Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser une somme de 156 021,38 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices résultant des infections qu'elle a contractées au cours de sa prise en charge à l'hôpital Lyon Sud et de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon, outre les entiers dépens, la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1705665 du 22 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon a condamné les Hospices civils de Lyon à lui verser une somme de 3 116 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter 22 janvier 2019, a mis les frais et honoraires d'expertise à la charge de Mme A..., à hauteur de 450 euros, et à la charge de l'Etat, au titre de l'aide juridictionnelle, à hauteur de 550 euros, a mis à la charge des Hospices civils de Lyon le versement à Mme A... d'une somme de 540 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 mars 2019, Mme A..., représentée par la SCP Chavrier-Mouisset-Thouret-Tourne, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 1705665 du 22 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a condamné les Hospices civils de Lyon à l'indemniser des conséquences dommageables des infections nosocomiales dont elle a été atteinte, en ce qu'il a considéré que le caractère certain du lien de causalité entre ces infections et les séquelles dont elle est atteinte n'était pas établi, a limité la réparation de ses préjudices à la somme de 3 116 euros, a mis à sa charge les frais et honoraires d'expertise à hauteur de 450 euros et a limité la somme allouée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à 540 euros ;
2°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 156 021,38 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du jugement attaqué ;
3°) de déclarer l'arrêt à intervenir commun à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Isère ;
4°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon, outre les entiers dépens, une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre de la procédure de première instance, et une autre somme de 2 500 euros en application de ces mêmes dispositions, au titre de la procédure d'appel.
Elle soutient que :
- les deux infections qu'elles a contractées à la suite des interventions réalisées à l'hôpital Lyon Sud, les 26 juillet 2012 et 7 février 2013, présentent un caractère nosocomial et engagent la responsabilité sans faute des Hospices civils de Lyon ;
- la participation de ces infections aux séquelles visuelles dont elle est affectée a été évaluée par l'expert judiciaire à hauteur de 15 % de sorte que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, le caractère certain du lien de causalité entre ces infections et les séquelles visuelles dont elle est atteinte est avéré ; les constatations opérées par l'expert judiciaire ne sont pas remises en cause par le rapport médical critique produit par les Hospices civils de Lyon ; l'amélioration ponctuelle de son état de santé après la survenue des infections nosocomiales est due au fait qu'elle a été suivie par une autre équipe médicale ;
- elle a droit à la somme de 3 371,25 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire qu'elle a subi ;
- son déficit fonctionnel permanent, évalué à 55 %, sera indemnisé, compte tenu de ce qu'il est imputable à hauteur de 15 % à la survenue des infections nosocomiales, à hauteur de 41 250 euros ;
- les souffrances qu'elles a endurées, évaluées à 5 sur une échelle de 7 par l'expert, seront indemnisées, compte tenu de l'imputabilité de 15 % due aux infections nosocomiales, à hauteur de 3 750 euros ;
- elle a droit à la somme de 900 euros au titre du préjudice esthétique subi, en lien avec les infections nosocomiales ;
- le préjudice d'agrément qu'elle a subi, en lien avec les infections nosocomiales, sera évalué à la somme de 3 750 euros ;
- elle a subi une perte de gains professionnels consécutive aux infections nosocomiales à hauteur de 6 300,13 euros ;
- son préjudice d'incidence professionnelle, en lien avec les infections nosocomiales, est estimé à la somme de 96 000 euros ;
- elle a droit à la somme de 700 euros au titre des frais d'assistance qu'elle a exposés au cours de l'expertise.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2020, les Hospices civils de Lyon, représentés par Me Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, concluent au rejet de la requête et, subsidiairement, à ce que soit ordonnée une expertise médicale.
