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08/07/2020 | FRANCE | N°19LY03954

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 08 juillet 2020, 19LY03954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... et Mme D... A... épouse E... ont chacun demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 16 septembre 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Savoie les a, respectivement, obligés à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et les a assignés à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1906170, 1906171 du 23 septembre 2019, le magist

rat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a joint ces demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... et Mme D... A... épouse E... ont chacun demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 16 septembre 2019 par lesquels le préfet de la Haute-Savoie les a, respectivement, obligés à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et les a assignés à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1906170, 1906171 du 23 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a joint ces demandes, a annulé les assignations à résidence et a rejeté le surplus de ces demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 24 octobre 2019, M. et Mme E..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des obligations de quitter le territoire français sans délai et des interdictions de retour ;

2°) d'annuler les arrêtés du 16 septembre 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 7611 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91647 du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- le préfet devait saisir le procureur de la République compétent aux fins d'ouverture d'une tutelle en application des dispositions des articles 415 et 430 du code civil :

- l'état de santé de M. E... s'oppose à ce qu'il fasse l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

- le refus de leur octroyer un délai de départ volontaire n'est pas justifié ;

- les décisions contestées portent une atteinte excessive à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'interdiction de retour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

M. et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 20 novembre 2019.

L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les requérants ayant été régulièrement avertis du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 23 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du 16 septembre 2019 du préfet de la Haute-Savoie assignant à résidence M. E..., né le 11 février 1992, et Mme A... épouse E..., sa mère, née le 28 février 1964, ressortissants du Kossovo qui résident, selon leurs déclarations, sur le territoire national depuis le 12 mai 2016, et a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés du 16 septembre 2019 les obligeant à quitter le territoire français sans délai et prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an. M. et Mme E... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leurs demandes.

2. La circonstance que le handicap dont souffre M. E... justifierait qu'il bénéficie de l'une des mesures de protection des majeurs prévues au titre XI du code civil est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet devait saisir le procureur de la République d'une demande d'ouverture d'une mesure de protection judiciaire doit, en tout état de cause, être écarté.

3. Aux termes de l'article L. 5114 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier, que M. E... est atteint depuis l'enfance d'une hydrocéphalie aiguë traitée, mais sans cause connue, qu'il souffre de troubles cognitifs et moteurs nécessitant une assistance dans les actes de la vie quotidienne et a été reconnu porteur d'un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 %. Toutefois, alors que le collège des médecins de l'OFII a estimé, par un avis du 10 octobre 2017, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, il peut effectivement bénéficier du maintien d'un traitement approprié et peut voyager sans risque vers ce pays, les éléments produits par M. E..., ne suffisent pas à établir qu'il ne pourrait bénéficier d'un suivi et d'un traitement médicamenteux appropriés dans son pays d'origine.

5. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que les requérants sont demeurés sur le territoire national en dépit des décisions d'obligation de quitter le territoire prises à leur encontre le 23 août 2018. S'ils font valoir que M. E... n'aurait pas compris le sens de cette décision et que sa mère attendait que l'avis du collège de l'OFII lui soit transmis et qu'ils disposent d'un hébergement stable, ces éléments ne constituent pas des circonstances particulières au sens des dispositions précitées.

7. Les moyens tirés de ce que les décisions contestées porteraient une atteinte excessive au droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que les décisions d'interdiction de retour seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Leurs conclusions tendant à l'application, au bénéfice de leur avocat, des dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., à Mme D... A... épouse E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 8 juillet 2020.

2

N° 19LY03954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03954
Date de la décision : 08/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-08;19ly03954 ?
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