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22/04/2020 | FRANCE | N°19LY03861

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 22 avril 2020, 19LY03861


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 17 juillet 2019 par lesquels le préfet du Cantal l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1901487 du 26 juillet 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

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Par une requête enregistrée le 16 octobre 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les arrêtés du 17 juillet 2019 par lesquels le préfet du Cantal l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1901487 du 26 juillet 2019, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 octobre 2019, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 juillet 2019 ;

2°) d'annuler ces arrêtés du 17 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Cantal de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) à titre subsidiaire de suspendre l'obligation de quitter le territoire français jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu, principe général du droit, protégé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivé et a été pris sans réel examen de sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les éléments qu'il produit justifient que l'exécution de la mesure d'éloignement soit suspendue jusqu'à la lecture de la décision de la Cour nationale du droit d'asile sur son recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'assignant à résidence ;

- la décision d'assignation à résidence est insuffisamment motivée ;

- il ne se trouve pas dans un des cas définis à l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans lesquels le préfet peut décider de l'assigner à résidence.

Par un mémoire enregistré le 11 décembre 2019, le préfet du Cantal conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Par courrier enregistré le 21 février 2020, le préfet du Cantal a informé la cour du rejet par la Cour nationale du droit d'asile du recours de M. A....

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 18 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité albanaise, est entré en France en février 2019 avec son épouse et leurs deux enfants. Il a présenté une demande d'asile, qui a été rejetée par décision du 28 juin 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Par deux arrêtés du 17 juillet 2019, le préfet du Cantal l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, et l'a assigné à résidence. M. A... relève appel du jugement du 26 juillet 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, M. A... réitère en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, ses moyens tirés de ce que la décision l'obligeant à quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu, principe général du droit, protégé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, et qu'elle est entachée d'un défaut d'examen réel de sa situation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, la décision, qui vise les dispositions applicables, précise que M. A... ne bénéficie plus du droit de se maintenir en France suite au rejet de sa demande d'asile, et fait état de considérations personnelles sur la situation de l'intéressé, justifiant la mesure d'éloignement. Elle est par suite suffisamment motivée, au regard des prescriptions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Il ressort des pièces du dossier que M. A... ne résidait en France que depuis cinq mois à la date de l'obligation de quitter le territoire français. S'il fait valoir qu'il est séparé de son épouse, auprès de laquelle vivent ses deux enfants, celle-ci a fait l'objet le même jour d'une mesure d'éloignement. Par suite, l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations précitées. Pour les mêmes motifs, M. A... ne peut soutenir que cette décision est illégale du fait qu'il aurait droit à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision fixant le pays de destination :

5. M. A... réitère en appel, sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

Sur l'assignation à résidence :

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'assignant à résidence.

7. M. A... réitère en appel sans l'assortir d'éléments nouveaux, son moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision l'assignant à résidence. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

8. Aux termes du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque le droit au maintien de l'étranger a pris fin en application (...) du 7° de l'article L. 743-2 et qu'une obligation de quitter le territoire français a été prise à son encontre, l'autorité administrative peut, aux fins du traitement rapide et du suivi efficace de sa demande d'asile, l'assigner à résidence selon les modalités prévues aux trois derniers alinéas de l'article L. 561-1, pour une durée de quarante-cinq jours renouvelable une fois. (...) / (...) / L'assignation à résidence ou le placement en rétention s'effectue dans les conditions prévues au livre V. Lorsque ces décisions sont prises en application du premier alinéa du présent I, la procédure contentieuse se déroule selon les modalités prévues au III de l'article L. 512-1. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 561-1 du même code : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, dans les cas suivants : 1° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai ou si le délai de départ volontaire qui lui a été accordé est expiré ; (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que le droit de M. A... à se maintenir sur le territoire français a pris fin en application du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, conformément aux dispositions du premier paragraphe de l'article L. 744-9-1 du même code, le préfet du Cantal pouvait légalement, aux fins du traitement rapide et du suivi efficace de sa demande d'asile, l'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois, selon les modalités prévues aux trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 et dans les conditions prévues au livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même que le délai de départ volontaire de trente jours qui lui a été accordé n'avait pas expiré. Par suite, l'assignation à résidence n'ayant pas été prise sur le fondement des dispositions citées au point précédent du 1° de l'article L. 561-1, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

Sur l'application, subsidiaire, tendant à la suspension de la mesure d'éloignement :

10. Il ressort des pièces du dossier que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté par ordonnance du 14 novembre 2019 le recours de M. A... dirigé contre la décision par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides avait rejeté sa demande d'asile. Dans ces conditions, il n'y a plus lieu d'examiner les conclusions de la requête tendant, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à ce que la mesure d'éloignement soit suspendue jusqu'à l'issue du recours de M. A....

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente, au bénéfice de son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la suspension de l'obligation de quitter le territoire français jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile.

Article 2 : La requête de M. A... est rejetée pour le surplus.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Cantal.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2020 à laquelle siégeaient :

M. Thierry Besse, président,

Mme G... E..., première conseillère,

Mme F... D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 22 avril 2020.

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N° 19LY03861


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03861
Date de la décision : 22/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BESSE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : YERMIA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-22;19ly03861 ?
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