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25/08/2020 | FRANCE | N°19LY04208

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 25 août 2020, 19LY04208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2019 du préfet de Saône-et-Loire en tant qu'il l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902622 du 11 octobre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 novembre 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce

jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Saô...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2019 du préfet de Saône-et-Loire en tant qu'il l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902622 du 11 octobre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 novembre 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 11 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Saône-et-Loire du 9 septembre 2019 en tant qu'il l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

M. A... soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- c'est à tort que le préfet a estimé qu'il représentait une menace à l'ordre public ;

- la mesure d'éloignement est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants mineurs et ne peut entrer en contact avec son épouse par l'effet de sa condamnation pénale.

La requête a été régulièrement communiquée au préfet de Saône-et-Loire, qui n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Pruvost, président ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant turc né en 1993, qui a épousé une ressortissante française le 12 novembre 2013 en Turquie, est entré en France, le 13 février 2014, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de long séjour délivré en qualité de conjoint d'un ressortissant français. Il a obtenu une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", laquelle a par la suite été renouvelée à deux reprises. Le 29 mai 2019, il a demandé le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 9 septembre 2019, le préfet de Saône-et-Loire a refusé de faire droit à sa demande en assortissant son refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant seulement qu'il l'a obligé à quitter le territoire français et fixé le pays de destination.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) / II. - L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ".

3. Du fait de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour dont il a été l'objet et dont il ne conteste d'ailleurs pas le bien-fondé, M. A... se trouvait dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet pouvait prendre une obligation de quitter le territoire français.

4. Pour justifier l'obligation de quitter le territoire sans délai prise à l'encontre de M. A..., le préfet, après avoir relevé, d'une part, que l'absence de communauté de vie et les violences commises sur son épouse pour lesquelles il a été pénalement condamné faisaient obstacle au renouvellement de son titre de séjour et, d'autre part, que son comportement violent ne permettait pas de considérer qu'il participait à l'entretien et à l'éducation de leurs deux enfants mineurs et s'opposait à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français, a indiqué dans l'arrêté attaqué que M. A... représentait une menace pour l'ordre public, qu'il n'était pas dépourvu d'attaches en Turquie et qu'il n'établissait pas entrer dans une des catégories d'étrangers ne pouvant faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige qu'il comporte les considérations de fait et de droit sur lesquels le préfet s'est fondé pour décider d'une obligation de quitter le territoire français et qu'il a procédé à un examen particulier de l'ensemble des éléments portés à sa connaissance. Les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la mesure d'éloignement et du défaut d'examen sérieux de la situation de l'intéressé ne peuvent dès lors qu'être écartés.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ". Selon l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 8 juillet 2019 devenu définitif, le tribunal de grande instance de Chalon-sur-Saône a déclaré M. A... coupable de faits de violences habituelles sur son conjoint commis courant 2019, l'a condamné à une peine d'emprisonnement d'un an dont huit mois avec sursis avec mise à l'épreuve pendant vingt-quatre mois et a ordonné son maintien en détention " compte tenu de la répétition sur une courte période de faits de violence d'une particulière gravité laissant redouter leur réitération " en assortissant le sursis avec mise à l'épreuve d'une interdiction de paraître dans certains lieux chez son épouse et d'entrer en relation avec la victime de l'infraction.

7. Pour contester la mesure d'éloignement, M. A... se prévaut de sa relation avec ses enfants, à l'éducation et à l'entretien desquels il soutient contribuer. Il produit pour ce faire diverses attestations dont il résulte que, jusqu'à son incarcération, il s'occupait de ses enfants nés en 2004 et 2007 et assumait les charges du foyer ainsi que des pièces tendant à établir qu'il a travaillé avant son incarcération et bénéficiait d'une promesse d'embauche à compter du 1er décembre 2019, date à laquelle son incarcération devait avoir pris fin, comme ouvrier dans le bâtiment. Si M. A... peut ainsi être regardé comme justifiant, par les éléments produits, que, jusqu'à son incarcération, il s'est occupé de ses enfants au sein du foyer où il vivait avec son épouse et s'il ne ressort pas des pièces du dossier que sa condamnation pénale se serait traduite par la déchéance de son autorité parentale, M. A..., qui était incarcéré depuis deux mois et n'établit ni même n'allègue avoir entrepris aucune démarche auprès des instances compétentes pour entretenir un lien avec ses enfants, tant pendant la période d'incarcération que pendant la période de sursis de huit mois durant laquelle il avait interdiction d'approcher son épouse, ne peut, dans les circonstances particulières de l'espèce et eu égard à la gravité des faits dont il a été déclaré coupable, être regardé comme contribuant à l'entretien et à l'éducation de ses enfants à la date à laquelle est intervenue la mesure d'éloignement du territoire prise à son encontre. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

8. M. A... n'est par ailleurs pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu la majeure partie de sa vie. Il ressort en outre du jugement correctionnel mentionné au point 1 ci-dessus que M. A... ne maîtrise pas correctement le français et ne saurait être regardé comme s'étant bien inséré dans la société française eu égard aux faits de violences sur la personne de son épouse. Eu égard à ces éléments et à ceux rappelés au point 5 ci-dessus, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle et familiale ne peuvent qu'être écartés.

9. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme B..., présidente-assesseure,

Mme G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

2

N° 19LY04208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04208
Date de la décision : 25/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : BOUFLIJA BASMA

Origine de la décision
Date de l'import : 13/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;19ly04208 ?
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