Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... F... et Mme D... G... épouse F... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 mars 2019 par laquelle le préfet de l'Ain a refusé de leur délivrer un document de circulation pour enfant mineur étranger et d'enjoindre au préfet de l'Ain de réexaminer leur demande et de leur délivrer un document de circulation pour étranger mineur dans un délai d'un mois à compter du jugement sous astreinte de 80 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1903707 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 février 2020, M. A... F... et Mme D... G... épouse F..., représentés pas Me B..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 15 mars 2019 du préfet de l'Ain;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de réexaminer la demande et de délivrer un document de circulation pour enfant mineur étranger dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de leur demande dans le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision méconnaît l'article L. 321-4 et l'article D. 321-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que ce régime général s'applique aux mineurs algériens, l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ne prévoyant pas cette catégorie ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'ils se sont mariés le 10 août 2004 en Algérie et qu'ils sont tous deux de nationalité française ; le département de l'Ain les a autorisés à accueillir un enfant dans le cadre d'une kafala ; ils ont eu la chance, en Algérie, de recueillir un petit garçon, pupille de l'Etat algérien, par acte de kafala judiciaire du 22 juillet 2018 ; le 22 septembre 2018, ils sont revenus en France avec l'enfant, entré régulièrement avec un visa délivré par le consulat général de France à Annaba le 13 septembre 2018 ; le visa de l'enfant est expiré ; l'enfant peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un document de circulation pour enfant mineur étranger valable cinq ans.
Par un mémoire, enregistré le 5 juin 2020, le préfet de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'article D. 313-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été abrogé le 2 mars 2019 par le décret du 28 février 2019 ; ces dispositions qui ne constituent pas des règles de procédure ne peuvent être invoqués par les requérants ;
- l'enfant recueilli n'est pas entré en France sous couvert d'un visa d'une durée supérieure à trois mois et le visa porte la mention " visiteur " ;
- la décision n'emporte pas des conséquences disproportionnées et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'enfant a été abandonné en Algérie et n'a plus d'attaches particulières dans ce pays ; il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de l'enfant justifierait des voyages réguliers hors de l'espace Schengen et notamment en Algérie ; l'absence de délivrance d'un document de circulation ne fait pas obstacle à ce que l'enfant puisse circuler librement accompagné de ses parents dans l'espace Schengen.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme F... ont recueilli un enfant, H... F..., ressortissant algérien né le 14 mars 2018, par acte judicaire de kafala homologué par une ordonnance du 22 juillet 2018 du tribunal de Setif. Les parents ont demandé la délivrance d'un document de circulation pour étranger mineur au profit de H... F.... Par une décision du 15 mars 2019, le préfet de l'Ain a refusé de délivrer ce document au motif que la situation de M. H... F... ne relève d'aucune des catégories mentionnées à l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. M. et Mme F... relève appel du jugement du 19 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.
Sur la légalité de la décision du 24 avril 2019 :
2. Aux termes de l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, : " Les mineurs algériens de dix-huit ans résidant en France, qui ne sont pas titulaires d'un certificat de résidence reçoivent sur leur demande un document de circulation pour étrangers mineurs qui tient lieu de visa lorsqu'ils relèvent de l'une des catégories mentionnées ci-après : / a) Le mineur algérien dont l'un au moins des parents est titulaire du certificat de résidence d'un an et qui a été autorisé à séjourner en France au titre du regroupement familial ; / b) Le mineur algérien qui justifie par tous moyens avoir sa résidence en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans et pendant une durée d'au moins six ans ; / c) Le mineur algérien entré en France pour y suivre des études sous couvert d'un visa d'une durée supérieure à trois mois ; / d) Le mineur algérien né en France dont l'un au moins des parents réside régulièrement en France ". Aux termes de l'article D. 321-18 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, : " Le demandeur présente : / 1° Un document établissant son identité et sa nationalité et un document justifiant de la régularité de son séjour ; / 2° Les documents attestant qu'il exerce l'autorité parentale sur le mineur pour lequel la demande est souscrite ou qu'il détient un mandat de la personne titulaire de cette autorité ; / 3° Les documents relatifs à l'identité, la nationalité et la filiation du mineur et justifiant que ce dernier appartient à l'une des catégories mentionnées à l'article D. 321-16 ".
3. D'une part, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit de manière complète les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants algériens sur le territoire français. Les conditions de circulation des algériens mineurs sont ainsi exclusivement régies par les stipulations précitées de l'article 10 de cet accord. Dès lors, les époux F... ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 321-4 et l'article D. 321-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de dépôt de leur demande.
4. D'autre part, le refus de délivrer un document de circulation pour étranger mineur, faute pour le bénéficiaire de remplir les conditions prévues par les stipulations précitées, n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle du jeune H... dès lors que le document de circulation prévu par les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ne constitue pas un titre de séjour mais est destiné seulement à faciliter le retour sur le territoire national, après un déplacement hors de France, des mineurs algériens y résidant. Par suite, et alors qu'il n'est pas établi que l'enfant devrait se rendre régulièrement en Algérie, le moyen tiré de ce que la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme et M. F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles à fin de mise à la charge de l'Etat des frais exposés et non compris dans les dépens dans les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme et M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... F... et Mme D... G... épouse F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2020, à laquelle siégeaient :
M. Drouet, président de la formation de jugement,
Mme C..., premier conseiller,
M. Pin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 25 août 2020.
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N° 20LY00731