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24/09/2020 | FRANCE | N°18LY02741

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 24 septembre 2020, 18LY02741


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 4 juillet 2016 du conseil municipal de la ville de Lyon attribuant une subvention d'investissement d'un montant de 1 000 000 d'euros à l'association Institut français de civilisation musulmane (IFCM) pour la construction d'un bâtiment destiné à accueillir cet institut, approuvant la convention à conclure et autorisant son président à la signer.

Par un jugement n° 1606710 du 14 juin 2018, le tribunal a rejeté sa

demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 4 juillet 2016 du conseil municipal de la ville de Lyon attribuant une subvention d'investissement d'un montant de 1 000 000 d'euros à l'association Institut français de civilisation musulmane (IFCM) pour la construction d'un bâtiment destiné à accueillir cet institut, approuvant la convention à conclure et autorisant son président à la signer.

Par un jugement n° 1606710 du 14 juin 2018, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler la délibération contestée ;

2°) de mettre à la charge de la ville de Lyon la somme de 3 000 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt à agir en qualité de contribuable de la ville de Lyon ;

- la délibération contestée a été adoptée dans des conditions irrégulières, faute de comporter le nom des élus participants et le résultat des votes ;

- elle méconnaît l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 puisque l'IFCM, en dépit de ses statuts, participe à l'exercice du culte musulman à Lyon et l'intérêt public local de le subventionner n'est pas démontré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2018, la ville de Lyon, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- l'appelant ne justifie pas d'un intérêt à agir en l'absence de preuve de sa qualité de contribuable de la ville de Lyon ;

- les moyens qu'il soulève ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 décembre 2018, l'instruction a été close au 15 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., pour la ville de Lyon.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 4 juillet 2016 du conseil municipal de la ville de Lyon attribuant une subvention d'investissement d'un montant de 1 000 000 euros à l'association Institut français de civilisation musulmane (IFCM) pour la construction du bâtiment destiné à accueillir cet institut, approuvant la convention à conclure et autorisant son président à la signer. Par un jugement du 14 juin 2018 dont il relève appel, le tribunal a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, si les dispositions de l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales imposent que le registre des délibérations comporte le nom des votants et l'indication du sens de leur vote lorsque le vote a lieu au scrutin public à la demande du quart des membres présents, il ressort des pièces du dossier que la délibération contestée n'a pas été votée au scrutin public.

3. En second lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public ". L'article 2 de cette loi dispose que : " La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l'exercice des cultes (...) ". Enfin, aux termes du dernier alinéa de l'article 19 de cette même loi, les associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice d'un culte en vertu du titre IV de cette loi " ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l'Etat, des départements et des communes. Ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations aux édifices affectés au culte public, qu'ils soient ou non classés monuments historiques ".

4. Il résulte des dispositions précitées de la loi du 9 décembre 1905 que les collectivités territoriales ne peuvent accorder aucune subvention, à l'exception des concours pour des travaux de réparation d'édifices cultuels, aux associations cultuelles au sens du titre IV de cette loi. Il leur est également interdit d'apporter une aide quelconque à une manifestation qui participe de l'exercice d'un culte. Elles ne peuvent accorder une subvention à une association qui, sans constituer une association cultuelle au sens du titre IV de la même loi, a des activités cultuelles, qu'en vue de la réalisation d'un projet, d'une manifestation ou d'une activité qui ne présente pas un caractère cultuel et n'est pas destiné au culte et à la condition, en premier lieu, que ce projet, cette manifestation ou cette activité présente un intérêt public local et, en second lieu, que soit garanti, notamment par voie contractuelle, que la subvention est exclusivement affectée au financement de ce projet, de cette manifestation ou de cette activité et n'est pas utilisée pour financer les activités cultuelles de l'association.

5. Pour être qualifiée d'association cultuelle au sens du titre IV de cette loi, une association doit avoir exclusivement pour objet l'exercice d'un culte, c'est-à-dire la célébration de cérémonies organisées en vue de l'accomplissement, par des personnes réunies par une même croyance religieuse, de certains rites ou de certaines pratiques, et ne doit mener que des activités en relation avec cet objet, telles que l'acquisition, la location, la construction, l'aménagement et l'entretien des édifices servant au culte ainsi que l'entretien et la formation des ministres et autres personnes concourant à l'exercice du culte.

6. L'IFCM est une association à vocation culturelle qui a pour objet de faire connaître la civilisation musulmane et la valoriser, favoriser les échanges culturels et contribuer à l'éducation. Elle a mené depuis sa création en 2007 des actions " hors les murs " en partenariat avec, notamment, l'université Lyon 3 et l'université catholique de Lyon, ainsi que la préfecture du Rhône. Elle a souhaité édifier un bâtiment pour y proposer des activités culturelles pluridisciplinaires en partenariat avec d'autres équipements culturels locaux. Ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges, l'implantation du bâtiment à proximité de la grande mosquée de Lyon et la circonstance que le recteur de cette dernière préside l'association IFCM n'établissent pas l'exercice par celle-ci d'activités cultuelles pour lesquelles elle ne disposera pas d'espace propre. Au demeurant et d'une part, le soutien de la ville de Lyon à la construction de ce bâtiment, qui s'inscrit dans le cadre de l'action municipale d'aide au patrimoine et lieux culturels, présente un intérêt public municipal. D'autre part, le versement de la subvention accordée s'accompagne de la conclusion d'une convention permettant de garantir qu'elle sera exclusivement affectée au financement du projet immobilier. Les dispositions précitées de la loi du 9 décembre 1905 ne faisaient donc pas obstacle à ce que la ville de Lyon attribue selon ces modalités une subvention à l'IFCM pour édifier un bâtiment devant accueillir ses activités.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu en revanche, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative du code de justice administrative, de mettre à sa charge la somme de 1 000 euros à verser à la ville de Lyon.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera la somme de 1 000 euros à la ville de Lyon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et à la ville de Lyon.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme C..., président assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 septembre 2020.

2

N° 18LY02741


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-04-03-04 Collectivités territoriales. Commune. Finances communales. Recettes. Subventions.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SELARL PAILLAT CONTI et BORY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 24/09/2020
Date de l'import : 18/10/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18LY02741
Numéro NOR : CETATEXT000042409308 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-09-24;18ly02741 ?
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