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07/09/2020 | FRANCE | N°19LY00753

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 07 septembre 2020, 19LY00753


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1606710 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 février 2019, M. B..., représenté par Me F..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2018 ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1606710 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 février 2019, M. B..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 décembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. B... soutient que :

- c'est à tort que l'administration a considéré qu'il avait la qualité de résident fiscal français ;

- les revenus en litige ne peuvent être imposés en France en application de l'article 28 de la convention fiscale conclue entre la France et la Tunisie.

Par un mémoire enregistré le 30 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

-la convention fiscale conclue entre la France et la Tunisie le 28 mai 1973 ;

- la loi n° 76-1234 du 29 décembre 1976 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme I..., rapporteure publique,

- et les observations de Me F..., représentant M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2009, 2010 et 2011 à l'issue duquel il a été assujetti à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2010 et 2011 consécutifs, d'une part, à l'imposition, selon la procédure contradictoire, de produits d'assurance-vie et de pensions de retraite et, d'autre part, à la taxation d'office de revenus dont l'origine est demeurée indéterminée, pour des montants de 33 388 euros en 2010 et 58 835 euros en 2011, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales qui autorisent le recours à cette procédure lorsque le contribuable s'est abstenu de répondre aux demandes de justifications adressées par l'administration fiscale. M. B... relève appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des majorations correspondantes.

2. M. B... soutient que l'article 28 de la convention fiscale conclue entre la France et la Tunisie le 28 mai 1973 fait obstacle à ce qu'il soit imposé en France à raison de revenus d'origine indéterminée, dès lors qu'il a la qualité de résident tunisien.

3. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer, en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office, si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.

4. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus ". Aux termes du 1 de l'article 4 B du même code : " Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'ils ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques ". Pour l'application des dispositions du a du 1 de l'article 4 B précité, telles qu'éclairées par les travaux préparatoires de la loi 76-1234 du 29 décembre 1976 d'où elles sont issues, le foyer d'un contribuable célibataire, sans charge de famille, s'entend du lieu où il habite normalement et a le centre de sa vie personnelle, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles.

5. Il résulte de l'instruction que M. B... a souscrit au titre des années 2010 et 2011 des déclarations de revenus indiquant qu'il était domicilié en France 6 rue Claude Kogan à Moirans (Isère), chez Mme G... D..., qui était sa co-associée au sein de la SCI La Rose des Sables dont le siège était également situé 6 rue Claude Kogan à Moirans. M. B... a indiqué à différents organismes tiers, tels que les établissements de la BNP Paribas, de la Banque Populaire et d'Allianz auprès desquels il a ouvert des comptes bancaires en France, être domicilié 6 rue Claude Kogan à Moirans. Il a également attesté, dans le cadre d'une demande d'aide au logement adressée à la caisse d'allocations familiales de l'Isère, résider à cette adresse et déclaré qu'elle constituait sa résidence principale. Il résulte en outre de l'instruction et, notamment, des relevés des comptes bancaires de l'intéressé, que ce dernier effectuait régulièrement des retraits et des dépôts d'espèces sur ses comptes bancaires en France, et qu'il percevait des pensions de retraite de source française qui constituaient l'essentiel des revenus déclarés. Dans ces conditions, M. B..., qui habitait normalement en France et y avait le centre de sa vie personnelle, doit être regardé comme ayant eu son domicile fiscal en France, au sens du a du 1 de l'article 4 B du code général des impôts, au titre des années en litige, alors même qu'il était, au titre des mêmes années, propriétaire d'un immeuble en Tunisie, qu'il était titulaire de comptes bancaires dans ce pays et qu'il y effectuait des séjours réguliers dont il n'est pas établi qu'ils ne seraient pas que temporaires à raison d'une activité professionnelle. Par suite, le requérant était, sauf stipulation contraire de la convention fiscale franco-tunisienne, passible, au titre des années en cause, de l'impôt sur le revenu en France sur le fondement des dispositions précitées des articles 4 A et 4 B du code général des impôts.

6. Aux termes de l'article 1er de la convention fiscale conclue entre la France et la Tunisie le 28 mai 1973 : " 1. La présente convention s'applique aux personnes qui sont des résidents d'un Etat contractant ou de chacun des deux Etats. (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même convention : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue ". Et aux termes de l'article 28 de la même convention : " Les éléments du revenu d'un résident d'un Etat contractant qui ne sont pas expressément mentionnés dans les articles précédents de la présente Convention ne sont imposables que dans cet Etat. "

7. M. B... soutient qu'il a la qualité de résident de Tunisie au sens de la convention fiscale franco-tunisienne du 28 mai 1973. Toutefois, si M. B... a fait l'objet en 2015 d'une procédure de taxation d'office des autorités fiscales tunisiennes, il résulte de l'instruction que seule la plus-value réalisée lors de la cession, le 26 mars 2011, d'un bien immobilier situé 5 rue El Khartoum, Gammarth supérieur à La Marsa (Tunisie), a été imposée. Aucune pièce du dossier ne permet d'établir que M. B... aurait été effectivement assujetti à l'impôt en Tunisie en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue au titre des années 2010 et 2011 et non en raison de la seule existence de revenus trouvant leur source en Tunisie. Dès lors que M. B... n'avait pas la qualité de résident de Tunisie, l'article 28 de la convention fiscale franco-tunisienne ne faisait pas obstacle à l'imposition du requérant en France à raison de revenus d'origine indéterminée.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié M. E... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme J..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 septembre 2020.

2

N° 19LY00753


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00753
Date de la décision : 07/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-01-05 Contributions et taxes. Généralités. Textes fiscaux. Conventions internationales.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-09-07;19ly00753 ?
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