La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2020 | FRANCE | N°18LY00395

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 09 avril 2020, 18LY00395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Saint-Martin-la-Plaine a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'ordonner une médiation ;

2°) d'annuler les décisions implicites de rejet nées du silence gardé par le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire (SIEL) sur ses demandes du 22 novembre 1991 et du 17 mars 1993 tendant au reversement du produit de la taxe sur l'électricité perçue par le syndicat sur le territoire de la commune ;

3°) d'annuler la décision de rejet de sa demande du

8 décembre 2014 tendant au reversement, à l'avenir, de la taxe sur la consommation finale d'él...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Saint-Martin-la-Plaine a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'ordonner une médiation ;

2°) d'annuler les décisions implicites de rejet nées du silence gardé par le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire (SIEL) sur ses demandes du 22 novembre 1991 et du 17 mars 1993 tendant au reversement du produit de la taxe sur l'électricité perçue par le syndicat sur le territoire de la commune ;

3°) d'annuler la décision de rejet de sa demande du 8 décembre 2014 tendant au reversement, à l'avenir, de la taxe sur la consommation finale d'électricité ;

4°) d'enjoindre au SIEL de procéder au reversement des sommes indûment perçues par lui, soit à compter du 22 novembre 1991, soit à compter du 17 mars 1993 ;

5°) d'enjoindre au SIEL d'abroger la délibération du 22 décembre 1971 ;

6°) d'enjoindre au SIEL de supprimer le classement de la commune parmi les communes intégrées depuis 1971 ;

7°) de condamner le SIEL à lui verser une somme de 2 025 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la perception par le SIEL de la taxe sur l'électricité ;

8°) de mettre à la charge du SIEL une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1506633 du 5 décembre 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 1er février 2018, la commune de Saint-Martin-la-Plaine, représentée par Me F... (H... droit public), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 décembre 2017 ;

2°) d'annuler les décisions implicites de rejet nées du silence conservé par le SIEL sur ses demandes du 22 novembre 1991 et du 17 mars 1993, ainsi que la décision de refus du 8 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au SIEL de procéder au reversement des sommes indûment perçues par lui, soit à compter du 22 novembre 1991, soit à compter du 17 mars 1993, de procéder à l'abrogation de la délibération du 22 décembre 1971 et de supprimer le classement de la commune parmi les communes intégrées depuis 1971 ;

4°) de condamner le SIEL à lui verser une somme de 2 025 000 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la perception par le SIEL de la taxe sur l'électricité ;

5°) de mettre à la charge du SIEL une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses conclusions à fin d'annulation des décisions implicites de rejet sont recevables, la réception de ses demandes étant démontrée ;

- la décision du SIEL du 22 décembre 1971 est illégale, dès lors que ses statuts ne lui donnaient pas compétence pour instaurer une taxe sur l'électricité ;

- en tout état de cause, le SIEL a méconnu sa décision du 22 décembre 1971, en s'abstenant de lui reverser le produit de cette taxe dès l'instant où sa population a dépassé 2000 habitants, et percevait à tort la taxe sur l'électricité qui lui était due en 2010 ;

- le SIEL ne pouvait légalement créer une catégorie de " communes intégrées " dans la convention de concession conclue en 1993 avec ERDF et l'a, en outre, classée à tort dans cette catégorie ;

- elle s'en rapporte pour le surplus à ses écritures de première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 juillet 2018, le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire, représenté par Me G... (E... et associés), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de la commune de Saint-Martin-la-Plaine la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il expose que :

- à titre principal, la requête est irrecevable, à défaut de critiquer le jugement contesté ;

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 décembre 2014, laquelle revêt un caractère confirmatif, sont irrecevables ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 décembre 2018, la commune de Saint-Martin-la-Plaine conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens.

Elle soutient en outre que :

- sa requête, qui comporte des conclusions et des moyens, est recevable ;

- la décision du SIEL du 8 décembre 2014 ne présentant pas le caractère d'une décision confirmative, ses conclusions tendant à son annulation sont recevables.

Un mémoire a été produit par le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire le 12 février 2019 et, dépourvu d'éléments nouveaux, n'a pas été communiqué.

Par ordonnance du 3 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'administration communale ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D..., première conseillère,

- les conclusions de M. Thierry, rapporteur public,

- et les observations de Me Metenier, avocat, représentant la commune de Saint-Martin-la-Plaine, et de Me Cros, avocat, représentant le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire ;

