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25/08/2020 | FRANCE | N°18LY00930

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 25 août 2020, 18LY00930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I/ La SAS Roanne énergie naturelle a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

II/ Par un mémoire distinct, la SAS Roanne énergie naturelle a demandé au tribunal administratif de Lyon de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la constitution de

l'article 31 de la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 complétant le paragraphe I de l'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I/ La SAS Roanne énergie naturelle a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

II/ Par un mémoire distinct, la SAS Roanne énergie naturelle a demandé au tribunal administratif de Lyon de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la constitution de l'article 31 de la loi n° 89-936 du 29 décembre 1989 complétant le paragraphe I de l'article 1501 du code général des impôts.

Par une ordonnance n° 1409113 QPC du 11 octobre 2017, le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Lyon a jugé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat cette question prioritaire de constitutionnalité.

Par un jugement n° 1409113 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Lyon a constaté un non-lieu à statuer à concurrence de 55 960 euros au titre de l'année 2012, de 153 848 euros au titre de l'année 2013 et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête enregistrée le 9 mars 2018, la SAS Roanne énergie naturelle demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 décembre 2017, en tant qu'il n'a pas fait droit au surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de lui accorder la réduction demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement a insuffisamment motivé sa réponse quant au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 1499 du code général des impôts ;

- à titre principal, que la centrale qu'elle exploite ne présente pas les caractéristiques d'un établissement commercial ;

- à titre subsidiaire, si elle est considérée comme exploitant un établissement commercial, que les éléments fonciers et un certain nombre d'outillages et de moyens d'exploitation de la centrale doivent être exonérés ; de même, les éléments détruits ou retirés à la fin du chantier doivent être exclus du prix de revient de la centrale ;

- les outillages et moyens d'exploitation sont dissociables de l'immeuble ;

- L'administration a méconnu sa propre doctrine, résultant des documentations administratives référencées BOI-IF-TFB-10-50-30-20120912 et BOI IF TFB-20-10-50-30.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la SAS Roanne énergie naturelle n'est fondé.

II/ Par une décision n° 436932 du 16 mars 2020, le Conseil d'Etat a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Lyon par son arrêt n° 18LY00930 du 19 décembre 2019 et qui lui avait été soumise par un mémoire distinct du 9 mars 2018 contestant l'ordonnance du président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Lyon n° 1409113 QPC du 11 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Roanne énergie naturelle exploite depuis 2012 une centrale hydroélectrique à Roanne, dans le cadre d'une convention d'occupation du domaine public signée le 23 septembre 2010. L'administration a constaté que cette société n'avait pas déclaré cette construction au titre de la cotisation foncière des entreprises, en méconnaissance du I de l'article 1406 du code général des impôts. L'administration a considéré que cette société devait être assujettie à la cotisation foncière des entreprises, au titre des années 2012 et 2013, assortie de l'intérêt de retard en ce qui concerne l'année 2012. L'administration a procédé à l'évaluation de la valeur locative des biens servant d'assiette à cet impôt, suivant la méthode comptable prévue pour les établissements industriels par l'article 1499 du même code, auquel renvoyait alors l'article 1517 du même code. La SAS Roanne énergie naturelle interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence de 55 960 euros au titre de l'année 2012 et de 153 848 euros au titre de l'année 2013, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la réduction de ces impositions.

2. En premier lieu, les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice d'une profession autre qu'agricole, commerciale, artisanale ou industrielle ", à l'article 1498 pour " tous les biens autres que les locaux d'habitation ou à usage professionnel visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 " et à l'article 1499 pour les " immobilisations industrielles ". Revêtent un caractère industriel, au sens de ces articles, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

3. L'établissement exploité par la SAS Roanne énergie naturelle est une centrale hydroélectrique qui nécessite l'usage de turbines, d'équipements électriques, de matériels spécifiques tels que grilles, dégrilleurs et batardeaux ainsi que d'alternateurs. Ces équipements doivent être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme d'importants moyens techniques dont le rôle est prépondérant pour une telle activité. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé son jugement sur ce point, a écarté le moyen tiré de ce que l'administration aurait méconnu l'article 1499 du code général des impôts en déterminant la valeur locative de son établissement suivant les règles propres aux immobilisations industrielles.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1381 du même code : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; 2° Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Aux termes de l'article 1382 du même code : " Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) 11° Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés aux 1° et 2° de l'article 1381 ". Les bâtiments mentionnés au 1° de l'article 1381 comprennent également les aménagements faisant corps avec eux. Les outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels mentionnés au 11° de l'article 1382 s'entendent de ceux qui participent directement à l'activité industrielle de l'établissement et sont dissociables des immeubles.

