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05/11/2020 | FRANCE | N°19LY04147

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 05 novembre 2020, 19LY04147


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 8 avril 2019 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a désigné le pays de renvoi, et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, outre une demande à fin d'injonction en réexamen de sa demande.

Par un jugement n° 1901149 lu le 27 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa d

emande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 nove...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 8 avril 2019 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a désigné le pays de renvoi, et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, outre une demande à fin d'injonction en réexamen de sa demande.

Par un jugement n° 1901149 lu le 27 août 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 novembre 2019 et le 13 juillet 2020, M. C..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, ainsi que le refus de titre, l'obligation de quitter le territoire français sans délai, la désignation du pays de renvoi, et l'interdiction de retour sur le territoire français ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Côte d'Or, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'inexactitude matérielle des faits, méconnaît le 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il établit son état de minorité à son placement auprès de l'aide sociale à l'enfance et de l'absence de caractère frauduleux de sa demande ;

- le refus de le régulariser méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par exception d'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de délai de départ volontaire est illégal par exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; il est entaché d'erreur de qualification juridique des faits ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'un vice de procédure à défaut pour le préfet de justifier de la régularité de la consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires ;

- la fixation du pays de destination est illégale par exception d'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire ; il ne peut être renvoyé au Mali s'il existe un doute sur sa nationalité malienne.

Par mémoire enregistré le 19 mai 2020, le préfet de la Côte d'Or, représenté par la Selarl Claisse, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requêté n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité malienne, qui affirme être né le 12 juin 1999 à Sibindy et serait, selon ses déclarations, entré irrégulièrement en France en août 2014, a fait l'objet, le 9 septembre 2014, d'une ordonnance aux fins de placement provisoire aux services de l'aide sociale à l'enfance de la Côte d'Or. Par arrêté du 8 avril 2019, le préfet de la Côte d'Or lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire (...), qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ", tandis qu'aux termes de l'article R. 313-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande : 1° les indications relatives à son état civil (...) " et qu'aux termes de l'article L. 111-6 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. " Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. "

3. A l'appui de sa demande de titre de séjour, M. C... a présenté une copie littérale d'acte de naissance n° 120 délivrée le 17 juin 2016 à Diakon (Mali) ainsi qu'une carte d'identité consulaire n° 6546/CG16, et sur la base desquels a été établi son passeport. Toutefois le préfet de la Côte d'Or se fonde sur un avis de la police aux frontières en ce qui concerne l'acte de naissance, qui précise que l'analyse technique ne peut s'effectuer que sur un document original et d'un rapport du 7 août 2018 de la cellule fraude documentaire de la direction zonale de la police aux frontières selon lequel la carte d'identité consulaire est entachée de falsification grossière, ce que confirme le courrier du 4 septembre 2020 de la direction interdépartementale de la police aux frontières, intégralement produit en défense. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des éléments versés au dossier, le préfet de la Côte d'Or a renversé la présomption de l'article 47 du code civil et a pu légalement considérer que les actes produits par M. C... à l'appui de sa demande de titre de séjour ne pouvaient être regardés comme établissant son état de minorité à la date de son placement sous protection judiciaire. Il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que les motifs du refus de titre seraient entachés d'erreur matérielle et méconnaîtraient les dispositions précitées du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., célibataire et sans charge de famille, est entré récemment en France. Par suite, le refus de le régulariser ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris et ne méconnaît pas les stipulations précitées. Par les mêmes motifs et en l'absence de circonstances particulières invoquées, la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. L'exception d'illégalité du refus de titre de séjour, pris en toutes ses branches, ainsi que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, directement invoqués contre l'obligation de quitter le territoire, doivent être écartés par les motifs des points 2 à 5.

Sur le refus de délai de départ volontaire :

7. En premier lieu, l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire, ainsi que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, directement invoqués contre le refus de délai de départ volontaire, doivent être écartés par les motifs des points 2 à 6.

8. En second lieu aux termes du II, 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) e) Si l'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien (...) un document d'identité ou de voyage ou s'il a fait usage d'un tel titre ou document ". M. C... ayant fait usage de document falsifié, sa situation relevait des dispositions précitées, lesquelles n'ont pas été méconnues.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français d'un an :

9. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger (...) / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ". Le refus de délai de départ volontaire suffisant à fonder l'interdiction de retour, en vertu de ces dispositions, la régularité de la consultation du fichier de traitement des antécédents judiciaires est dépourvue d'incidence sur sa légalité.

Sur la fixation du pays de destination :

10. En premier lieu, les exceptions d'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire, prises en toutes leurs branches, doivent être écartés par les motifs des points 2 à 6.

11. En second lieu, la remise en cause des documents d'état civil produits par M. C... se limite à son âge. Il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir qu'en désignant le Mali, le préfet de la Côte d'Or l'éloignerait d'office vers un État dont il n'aurait pas la nationalité.

12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministère de l'intérieur. Copie en sera transmise pour information au préfet de de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2020.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04147
Date de la décision : 05/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-05;19ly04147 ?
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