Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Green Village a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Collonges-sous-Salève a adopté son plan local d'urbanisme ainsi que la décision du 26 juin 2017 rejetant son recours gracieux contre cette délibération.
Par un jugement n° 1724926 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon, à qui a été transmise cette demande en vertu de l'ordonnance n° 430232 du 6 avril 2019 du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 19 novembre 2019, la société Green Village, représentée par la Selas Adamas-Affaires publiques, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2019, la délibération du 9 mars 2017 ainsi que la décision du 26 juin 2017 rejetant son recours gracieux ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Collonges-sous-Salève la somme de 4000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) ne fixe aucun objectif précis et chiffré en matière de consommation d'espace et de lutte contre l'étalement urbain, ni ne traite d'aucune des problématiques liées au développement des transports collectif, des loisirs et des communications numériques en méconnaissance de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme ; c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les auteurs du PLU ont opté pour l'application des dispositions du code de l'urbanisme antérieures à la loi ALUR du 24 mars 2014 ;
- le classement de la parcelle détenue par la société requérante en zone naturelle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 avril 2020, la commune de Collonges-sous-Salève, représentée par la Selarl CDMF Avocats Affaires publiques, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la cour mette en oeuvre l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 8 juillet 2020 par une ordonnance du 11 juin précédent en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... C..., première conseillère,
- les conclusions de Jean-Simon Laval, rapporteur public
- les observations de Me A... pour la société Green Village ainsi que celles de Me B... pour la commune de Collonges-sous-Salève ;
Considérant ce qui suit :
1. La société Green Village relève appel du jugement du 24 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Collonges-sous-Salève a adopté le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ainsi qu'à l'annulation de son recours gracieux contre cette délibération.
Sur la légalité de la délibération du 9 mars 2017 :
En ce qui concerne le contenu du PADD :
2. L'article L. 151-5, reprenant le troisième alinéa de l'article L. 123-1-3 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de l'article 139 de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, impose que les objectifs de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain, que devait fixer le PADD en l'état antérieur de ces dispositions, soient des objectifs chiffrés. L'article 139 de cette loi, dans sa rédaction résultant de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014, précise que : " Les organes délibérants des établissements publics ayant engagé l'élaboration, la révision ou la modification d'un plan local d'urbanisme avant la publication de la présente loi peuvent toutefois opter pour appliquer les mêmes articles L. 123-1-2 et L. 123-1-3 dans leur rédaction antérieure à la présente loi. Les plans locaux d'urbanisme élaborés ou révisés avant cette date, ainsi que ceux dont la procédure d'élaboration, de modification ou de révision est achevée après cette même date conformément aux dispositions applicables antérieurement à ladite date, sont mis en conformité avec lesdits articles L. 123-1-2 et L. 123-1-3 dans leur rédaction résultant de la présente loi lors de leur prochaine révision ".
3. Sans préjudice de l'application immédiate des dispositions issues de l'ordonnance du 23 septembre 2015 relative à la partie législative du livre 1er du code de l'urbanisme, entrée en vigueur le 1er janvier 2016, il résulte des dispositions transitoires de l'article 139 de la loi du 24 mars 2014, citées au point précédent, que les communes ayant engagé la procédure d'élaboration d'un PLU avant la publication de cette loi peuvent l'achever conformément aux dispositions antérieures de l'article L. 123-1-3 du code de l'urbanisme, à charge pour elles de mettre ce document en conformité avec les nouvelles dispositions de cet article lors de sa prochaine révision.
4. D'une part, l'absence de mention du caractère chiffré des objectifs de consommation foncière dans la délibération du 26 mars 2015 arrêtant le projet de PLU révèle par elle-même que les auteurs ont entendu, usant implicitement de la faculté offerte par ledit article 139, achever la procédure de révision du plan d'occupation des sols (POS) de Collonges-sous-Salève en vue de sa transformation en PLU, initiée par une délibération du 29 novembre 2012 et modifiée par une délibération du 19 septembre 2013, conformément aux dispositions antérieures à la loi du 24 mars 2014, sans qu'il puisse être tiré, contrairement à ce que soutient la société requérante, du seul usage du vocable " paysage " adjoint à la description du contenu réglementaire du PADD s'agissant des orientations générales des politiques et figurant dans cette même délibération l'intention contraire desdits auteurs. Ceux-ci doivent ainsi être regardés comme ayant exercé l'option prévue par les dispositions citées au point 2, dont il ne résulte pas qu'elle serait subordonnée à l'adoption d'une délibération spécifique à cet effet. Dans ces conditions, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de l'absence d'objectif chiffré de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain dans le PADD du PLU.
5. D'autre part, la société Green Village réitère en appel son moyen tiré de ce que le PADD ne traite d'aucune des problématiques liées au développement des transports collectifs, des loisirs et des communications numériques en méconnaissance de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme. Il doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus par les premiers juges.
En ce qui concerne le classement en zone naturelle de la parcelle de la requérante :
6. Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, codifié à compter du 1er janvier 2016 à l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. ". Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme indique, pour sa part, que la zone N correspond aux secteurs forestiers et naturels composant le territoire communal, d'une forte richesse environnementale, qu'il convient de préserver, incluant plusieurs secteurs dont le secteur N non indicé, défini comme un secteur forestier et naturel, et dont relève le terrain dont le classement est contesté.
7. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
8. Il ressort des pièces du dossier, que le parti d'aménagement retenu par les auteurs du PLU est, sur le secteur de " Collonges Coteau ", de limiter le développement urbain, à l'exception de certaines dents creuses précisément identifiées, dans une perspective de réduction de l'étalement urbain autour des hameaux traditionnels du coteau agricole et de recentrage de l'urbanisation dans le centre bourg.
9. La parcelle cadastrée section A n° 691 a été classée en zone naturelle. Il ressort des pièces du dossier que cette parcelle de 6 408 m² implantée dans le secteur de " Collonges Coteau ", le plus vaste de la commune, bien que desservie par les réseaux et voies de communication et bordée à l'est et au sud par une zone pavillonnaire, s'insère dans un ensemble de terrains à l'état naturel, qui se prolonge au-delà de la frontière avec la Suisse. Le classement de la parcelle litigieuse en zone N satisfait aux orientations générales du PLU et du plan d'aménagement et de développement durable (PADD) sans être incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Bassin Genevois, lequel prévoit de densifier l'urbanisation en priorité dans les secteurs identifiés dans le PLU, et ne procède dès lors pas d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation.
Sur les frais d'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la société requérante demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Green Village le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Collonges-sous-Salève, au titre des frais que la commune a exposés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Green Village est rejetée.
Article 2 : La société Green Village versera à la commune de Collonges-sous-Salève la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Green Village ainsi qu'à la commune de Collonges-sous-Salève.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Daniel Josserand-Jaillet, président ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme D... C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2020.
N° 19LY04299
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