Ils soutiennent que :
- malgré les deux valves infectées, la patiente avait retrouvé une acuité visuelle supérieure à celle qu'elle présentait initialement ; il en résulte que les infections n'ont pu avoir d'incidence sur l'aggravation visuelle, laquelle n'est due qu'à l'évolution de la pathologie elle-même ; le caractère direct et certain du lien de causalité entre les infections nosocomiales et les séquelles visuelles de Mme A... n'est ainsi pas rapporté ;
- subsidiairement, la cour pourra ordonner une nouvelle mesure d'expertise si elle ne s'estime pas suffisamment informée ;
- le tribunal a fait une juste évaluation du déficit fonctionnel temporaire en l'indemnisant à hauteur de 416 euros ;
- le déficit fonctionnel permanent allégué n'est pas lié directement aux complications infectieuses ;
- les premiers juges ont fait une juste évaluation des souffrances endurées en accordant à Mme A... une somme de 1 000 euros ;
- le tribunal a statué ultra petita en accordant à la requérante une indemnité de 1 000 euros au titre du préjudice esthétique ; une indemnité de 900 euros pourra être allouée à ce titre ;
- le préjudice d'agrément allégué est en lien exclusif avec la pathologie initiale de Mme A... et non avec les complications infectieuses ; en outre, il n'est pas démontré la réalité de ce chef de préjudice ;
- le préjudice tiré des pertes de gains professionnels et le préjudice d'incidence professionnelle sont dépourvus de lien de causalité direct et certain avec les infections nosocomiales subies.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a ressenti, au cours de l'année 2010, des nausées, céphalées et vomissements, s'accompagnant de troubles visuels. Ces signes cliniques ont permis de diagnostiquer le 22 novembre 2010 une hypertension intracrânienne idiopathique, pour laquelle Mme A... a été prise en charge au sein de l'hôpital Lyon Sud, dépendant des Hospices civils de Lyon. Malgré la réalisation de trois ponctions lombaires évacuatrices et la prescription d'un traitement médicamenteux, l'état de santé de Mme A... a nécessité, face à l'aggravation des troubles ophtalmologiques, la réalisation d'un geste endo-vasculaire le 12 octobre 2011. La persistance des troubles visuels a conduit à la mise en place, le 1er juin 2012, d'une dérivation lombo-péritonéale, qui a été suivie d'une reprise chirurgicale le 26 juillet suivant, à la suite de difficultés de réglage de la valve. Une infection à un staphylocoque à coagulase négative a conduit à l'ablation de la valve le 18 août 2012 puis à une reprise chirurgicale pour permettre l'écoulement du liquide cérébro-spinal le 24 août 2012. En raison de la dégradation de l'acuité visuelle de Mme A..., une nouvelle dérivation lombo-péritonéale a été implantée le 9 janvier 2013 et a nécessité une reprise le 31 janvier 2013. Le 7 février 2013, une infection à staphylococcus aureus et à enterobacter cloacae est mise en évidence. Sur la demande de Mme A..., le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a désigné en qualité d'expert le professeur Nauti, neurochirurgien, qui a rendu son rapport le 26 juillet 2015. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon la condamnation des Hospices civils de Lyon à réparer les préjudices résultant des deux infections successives dont elle a été victime. Par jugement du 22 janvier 2019, ce tribunal a estimé que les infections contractées par Mme A... étaient d'origine nosocomiale et a condamné les Hospices civils de Lyon à verser à cette dernière la somme de 3 116 euros en réparation de ses préjudices. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses prétentions indemnitaires.
Sur les conclusions à fin d'appel en déclaration de jugement commun :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) L'intéressé ou ses ayants droit doivent indiquer, en tout état de la procédure, la qualité d'assuré social de la victime de l'accident ainsi que les caisses de sécurité sociale auxquelles celle-ci est ou était affiliée pour les divers risques. Ils doivent appeler ces caisses en déclaration de jugement commun ou réciproquement. A défaut du respect de l'une de ces obligations, la nullité du jugement sur le fond pourra être demandée pendant deux ans, à compter de la date à partir de laquelle ledit jugement est devenu définitif, soit à la requête du ministère public, soit à la demande des caisses de sécurité sociale intéressées ou du tiers responsable, lorsque ces derniers y auront intérêt (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la caisse doit être appelée en déclaration de jugement commun dans l'instance ouverte par la victime contre le tiers responsable, le juge étant, le cas échéant, tenu de mettre en cause d'office la caisse si elle n'a pas été appelée en déclaration de jugement commun. Mme A... est affiliée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère. Par suite, les conclusions tendant à ce que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, régulièrement mise en cause dans la présente instance et qui n'a pas produit, soit appelée en déclaration d'arrêt commun doivent être accueillies.
