Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Collonges-sous-Salève a adopté son plan local d'urbanisme ainsi que la décision rejetant son recours gracieux contre cette délibération.
Par un jugement n° 1724427 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon, à qui a été transmise cette demande en vertu de l'ordonnance n° 430232 du 6 avril 2019 du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 22 novembre 2019 et le 6 juillet 2020, M. D..., représenté par la Selarl BG Avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2019, la délibération du 9 mars 2017 ainsi que la décision rejetant son recours gracieux contre cette délibération ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Collonges-sous-Salève la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les modalités de concertation prévues n'ont pas été respectées s'agissant des trois réunions publiques annoncées ; les réunions antérieures au 19 septembre 2013 ne pouvaient être prises en compte pour la procédure d'élaboration du PLU en litige et trois des quatre réunions organisées ne pouvaient être qualifiées de publiques du fait d'un accès restreint des participants ;
- le classement des parcelles détenues par le requérant en zone naturelle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 mai 2020, la commune de Collonges-sous-Salève, représentée par la Selarl CDMF Avocats Affaires publiques conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la cour mette en oeuvre l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge du requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 22 juillet 2020 par une ordonnance du 6 juillet précédent en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... E..., première conseillère,
- les conclusions de Jean-Simon Laval, rapporteur public
- les observations de Me C... pour M. D... ainsi que celles de Me B... pour la commune de Collonges-sous-Salève ;
Considérant ce qui suit :
1. M. D... relève appel du jugement du 24 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Collonges-sous-Salève a adopté le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune ainsi qu'à l'annulation de son recours gracieux contre cette délibération.
Sur la légalité de la délibération du 9 mars 2017 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce, dispose que : " I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme / (...) ". Selon les dispositions du IV du même article, applicables au présent litige et désormais reprises à l'article L. 600-11 de ce code : " Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux I et II ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Collonges-sous-Salève a approuvé son plan local d'urbanisme par délibération du 3 juin 2010. Le conseil municipal a ensuite, par une délibération du 29 novembre 2012, prescrit la révision de ce document d'urbanisme, avec pour objectif, notamment, d'assurer un développement urbain maîtrisé et une valorisation du patrimoine naturel, et défini les modalités de la concertation au titre de cette procédure. Par un jugement du 11 juillet 2013, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 3 juin 2010. Suite à cette annulation, par une délibération du 19 septembre 2013, la commune a modifié la délibération du 29 novembre 2012, en lui donnant pour objet la prescription de la révision du plan d'occupation des sols et l'élaboration d'un nouveau plan local d'urbanisme, en précisant que les objectifs et les modalités de la concertation définis initialement demeuraient inchangés. La délibération du 29 novembre 2012 avait ainsi prévu l'organisation de trois réunions publiques d'information et de débat.
4. D'une part, la délibération du 19 mai 2016 par laquelle le conseil municipal a tiré le bilan de la concertation mentionne la tenue de quatre réunions publiques. Il ressort du bilan qui y était annexé que la première réunion, qui a eu lieu le 11 avril 2013 et qui était largement ouverte au public, visait à lancer la démarche de concertation et à présenter le contexte réglementaire et les enjeux du plan local d'urbanisme, et notamment les enjeux supra-communaux. La deuxième réunion, qui a eu lieu le 27 juin 2013 et qui est présentée dans le bilan de la concertation comme une " présentation en réunion publique restreinte " du travail des ateliers thématiques, ne saurait, par cet objet, être prise en compte au titre des réunions publiques prévues au titre de la concertation. La troisième réunion, qui a eu lieu le 13 octobre 2013 et qui visait à présenter le diagnostic élaboré entre les habitants de la commune ayant participé aux ateliers et le bureau d'étude en charge de l'élaboration du PLU, est identifiée comme une réunion publique sans référence à la moindre forme de restriction tant dans le document retraçant la concertation et en tirant le bilan que dans la délibération approuvant ce bilan. Enfin, la quatrième réunion, qui s'est tenue le 1er mars 2016 et dont il n'est pas contesté qu'elle était publique, a permis de présenter le projet d'aménagement et de développement durables, ainsi que les différents documents composant le document d'urbanisme.
5. D'autre part, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. Si la réunion publique du 11 avril 2013 s'est déroulée sur la base du PLU soumis à révision, avant son annulation et la reprise de la procédure avec l'ancien plan d'occupation des sols (POS) de la commune, cette première réunion avait uniquement pour objet de lancer la démarche de concertation et de présenter le contexte réglementaire et les enjeux du plan local d'urbanisme, notamment les enjeux supra-communaux, lesquels demeuraient identiques quel que soit le document en cause. En outre, les objectifs de la concertation ont été repris à l'identique par la délibération du 19 septembre 2013. Ces circonstances n'ont ainsi pu avoir une influence sur la procédure de concertation ni priver le public d'une garantie attachée à la concertation. Dans ces conditions, le moyen tiré de la non-conformité du nombre de réunions publiques à ce que prévoyaient initialement les modalités de concertation doit être écarté.
7. En second lieu, aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, codifié à compter du 1er janvier 2016 à l'article R. 151-24 du même code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : a) Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / b) Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / c) Soit de leur caractère d'espaces naturels. ". Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme indique, pour sa part, que la zone N correspond aux secteurs forestiers et naturels composant le territoire communal, d'une forte richesse environnementale, qu'il convient de préserver, incluant plusieurs secteurs dont le secteur N non indicé, défini comme un secteur forestier et naturel, et dont relève le terrain dont le classement est contesté.
8. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
9. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du PLU ont retenu, pour parti d'aménagement du secteur du Bas Collonges, une mutation du tissu urbain en favorisant la réalisation d'opérations de logements collectifs dans un esprit de mixité afin d'en faire une polarité structurante de la commune sans être en concurrence avec le bourg. A ce titre, le document graphique du projet d'aménagement et de développement durables identifie des tènements stratégiques pour y implanter les futurs projets d'urbanisation.
10. Les parcelles cadastrées section AC nos 566, 567, 568, 569 et 46 ont été classées en zone naturelle. Il ressort des pièces du dossier que ces parcelles, bien que desservies par les réseaux et voies de communication, s'insèrent dans une bande de terrains à l'extrémité Nord Est du secteur du Bas Collonges, à l'état naturel à l'exception des rares maisons individuelles éparses qui y sont implantées, bordés par la frontière suisse d'un côté, au-delà de laquelle s'étend un vaste espace à vocation naturelle et agricole, et par l'autoroute et une voie ferrée de l'autre côté. Ces parcelles ne figurent pas parmi les tènements stratégiques identifiés par les auteurs du PLU pour y accueillir une urbanisation future. Alors même qu'elles ne font pas partie des espaces naturels et paysagers à préserver concernés par l'orientation d'aménagement et de programmation n° 5 relative au patrimoine végétal à préserver et qu'elles ne présenteraient pas d'intérêt paysager propre ou de sensibilité naturelle spécifique, leur classement en zone N, qui satisfait aux orientations générales du PLU et du plan d'aménagement et de développement durable (PADD) sans être incompatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Bassin Genevois, lequel prévoit de densifier l'urbanisation en priorité dans les secteurs identifiés dans le PLU, ne procède dès lors pas d'une erreur manifeste d'appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions à fin d'annulation.
Sur les frais d'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. D... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Collonges-sous-Salève, au titre des frais que la commune a exposés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : M. D... versera à la commune de Collonges-sous-Salève la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... ainsi qu'à la commune de Collonges-sous-Salève.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Daniel Josserand-Jaillet, président ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme F... E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2020.
N° 19LY04262
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