5. L'administration a estimé que devaient être exonérés de la taxe foncière les trois turbines d'une valeur totale de 1 484 000 euros, des équipements électriques d'une valeur de 513 223 euros, le dégrilleur d'une valeur de 420 000 euros et des générateurs d'une valeur de 163 325 euros. La SAS Roanne énergie naturelle a, par conséquent, été imposée sur la base d'une valeur locative de 9 104 020 euros.

6. La SAS Roanne énergie naturelle soutient que le puits de ventilation et de transfert de matériel, la structure dégrilleur, les rainures batardeaux, les conduits hydrauliques, la passe à poissons, les palplanches, le canal d'amenée, le canal de fuite, le déversoir, les enrochements, la passerelle et le garde-corps sont également des équipements exonérés en application du 11° de l'article 1382 du code général des impôts, de sorte que le prix de revient du bâtiment devrait être fixé à 489 829 euros pour le calcul de la taxe foncière. Toutefois, si ces équipements constituent bien des outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation, il résulte de l'instruction qu'ils constituent des ouvrages immobiliers ou font corps avec ceux-ci. Si certains de ces équipements sont démontables, ils ne sont pas destinés à être déplacés compte tenu de leurs caractéristiques techniques. Ils doivent par conséquent être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme étant indissociables de l'immeuble en litige et ne peuvent donc être exonérés en application du 11° de l'article 1382 précité.

7. En troisième lieu, si la SAS Roanne énergie naturelle invoque la documentation administrative référencée BOI-IF-TFB-10-50-30-20120912, qui donne des exemples d'outillages et équipements devant être regardés comme exonérés de la taxe, celle-ci ne se prononce pas sur les équipements et outillages en litige. Contrairement à ce que soutient la requérante, la doctrine, qui doit être appliquée strictement, ne peut être regardée comme ayant une " portée générale ".

8. En quatrième lieu, la SAS Roanne énergie naturelle, se prévaut également des paragraphes nos 70 et 80 de la documentation administrative référencée BOI IF TFB-20-10-50-30, qui prévoient que " Pour dégager le prix de revient réel des immobilisations, il est parfois nécessaire de faire subir à la valeur déclarée des corrections diverses " et que les erreurs commises " conduisent à des réfactions qui peuvent affecter la valeur comptable : / - en plus : rétablissement au compte " constructions " des frais d'installations afférents à des bâtiments et qui ont été passés en frais généraux ; / - en moins : réduction de la valeur d'origine d'un bâtiment qui n'a pas été diminuée à la suite d'une démolition partielle ". La requérante soutient que certains éléments retenus dans la valeur d'origine de la centrale n'avaient qu'un caractère provisoire et ont été retirés ou démolis au terme des travaux de construction, de sorte que la valeur déclarée de la centrale devrait être réduite. Ces éléments sont les palplanches ayant servi à la mise hors d'eau du site et qui ont ensuite été retirées, des protections de chantier, des installations de chantier et des coffrages utilisés pour aider à la réalisation de pièces et formes spécifiques. Toutefois ces éléments n'avaient pas d'autre objet que de servir à la réalisation du bâtiment et ont ainsi participé à son prix de revient, de sorte que leur retrait ou leur destruction, qui n'a pas affecté sa valeur d'origine, ne peut être assimilée à une démolition partielle du bâtiment au sens de la documentation précitée.

9. Il résulte de ce qui précède que la SAS Roanne énergie naturelle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Roanne énergie naturelle est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Roanne énergie naturelle et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

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N° 18LY00930


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00930
Date de la décision : 25/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.

Contributions et taxes - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances - Taxe professionnelle - Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : FIDAL DIRECTION PARIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;18ly00930 ?
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