Sur la responsabilité des Hospices civils de Lyon :
3. Aux termes du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, les professionnels de santé et les établissements, services ou organismes dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins " sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". Ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère ne soit rapportée. Doit être regardée, au sens de ces dispositions, comme présentant un caractère nosocomial une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d'un patient et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, sauf s'il est établi qu'elle a une autre origine que la prise en charge.
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, que Mme A..., qui a subi deux interventions chirurgicales les 1er juin 2012 et 26 juillet 2012 en vue de la pose d'une valve de dérivation lombo-péritonéale, a présenté, le 28 juillet 2012, une inflammation de la cicatrice. Des prélèvements effectués le 28 juillet 2012 et le 18 août 2012 ont mis en évidence une infection sur la valve à un staphylocoque à coagulase négative qui a conduit à l'ablation complète de la dérivation et à une reprise de la cicatrice. Il ne résulte pas de l'instruction que cette infection était présente ou en incubation lors de l'hospitalisation de l'intéressée le 26 juillet 2012 au cours de laquelle le corps de la valve de dérivation mise en place le 1er juin 2012 a été changée en vue d'en faciliter le réglage. Il résulte notamment de l'expertise qu'aucun élément ne permet d'affirmer que cette infection par un germe endogène, qui au demeurant s'est manifestée très rapidement après l'acte chirurgical du 26 juillet 2012, aurait préexisté à la prise en charge de Mme A... à l'hôpital Lyon Sud. Ainsi, alors que les Hospices civils de Lyon n'établissent pas, ni même ne soutiennent, qu'elle a une autre origine que la prise en charge de l'intéressée, cette infection doit être regardée comme présentant un caractère nosocomial. Par suite et dès lors qu'aucune cause étrangère n'est invoquée, elle est, comme l'a jugé le tribunal, de nature à engager la responsabilité des Hospices civils de Lyon.
5. En second lieu, Mme A... a subi une nouvelle dérivation lombo-péritonéale le 9 janvier 2013, qui a nécessité le 31 janvier 2013 un repositionnement du cathéter spinal en raison d'une extériorisation partielle de celui-ci dans les masses musculaires avec constitution d'un méningocèle. Il résulte de l'expertise que Mme A... a été victime, à la suite de cette intervention, d'une méningite à staphylococcus aureus et à enterobacter cloacae avec écoulement au niveau de la cicatrice lombaire. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise, que cette infection à des germes endogènes dont a été victime Mme A..., qui a nécessité que le système de dérivation mis en place soit ôté le 7 février 2013, ne préexistait pas à la prise en charge médicale dont elle a fait l'objet à l'hôpital Lyon Sud. Cette infection n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci et n'a pas une autre origine que cette prise en charge, ce que ne contestent d'ailleurs pas les Hospices civils de Lyon. Par suite, elle présente le caractère d'une infection nosocomiale au sens des dispositions citées au point 3.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à demander la condamnation des Hospices civils de Lyon à réparer les conséquences dommageables directement imputables aux deux épisodes d'infections nosocomiales dont elle a été victime.
Sur l'imputabilité aux infections nosocomiales des troubles visuels subis par Mme A... :
7. En l'absence de certitudes médicales permettant d'affirmer ou d'exclure qu'un dommage corporel survenu au cours ou dans les suites d'un acte de soins est imputable à cet acte, il appartient au juge, saisi d'une demande indemnitaire sur le fondement des dispositions citées au point 3, de se fonder sur l'ensemble des éléments pertinents résultant de l'instruction pour déterminer si, dans les circonstances de l'affaire, cette imputabilité peut être retenue.
