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30/06/2020 | FRANCE | N°18LY01176

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 30 juin 2020, 18LY01176


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 1er septembre 2015 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Grenoble a décidé que son contrat de travail ne serait pas reconduit à compter du 9 octobre 2011 et d'ordonner sa réintégration à son poste ou à un poste équivalent à celui qu'elle occupait au 9 octobre 2011.

Par un jugement n° 1506559 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
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Par une requête enregistrée le 29 mars 2018, Mme C..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 1er septembre 2015 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire de Grenoble a décidé que son contrat de travail ne serait pas reconduit à compter du 9 octobre 2011 et d'ordonner sa réintégration à son poste ou à un poste équivalent à celui qu'elle occupait au 9 octobre 2011.

Par un jugement n° 1506559 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 mars 2018, Mme C..., représentée par Me Cans, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 octobre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du directeur général du centre hospitalier universitaire de Grenoble du 1er septembre 2015 ;

3°) d'ordonner sa réintégration sur son poste ou un poste équivalent à celui qu'elle occupait au 9 octobre 2011 ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, combiné avec les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision litigieuse n'est pas motivée, en méconnaissance des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- la décision litigieuse emporte licenciement, dès lors qu'elle doit être regardée comme ayant été titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, en application de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 ;

- ce licenciement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été précédé d'un préavis de deux mois et d'un entretien préalable, en méconnaissance des articles 42 et 44 du décret du 6 février 1991 ;

- ce licenciement n'est pas justifié.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mars 2019, le centre hospitalier universitaire de Grenoble, représenté par Me B... (H... et associés), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 janvier 2018.

Par ordonnance du 6 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... G..., première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., avocat, représentant le centre hospitalier universitaire de Grenoble ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... a été recrutée par le centre hospitalier universitaire de Grenoble comme agent des services hospitaliers qualifié en 2002 en qualité de contractuelle. Après trente-huit renouvellements de son contrat, le directeur du centre hospitalier a décidé de ne plus le renouveler à compter du 9 octobre 2011, par décision du 27 septembre 2011. Par un jugement du 9 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision, au motif que son auteur n'était pas compétent pour la signer, en rejetant le surplus des conclusions de l'intéressée tendant à sa réintégration. A la suite de ce jugement, le directeur du centre hospitalier universitaire de Grenoble a procédé à un nouvel examen de la situation de Mme C... et a, par une décision du 1er septembre 2015, à nouveau refusé de renouveler son contrat. Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de cette dernière décision, par un jugement du 10 octobre 2017, dont elle relève appel.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige, prévoit que : " Par dérogation à l'article 3 du titre Ier du statut général, les emplois permanents mentionnés au premier alinéa de l'article 2 peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées. (...) /Les agents ainsi recrutés peuvent être engagés par des contrats d'une durée indéterminée ou déterminée. Lorsque les contrats sont conclus pour une durée déterminée, celle-ci est au maximum de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par décision expresse dans la limite d'une durée maximale de six ans. / Tout contrat de travail conclu ou renouvelé en application du présent article avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu, par décision expresse, pour une durée indéterminée. (...) ". En son dernier alinéa, issu de l'article 47 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, publiée au journal officiel de la République française du 13 mars 2012, ce même article précise que : " Lorsqu'un agent atteint les conditions d'ancienneté mentionnées aux quatrième à avant-dernier alinéas avant l'échéance de son contrat en cours, celui-ci est réputé conclu à durée indéterminée. L'autorité d'emploi lui adresse une proposition d'avenant confirmant cette nouvelle nature du contrat ". En vertu du II de l'article 47 de la loi du 12 mars 2012, ces dispositions sont applicables " aux contrats en cours à la date de publication " de cette loi.

3. D'autre part, aux termes de l'article 42 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " En cas de licenciement des agents recrutés pour une durée indéterminée et des agents dont le contrat à durée déterminée est rompu avant le terme fixé, les intéressés ont droit à un préavis (...) ". L'article 44 de ce même décret prévoit en outre que : " Lorsque l'autorité signataire du contrat envisage de licencier un agent contractuel, elle doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, en lui indiquant l'objet de la convocation (...) ".

4. Les dispositions de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 prévoient que la durée totale de contrats à durée déterminée successifs conclus sur son fondement ne peut excéder six ans et que, si l'autorité compétente entend les reconduire à l'issue d'une telle période, elle doit prendre une décision expresse et ne peut conclure avec l'agent qu'un contrat à durée indéterminée. Un contrat à durée déterminée conclu, en méconnaissance de ces dispositions, pour une durée qui, compte tenu de la durée des contrats successifs précédemment conclus avec le même agent, conduit, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale d'emploi de six années n'est pas tacitement transformé en contrat à durée indéterminée, sauf à ce que l'agent puisse se prévaloir du dernier alinéa de cet article, issu de la loi du 12 mars 2012.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été initialement recrutée par le centre hospitalier universitaire de Grenoble pour une durée d'une trentaine de jours par un contrat du 26 novembre 2002. Celui-ci a été renouvelé, en dernier lieu, jusqu'au 9 octobre 2011, par contrat à durée déterminée du 27 septembre 2011, sans que l'annulation de la décision de non-renouvellement du directeur du centre hospitalier du 27 septembre 2011, par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 juillet 2015, n'ait pu avoir pour effet de le proroger. Le contrat de Mme C... étant ainsi parvenu à échéance avant la publication de la loi du 12 mars 2012, elle ne peut utilement se prévaloir du dernier alinéa de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 dans sa rédaction issue de cette loi du 12 mars 2012. Par suite, et à supposer même qu'elle aurait occupé un emploi permanent et que les contrats à durée déterminée dont elle a bénéficié aient été conclus en méconnaissance de la durée maximale de six ans fixée par ces dispositions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'elle doit être regardée comme ayant bénéficié d'un contrat à durée indéterminée sur le fondement de l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986, ni, dès lors, que la décision du 1er septembre 2015 était constitutive d'un licenciement.

6. Mme C... n'ayant pas fait l'objet d'un licenciement, elle ne peut utilement se prévaloir des articles 42 et 44 du décret du 6 février 1991 précédemment rappelés. Par ailleurs, la décision de ne pas renouveler l'engagement de Mme C... n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision en litige n'est pas motivée et n'a pas été précédée d'un préavis d'une durée suffisante et d'un entretien doivent être écartés.

7. Enfin, pour ces mêmes motifs, Mme C... ne saurait utilement prétendre qu'un licenciement n'était pas justifié. En outre, le centre hospitalier universitaire de Grenoble faisant valoir, sans être contredit, que le non-renouvellement de son contrat était motivé par son absence et par l'incapacité dans laquelle elle se trouvait ainsi d'assumer ses missions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige aurait été adoptée pour des motifs étrangers à l'intérêt du service, ni, par suite, qu'elle procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction de réintégration :

9. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de Mme C... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le conseil de Mme C... au titre des frais exposés par celle-ci. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... le paiement des frais exposés par le centre hospitalier universitaire de Grenoble en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Grenoble tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au centre hospitalier universitaire de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme F... A..., présidente,

Mme I..., présidente-assesseure,

Mme E... G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 30 juin 2020

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N° 18LY01176


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01176
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELAS LLC et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-30;18ly01176 ?
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