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17/11/2020 | FRANCE | N°18LY02902

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 17 novembre 2020, 18LY02902


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société des eaux de Corse a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse à lui verser la somme totale de 89 802 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en remboursement des majorations de 40 % des redevances pour prélèvement sur la ressource en eau auxquelles elle a été assujettie en vertu de quatre titres de recettes émis à son encontre les 16 et 30 octobre 2015.

Par un jugement n° 1606221 du 24 mai 2018, le tribunal administratif

de Lyon a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société des eaux de Corse a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse à lui verser la somme totale de 89 802 euros, augmentée des intérêts au taux légal, en remboursement des majorations de 40 % des redevances pour prélèvement sur la ressource en eau auxquelles elle a été assujettie en vertu de quatre titres de recettes émis à son encontre les 16 et 30 octobre 2015.

Par un jugement n° 1606221 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 juillet 2018, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse, représentée par la SELARL JL avocat agissant par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 mai 2018 ;

2°) de mettre à la charge de la société des eaux corses la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que c'est à tort que les juges de première instance ont considéré que l'absence de production des indices de connaissance et de gestion patrimoniale par la société des eaux corses ne constituait qu'une omission affectant un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt au sens de l'article 1729 du code général des impôts et non un défaut de déclaration au sens de l'article 1728 du même code.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 novembre 2018, la société des eaux corses, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse la somme de 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 novembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 3 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société des eaux corses, délégataire du service public de l'eau potable de plusieurs syndicats intercommunaux et communes, est assujettie au paiement de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau prévue par l'article L. 213-10-9 du code de l'environnement. A ce titre, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse en charge de la liquidation de cette redevance lui a adressé, le 17 juillet 2015, une mise en demeure de renseigner l'indice de connaissance et gestion patrimoniale (ICGP) concernant trois syndicats intercommunaux et une commune sur le complément au formulaire général de déclaration des prélèvements. En l'absence de réponse dans les trente jours, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse a informé la société des eaux corses, par courrier du 7 septembre 2015, qu'elle procédait à une imposition d'office de la redevance due pour ces quatre délégants assortie d'une majoration de 40 % en application de l'article 1728 du code général des impôts. La société des eaux corses ayant transmis les informations demandées le 17 septembre 2015, l'agence de l'eau n'a pas procédé à la taxation d'office mais a émis quatre titres de recette les 16 et 30 octobre 2015 pour obtenir paiement d'une somme 89 802 euros correspondant aux majorations de 40 % prévues par l'article 1728 du code général des impôts. L'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse relève appel du jugement rendu le 24 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à la restitution de cette somme à la société des eaux corses.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article L. 213-10-9 du code de l'environnement dispose que " I. - Toute personne dont les activités entraînent un prélèvement sur la ressource en eau est assujettie à une redevance pour prélèvement sur la ressource en eau. (...) III. - La redevance est assise sur le volume d'eau prélevé au cours d'une année. (...) V. (...) (al. 2) Le tarif de la redevance est fixé par l'agence de l'eau en centimes d'euros par mètre cube, dans la limite des plafonds suivants, en fonction des différents usages auxquels donnent lieu les prélèvements : (...) (al 7 et 8). Lorsque le descriptif détaillé des ouvrages de transport et de distribution d'eau potable prévu à l'article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales n'a pas été établi au 31 décembre 2014, le taux de la redevance pour l'usage " alimentation en eau potable " due au titre des prélèvements sur la ressource en eau effectués à compter de l'année 2014 est majoré de 100 %. / De même, lorsqu'un taux de perte en eau supérieur au taux fixé par le décret prévu au même article L. 2224-7-1 a été constaté et que le plan d'actions prévu audit article n'a pas été établi dans les délais prescrits, le taux de la redevance pour l'usage " alimentation en eau potable " due au titre des prélèvements sur la ressource en eau effectués à compter de l'année au cours de laquelle devait être établi le plan d'actions est majoré de 100 %. / La majoration prévue aux deux alinéas précédents cesse de s'appliquer à la redevance due au titre des prélèvements sur la ressource en eau effectués à compter de l'année au cours de laquelle est satisfaite, outre la condition tenant à l'établissement du descriptif détaillé, l'une au moins des deux conditions suivantes : / 1° Le plan d'actions a été établi ; / 2° Le taux de perte en eau du réseau de la collectivité est inférieur au taux fixé par le décret prévu au même article L. 2224-7-1. (...) " Le code général des collectivités territoriales dispose à son article L. 2224-7-1 : " Les communes sont compétentes en matière de distribution d'eau potable. Dans ce cadre, elles arrêtent un schéma de distribution d'eau potable déterminant les zones desservies par le réseau de distribution. (...) Le schéma mentionné à l'alinéa précédent comprend notamment un descriptif détaillé des ouvrages de transport et de distribution d'eau potable. Lorsque le taux de perte en eau du réseau s'avère supérieur à un taux fixé par décret selon les caractéristiques du service et de la ressource, les services publics de distribution d'eau établissent, avant la fin du second exercice suivant l'exercice pour lequel le dépassement a été constaté, un plan d'actions comprenant, s'il y a lieu, un projet de programme pluriannuel de travaux d'amélioration du réseau. Le descriptif visé à l'alinéa précédent est établi avant la fin de l'année 2013. Il est mis à jour selon une périodicité fixée par décret (...) " et à son article D. 2224-5-1 : " Les valeurs des indices de connaissance et de gestion patrimoniale des réseaux d'eau potable et de collecte des eaux usées mentionnés aux annexes V et VI aux articles D. 2224-1, D. 2224-2 et D. 2224-3 rendent compte de la réalisation des descriptifs détaillés des réseaux. ".