8. Mme A... fait valoir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a estimé que le lien de causalité entre les infections nosocomiales dont elle a été victime et les séquelles visuelles dont elle demeure atteinte n'était pas certain dès lors que, selon les conclusions de l'expert médical, ces séquelles définitives sont imputables à hauteur de 15 % aux infections en cause, en ce qu'elles l'ont privée de la mise en place d'une dérivation lombo-péritonéale qui constitue le traitement le plus efficace, selon les données de la science, contre l'hypertension intracrânienne. Toutefois, il résulte de l'instruction, notamment de cette même expertise que, compte tenu de sa forme sévère, l'hypertension intracrânienne idiopathique dont est affectée la requérante était peu susceptible de connaître une amélioration significative et durable et que l'aggravation de l'état de santé de Mme A... en lien direct avec ces infections n'a été que temporaire. Malgré les thérapeutiques et traitements mis en place, l'acuité visuelle de Mme A... a connu une nouvelle dégradation constatée le 3 mai 2012. Si, à la suite de la maîtrise du premier épisode infectieux qui a nécessité d'ôter le 18 août 2012 la dérivation lombo-péritonéale précédemment mise en place, les troubles visuels se sont de nouveau aggravés, l'acuité visuelle de la requérante, constatée le 14 février 2013, est demeurée stable à la suite de l'ablation le 7 février 2013 de la nouvelle tentative de dérivation consécutivement au second épisode infectieux, qui a été maîtrisé par un traitement antibiotique. L'expert a ensuite relevé qu'en septembre 2013, une évolution visuelle favorable et une légère amélioration du champ visuel de Mme A... avaient été constatées avant une nouvelle dégradation progressive de la fonction visuelle de Mme A... jusqu'à une stabilisation à la date du 14 mars 2014. Enfin, il résulte des conclusions de l'expertise que les troubles visuels de l'intéressée, sévères d'emblée, se sont révélés résistants à tous les traitements entrepris, y compris à la dernière dérivation liquidienne ventriculo-atriale, réalisée le 13 août 2013. Compte tenu de cette évolution de la vision de Mme A... liée à sa pathologie, notamment de la dégradation progressive de son acuité visuelle malgré quelques évolutions ponctuelles légèrement favorables résultant des traitements mis en place, il ne résulte pas de l'instruction que les troubles visuels définitifs dont elle est affectée seraient liés directement, même partiellement, aux complications infectieuses dont elle a été victime à la suite des deux tentatives de mise en place d'une dérivation lombo-péritonéale. Il suit de là que seuls sont indemnisables les préjudices directement et certainement imputables aux deux épisodes infectieux, à l'exclusion de ceux qui peuvent être imputés à l'évolution de la pathologie initiale de la patiente.
Sur l'évaluation des préjudices :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise, que Mme A... a été hospitalisée, en conséquence des deux infections nosocomiales qu'elle a contractées, du 17 au 28 août 2012, d'une part, et du 7 au 9 février 2013, d'autre part, et qu'au cours de ces deux périodes d'hospitalisation, elle a subi un déficit fonctionnel temporaire total. Un traitement antibiotique destiné à maîtriser les infections a été administré à l'intéressée après chacun des épisodes infectieux. En allouant à la requérante une somme de 416 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire en lien avec les infections nosocomiales, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice.
10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les douleurs endurées par Mme A... ont été globalement évaluées à 5, sur une échelle de 1 à 7, et qu'une faible part de ces souffrances est imputable aux infections nosocomiales. Dans ces conditions, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation insuffisante de ce chef de préjudice en l'estimant à 1 000 euros.
11. En troisième lieu, l'expert a évalué le préjudice esthétique subi par Mme A... à 3 sur une échelle de 1 à 7 du fait des cicatrices multiples, mais a estimé que seule une petite partie de ce préjudice était imputable aux complications infectieuses. Eu égard au jeune âge de la requérante, née en 1987, et aux cicatrices en lien avec les infections subies, le tribunal administratif a, en fixant à 1 000 euros le montant de ce préjudice, fait une évaluation qui n'est pas insuffisante et n'a pas statué au-delà des conclusions dont il était saisi, dès lors que le montant total des sommes allouées à la requérante n'excédait pas le montant total des sommes demandées par elle.
