dont une couverte et dont 50% des places extérieures seront destinées aux visiteurs ; pour toutes autres constructions : l'importance de l'aménagement des places de stationnement nécessaires aux constructions ou aux équipements sera définie dans chaque cas particulier, en tenant compte de la capacité totale de la construction ou de l'équipement ".

6. Le projet comporte quinze logements aidés nécessitant la réalisation de quinze places de stationnement et dix-sept autres logements pour lesquels doivent être réalisés trente-quatre places dont dix-sept places couvertes. Le projet, tel que rectifié par le permis modificatif comprend soixante-six places dont trente-huit places couvertes. Il reste ainsi dix-sept places dédiées aux visiteurs dont onze places en extérieur propres à assurer le besoin en stationnement de la maison des assistantes maternelles, autorisée comme établissement recevant du public pour un effectif public de neuf personnes, auxquelles s'ajoutent les trois personnes y travaillant. Dès lors, le maire n'a pas entaché les permis de construire litigieux d'une erreur d'appréciation quant à l'application de l'article NAb2-12.

7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de ses conclusions, que l'association Bluffy pour un développement raisonné n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions à fin d'annulation des arrêtés du 19 septembre 2016 et du 10 mars 2017.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande l'association Bluffy pour un développement raisonné au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la commune de Bluffy ou de la SEMCODA, qui ne sont pas parties perdantes. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'association requérante la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Bluffy ainsi que la somme de 1 000 euros à verser à la SEMCODA au titre des frais que chacune des intimées a exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association Bluffy pour un développement raisonné est rejetée.

Article 2 : L'association Bluffy pour un développement raisonné versera à la commune de Bluffy et la SEMCODA, chacune, la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Bluffy pour un développement raisonné, à la commune de Bluffy ainsi qu'à la société d'économie mixte de construction du département de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2020 à laquelle siégeaient :

M. Daniel Josserand-Jaillet, président de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme D... C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.

N° 18LY02450

fp

N° 18LY02450


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY02450
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : GAUCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-24;18ly02450 ?
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