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07/09/2020 | FRANCE | N°18LY04164

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 07 septembre 2020, 18LY04164


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à sa charge au titre des années 2011 et 2012 pour un montant de 457 745 euros en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1603482 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 novembre 2018, M. A..., représenté par la SELARL Nomodos, demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 septembre 2018 ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à sa charge au titre des années 2011 et 2012 pour un montant de 457 745 euros en droits et pénalités.

Par un jugement n° 1603482 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 novembre 2018, M. A..., représenté par la SELARL Nomodos, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 septembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens et la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'appréhension des revenus réputés distribués par la SARL le Bowling de Beaune car les éléments sur lesquels elle se fonde ne démontrent pas qu'il était maître de l'affaire ;

- aucun élément ne permettant de justifier qu'il a été le bénéficiaire de ces sommes, l'administration aurait dû imposer ces sommes auprès des bénéficiaires réels sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts après avoir fait application des dispositions de l'article 117 du code général des impôts ;

- l'administration ne pouvait appliquer la majoration d'assiette de 25 % prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts aux revenus de capitaux mobiliers correspondant aux revenus réputés distribués eu égard à la décision du Conseil constitutionnel QPC n° 2017-643/650 ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve d'un manquement délibéré justifiant l'application d'une pénalité de 40 % ;

- l'application de la majoration au titre de l'année 2012 est irrégulière car en méconnaissance de l'article L. 80-E du livre des procédures fiscales, le courrier du 24 août 2015 par lequel l'administration lui a adressé les nouvelles conséquences financières du contrôle ne comprend pas le visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire alors que la base des redressements sur laquelle la pénalité est fondée a été modifiée.

Par un mémoire, enregistré le 28 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que :

- conformément à la décision du Conseil constitutionnel du 7 juillet 2017, un dégrèvement d'une partie des contributions sociales a été prononcé ;

- les autres moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G..., première conseillère,

- et les conclusions de Mme F..., rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui était gérant et associé majoritaire de la SARL du Bowling de Beaune, laquelle exploitait un bowling et une discothèque, et associé de la SARL Le Vogue, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2011 et 2012. A l'issue de ce contrôle, et des vérifications de comptabilité de ces sociétés auxquelles il a été procédé concomitamment, l'intéressé a été assujetti, au titre des années 2011 et 2012, à des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de la réintégration dans ses revenus imposables de revenus réputés distribués par la SARL du Bowling de Beaune en 2011 et en 2012 et de sommes portées au crédit de ses comptes courants d'associé dans les deux sociétés, notifiés selon la procédure contradictoire et de la taxation d'office de revenus d'origine indéterminée. Les droits procédant de l'imposition des revenus réputés distribués et de la taxation des revenus d'origine indéterminée ont été assortis de la majoration de 40 % prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts tandis que les autres rectifications ont été assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. M. A... relève appel du jugement du 25 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande de décharge de ces compléments d'impôts et de contributions sociales, des majorations correspondantes et des intérêts de retard.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 28 mai 2019 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques de la région Bourgogne Franche-Comté a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'un montant total de 21 354 euros, des compléments de contributions sociales établis au titre des années 2011 et 2012. Ce dégrèvement correspond à une réduction en base des contributions sociales de 34 382 euros en 2011 et de 62 918 euros en 2012. Ce faisant, l'administration a fait droit au moyen tiré de l'application de la décision du Conseil constitutionnel invoqué en appel de M. A.... Si, dans la requête, M. A... a évoqué des bases d'un montant supérieur et, par suite, des réductions en base supérieures, il résulte de l'instruction qu'il s'agit des bases notifiées initialement et qu'elles avaient été ramenées à 171 911 euros pour l'année 2011 et 314 588 euros pour l'année 2012 après recours hiérarchique. Les conclusions de la requête de M. A... relatives aux contributions sociales sont, dans la mesure des dégrèvements ainsi prononcés, devenues sans objet sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de l'application de la décision du Conseil constitutionnel.

Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

3. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ". M. A... qui n'a pas retiré au bureau de poste le pli recommandé contenant la proposition de rectification du 18 novembre 2014, lequel a ensuite été retourné au service avec la mention " non réclamé ", doit être regardé comme l'ayant réceptionné à la date de première présentation à son adresse personnelle et du dépôt d'un avis de mise en instance, soit le 19 novembre 2014. Si M. A... a contesté les rectifications ainsi proposées, il n'a présenté ses observations que le 16 février 2015, soit après l'expiration du délai de trente jours qui lui était imparti. M. A..., qui ne conteste pas l'existence et le montant des revenus réputés distribués, supporte ainsi la charge de la preuve de l'absence d'appréhension de ces sommes.

4. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices ".

5. La SARL Bowling de Beaune, qui exploitait un bowling et une discothèque à Beaune, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2011 et en 2012, à l'issue de laquelle le vérificateur a constaté des omissions de recettes, pour des montants respectifs de 136 075 et 213 294 euros ramenés, après recours hiérarchique, à 130 485 et 202 212 euros, qu'il a réintégrées aux résultats de la société qui sont demeurés déficitaires après les rehaussements. L'administration fiscale a imposé ces recettes omises entre les mains de M. A... en tant que revenus distribués sur le fondement du 2° précité de l'article 109-1 du code général des impôts en retenant, pour justifier qu'il avait appréhendé ces sommes, la seule circonstance que M. A... était le seul maître de l'affaire. M. A... fait valoir qu'il n'est pas le seul maître de l'affaire et soutient, sans être contredit, que plusieurs personnes avaient accès aux caisses de la discothèque et du bar de l'établissement.

6. La circonstance que le contribuable que l'administration entend imposer sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts consécutivement aux rehaussements des résultats d'une société qui n'ont pas donné lieu à l'établissement d'une cotisation d'impôt sur les sociétés en l'absence de solde bénéficiaire soit maître de l'affaire est sans incidence pour établir que les sommes correspondantes ont été mises à disposition des associés, actionnaires ou porteurs de part. Dans ces conditions, alors que l'administration s'est exclusivement fondée sur cette circonstance pour justifier l'appréhension des sommes litigieuses par M. A... et leur imposition sur le fondement du 2° de l'article 109-1 du code, M. A... doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, compte tenu des éléments qu'il a par ailleurs fait valoir, de ce qu'il n'a pas appréhendé les sommes en cause. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens se rapportant à ce chef de redressement, M. A... est fondé à demander la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de la réintégration dans ses revenus imposables des années 2011 et 2012 des sommes de, respectivement, 136 075 euros et 213 294 euros correspondant aux omissions de recettes de la SARL du Bowling de Beaune, ainsi que, par voie de conséquence, de la majoration de 40 % s'y rapportant et des intérêts de retard correspondants.

En ce qui concerne les pénalités :

7. Les compléments d'impôt sur le revenu résultant de la taxation des revenus d'origine indéterminée ont été assortis de la majoration de 40 % prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts tandis que les rectifications résultant des sommes inscrites sur le compte courant de M. A... ont été assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du même code.

8. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales, la décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités.

9. Il ressort des pièces du dossier que la proposition de rectification du 18 novembre 2014, qui comportait la motivation des majorations pour manquement délibéré mises en recouvrement, a été visée par un agent ayant le grade d'inspecteur principal. Si, par courrier du 24 août 2015, l'administration, qui a décidé à l'issue du recours hiérarchique de réduire les bases d'imposition de l'intéressé et, par voie de conséquence, de réduire à due proportion les pénalités, a adressé à M. A... les nouvelles conséquences financières du contrôle, elle n'a pas ainsi modifié la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités qu'elle se proposait d'appliquer. Par suite, ce courrier n'avait pas à être à nouveau visé par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal.

10. En second lieu, M. A... reprend en appel le moyen qu'il avait invoqué en première instance et tiré de ce que l'administration n'ayant pas établi son intention délibérée d'éluder l'impôt, elle ne pouvait lui infliger de pénalités sur le fondement du a) de l'article 1729 du code général des impôts. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.

11. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que, sous réserve des dégrèvements prononcés en cours d'instance, M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de la réintégration dans ses revenus imposables des revenus réputés distribués par la SARL du Bowling de Beaune en 2011 et en 2012, ainsi que, par voie de conséquence, de la majoration de 40 % s'y rapportant et des intérêts de retard correspondants.

Sur les frais liés au litige :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 21 354 euros, en ce qui concerne les compléments de contributions sociales auxquels M. A... a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et les pénalités correspondantes, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.

Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales assignées à M. A... au titre des années 2011 et 2012 sont réduites de, respectivement, 130 485 euros et de 202 212 euros.

Article 3 : M. A... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 correspondant à la réduction de ses bases d'imposition définie à l'article 2 ci-dessus, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme C..., présidente-assesseure,

Mme G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 7 septembre 2020.

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N° 18LY04164

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