Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision en date du 10 septembre 2018 par laquelle le préfet du Rhône a rejeté sa demande de regroupement familial et d'enjoindre à cette autorité de lui accorder le regroupement familial au bénéfice de son épouse dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1809128 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2019, M. G..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 11 avril 2019 ainsi que la décision du préfet du Rhône du 10 septembre 2018 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui accorder le regroupement familial au bénéfice de son épouse ou à défaut, de statuer à nouveau sur sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros qui sera versée à Me D... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet du Rhône s'est estimé en situation de compétence liée ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiqué au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire.
M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 juin 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants marocains et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Thierry, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. G..., marocain né en 1948 qui expose être entré en France en 1968, s'est marié le 31 août 1990 avec Mme H... au Maroc. Par une décision du 10 septembre 2018, le préfet du Rhône a rejeté la demande de regroupement familial qu'il avait formée le 12 avril 2017 au bénéfice de son épouse. M. G... relève appel du jugement rendu le 11 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, la décision litigieuse, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments propres à la situation de M. G..., notamment ceux concernant son état de santé, expose de façon circonstanciée et suffisamment précise les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit, dès lors, être écarté.
3. En deuxième lieu, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. " (article L. 411-1) et que : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants :1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales (...) " (article L. 411-5). Ces dispositions sont applicables aux ressortissants marocains en vertu de l'article 9 de l'accord franco-marocain. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Il est constant que M. G... ne dispose pas de ressources stables et suffisantes au sens des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, cette circonstance ne privait pas le préfet de son pouvoir d'appréciation sur la possibilité d'accorder le regroupement familial à M. G.... Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Rhône, qui a pris en considération plusieurs éléments propres à la situation de M. G..., notamment au regard de sa vie privée et familiale, aurait renoncé à l'exercice de ce pouvoir d'appréciation et qu'il se serait estimé en situation de compétence liée.
5. En troisième lieu, s'il ressort des pièces du dossier que M. G... est susceptible de souffrir de divers problèmes de santé, la seule affirmation d'un médecin selon laquelle son état de santé " nécessite la présence impérative de sa femme auprès de lui " ne permet d'établir, à défaut de toute précision, ni que l'état de santé de M. G... requiert l'assistance d'une tierce personne, ni, le cas échéant, que cette tierce personne ne pourrait être que son épouse, ni enfin que M. G... ne pourrait pas bénéficier des soins appropriés à son état de santé et de la présence de son épouse à ses côtés dans son pays d'origine. Dans ces circonstances, et dès lors qu'il n'est pas contesté que M. G... et son épouse vivent séparés depuis 1990, soit 28 ans à la date de la décision attaquée, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Pour les mêmes motifs, il n'est pas non plus fondé à se prévaloir de ce que cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les conclusions à fin d'annulation de M. G... devant être rejetées, doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque la présente décision n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... G... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2020 à laquelle siégeaient :
Mme C... A..., présidente de chambre,
M. Pierre Thierry, premier conseiller.
Mme B... F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 25 août 2020.
No 19LY027962