12. En quatrième lieu, les frais de médecin conseil de 700 euros exposés par Mme A... à l'occasion de l'expertise et dont elle justifie par la production de la facture correspondante, doivent être mis à la charge des Hospices civils de Lyon.
13. En cinquième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 8, l'aggravation de l'état de santé de Mme A... en lien direct avec les infections nosocomiales en cause n'a été que temporaire. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait subi un déficit fonctionnel permanent imputable à ces infections.
14. En sixième lieu, s'il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise, que Mme A..., du fait de ses troubles visuels, subit un préjudice d'agrément, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que ces troubles dont elle demeure affectée sont sans lien direct avec les infections nosocomiales qu'elle a contractées lors de sa prise en charge. Ainsi, ce chef de préjudice doit être écarté.
15. En septième lieu, Mme A... fait valoir qu'après déduction des indemnités journalières qui lui ont été versées, elle a subi une perte de gains professionnels à hauteur de 6 300,13 euros, en raison de ses arrêts de travail puis de son placement en mi-temps thérapeutique consécutifs à chacun des deux épisodes infectieux. Toutefois, il résulte de l'ensemble de ses bulletins de salaire au titre des années 2012 et 2013 produits par la requérante, à la suite d'une mesure d'instruction effectuée par la cour, qu'elle était déjà placée en mi-temps thérapeutique au mois de février 2012, soit avant le premier épisode infectieux, et percevait alors un salaire mensuel de base de 734,45 euros. La perte de gains alléguée, du fait des arrêts de travail rendus nécessaires par les deux infections nosocomiales contractées par Mme A... a été intégralement réparée par les indemnités journalières qui lui ont été versées par la caisse d'assurance maladie de l'Isère, à hauteur d'un montant journalier de 25,82 euros. Par suite, Mme A... n'établit pas avoir supporté un préjudice économique en lien avec les infections en cause.
16. En dernier lieu, si Mme A... fait valoir qu'elle a été licenciée pour inaptitude le 3 novembre 2014 en raison de ses troubles de la vue et que, du fait de ces troubles, sa perspective de retrouver un emploi est limitée, il résulte de l'instruction qu'aucune séquelle n'est imputable aux infections nosocomiales, celles-ci n'ayant pas aggravé les troubles visuels de la requérante. Par suite, Mme A..., qui n'établit pas le lien de causalité entre l'incidence professionnelle de ses troubles visuels et les deux infections nosocomiales, n'est pas fondée à solliciter une somme au titre de l'incidence professionnelle.
17. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a limité à 3 116 euros la somme qu'il a condamné les Hospices civils de Lyon à lui verser et l'a assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de ce jugement.
Sur les dépens :
18. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens ".
19. Il y a lieu, en l'espèce, de mettre les frais de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 1 000 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Lyon du 22 septembre 2015, à la charge définitive des Hospices civils de Lyon.
Sur les frais exposés par Mme A... devant le tribunal administratif :
20. Dans la mesure où Mme A... avait obtenu en première instance le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 55 %, le tribunal administratif n'a pas fait une inexacte appréciation du montant des frais exposés en première instance par l'intéressée en condamnant les Hospices civils de Lyon à lui payer la somme de 540 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de l'instance d'appel :
21. D'une part, Mme A... n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée en appel. D'autre part, l'avocat de Mme A... n'a pas demandé que lui soit versée par les Hospices civils de Lyon la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamée à sa cliente si celle-ci n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.
Article 2 : Les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 000 euros, sont mis à la charge définitive des Hospices civils de Lyon.
Article 3 : L'article 2 du jugement n° 1705665 du tribunal administratif de Lyon du 22 janvier 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., aux Hospices civils de Lyon, à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 5 novembre 2020.
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N° 19LY00910