3. Aux termes de l'article L. 213-11-7 du code de l'environnement : " En cas de défaut de déclaration, de déclaration tardive des éléments nécessaires à la détermination des redevances, lorsque la déclaration fait apparaître des éléments insuffisants, inexacts ou incomplets, ou en cas de taxation d'office en application des 2° et 3° du I de l'article L. 213-11-6, les redevances mises à la charge du contribuable sont assorties d'intérêts de retard et, le cas échéant, de majorations selon les modalités prévues en matière d'impôt sur le revenu par le code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 1er janvier de l'année au titre de laquelle les redevances sont dues. ". Le code général des impôts dispose à son article 1728 : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) " et à son article 1729 : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".

4. Il est constant que la société des eaux corses n'a fait parvenir l'information relative à l'ICGP que postérieurement au délai qui lui était imparti par la mise en demeure que lui a adressée l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse le 7 septembre 2015, et qui faisait elle-même suite à une mise en demeure du 17 juillet 2015 lui demandant de compléter cette information. Toutefois, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lyon, la société des eaux corses avait dument renseigné le formulaire général de déclaration des prélèvements, ainsi que la notice complémentaire y afférente, mais a seulement omis de renseigner, sur quatre contrats passés avec diverses collectivités, le complément relatif à cette information. Cette omission ne pouvait ainsi s'assimiler à un défaut total de production d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour la liquidation de la redevance au sens de l'article 1728 du code général des impôts. Par suite, l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse n'est fondée à soutenir ni qu'elle a fait une exacte application de ces dernières dispositions, ni que c'est à tort que les premiers juges ont retenu que l'omission litigieuse relevait des dispositions de l'article 1729 du même code, qui en l'absence de tout manquement délibéré de la part de la société des eaux corses ne pouvait justifier une majoration de 40 %.

Sur les conclusions relatives aux frais d'instance :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faisant obstacle à ce que soit mise à la charge de la société des eaux corses, qui n'est pas la partie perdante, une somme à ce titre, les conclusions de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse en ce sens doivent être rejetées.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse une somme de 2 000 euros qu'elle paiera à la société des eaux corses, au titre des frais non compris dans les dépens que cette dernière a exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse est rejetée.

Article 2 : L'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse versera une somme de 2 000 euros à la société des eaux corses en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse et à la société des eaux corses.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2020 à laquelle siégeaient :

Mme D... A..., présidente de chambre,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme C... F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2020.

No 18LY029022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY02902
Date de la décision : 17/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Parafiscalité - redevances et taxes diverses - Redevances.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Pierre THIERRY
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CABINET JL AVOCAT (SELARL)

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-17;18ly02902 ?
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