Une note en délibéré a été produite le 27 février 2020 par la commune de Saint-Martin-la-Plaine et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. En vertu d'une délibération de son comité du 22 décembre 1971, le syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire (SIEL) a institué, à compter du 1er janvier 1972, une taxe locale sur l'électricité portant sur l'ensemble des communes du syndicat, et notamment sur le territoire de la commune de Saint-Martin-la-Plaine. Celle-ci indique avoir demandé au SIEL, par courriers du 22 novembre 1991, du 17 mars 1993 et du 2 octobre 2014, que cette taxe lui soit désormais reversée. Par la suite, la commune de Saint-Martin-la-Plaine a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du SIEL rejetant ses demandes, et, dans le dernier état de ses écritures, de condamner le SIEL à lui verser 2 025 000 euros en réparation du préjudice subi. Ses demandes ont été rejetées par un jugement du 5 décembre 2017, dont la commune relève appel.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les décisions implicites de rejet nées du silence conservé par le SIEL sur les demandes du 22 novembre 1991 et du 17 mars 1993 :

2. Aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date de l'enregistrement de la demande de première instance : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. (...) La date du dépôt de la réclamation à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au requérant d'apporter la preuve, par tous moyens, du dépôt d'une réclamation auprès de l'administration. En l'espèce, la commune de Saint-Martin-la-Plaine, qui produit uniquement les demandes qu'elle a rédigées, n'apporte aucune pièce permettant d'établir que celles-ci ont été effectivement présentées au SIEL. La circonstance que ces demandes aient été produites à l'appui d'un précédent recours contentieux, intenté en 1994 par Electricité de France contre un titre exécutoire émis à son encontre par la commune de Saint-Martin-la-Plaine, ne peut être regardée comme constituant le dépôt d'une réclamation, alors même que le SIEL est intervenu dans cette instance. Enfin, il ne saurait être déduit ni de la prétendue absence de remise en cause du dépôt de ces demandes lors de cette précédente instance, ni de la présentation des faits figurant dans les écritures en défense, une reconnaissance de la réception de ces demandes par le SIEL, lequel la conteste expressément. Ainsi, la commune de Saint-Martin-la-Plaine n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du dépôt de ces réclamations auprès du SIEL, ni, par suite, de l'existence des décisions implicites de rejet qu'elle conteste. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté comme irrecevables les conclusions tendant à l'annulation de telles décisions.

En ce qui concerne la décision de refus du 8 décembre 2014 :

4. Aux termes de l'article L. 5212-24 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au jour de la décision en litige : " Lorsqu'il existe un syndicat intercommunal exerçant la compétence d'autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité mentionnée à l'article L. 2224-31, la taxe communale sur la consommation finale d'électricité, prévue à l'article L. 2333-2, est perçue par le syndicat en lieu et place des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui en sont membres et de l'ensemble des communes dont la population recensée par l'Institut national de la statistique et des études économiques au 1er janvier de l'année est inférieure ou égale à 2 000 habitants ou dans lesquelles la taxe est perçue par le syndicat au 31 décembre 2010. Pour les autres communes, cette taxe peut être perçue par le syndicat en lieu et place de la commune s'il en est décidé ainsi par délibérations concordantes du syndicat et de la commune intéressée prises dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis du code général des impôts ".

5. Il résulte de ces dispositions que la taxe communale sur la consommation finale d'électricité, antérieurement dénommée taxe sur les fournitures d'électricité ou taxe communale sur l'électricité, continue à être perçue par le syndicat en lieu et place des communes pour lesquelles tel était déjà le cas au 31 décembre 2010. En vertu de ces mêmes dispositions dans leur version en vigueur à cette date, le syndicat continuait à percevoir la taxe en lieu et place des communes pour lesquelles tel était déjà le cas au 1er janvier 2003. Selon les dispositions de l'article 5212-24 alors en vigueur : " lorsqu'il existe un syndicat de communes pour l'électricité, la taxe prévue à l'article L. 2333-2 peut être établie et perçue par ledit syndicat au lieu et place des communes adhérentes dont la population agglomérée au chef-lieu est inférieure à 2 000 habitants ". Ces dispositions reprenaient en substance les dispositions de l'article 66 de la loi 73-79 du 7 février 1953, ultérieurement codifiées aux articles 199 et 200 du code de l'administration communale, puis aux articles L. 233-1 et L. 233-2 du code des communes. Il en résultait que le seuil de 2 000 habitants en deçà duquel le syndicat percevait cette taxe en lieu et place d'une commune s'entendait de la seule population agglomérée au chef-lieu de la commune.

6. Par une délibération de son comité du 22 décembre 1971, le SIEL a instauré cette taxe communale sur l'électricité, en prévoyant que le produit de cette taxe sera versé : " a) directement aux communes pour celles dont la population agglomérée est supérieure à 2 000 habitants d'après le dernier recensement officiel. (...) b) au SIEL pour les autres (...). ". S'il est, en l'espèce, constant qu'au 31 décembre 2010, le SIEL percevait la taxe ainsi instaurée en lieu et place de la commune de Saint-Martin-la-Plaine, celle-ci soutient toutefois que cette perception était irrégulière tant en raison de l'illégalité de la décision du 22 décembre 1971, que de son exécution irrégulière.

7. D'une part, contrairement à ce que prétend la commune de Saint-Martin-la-Plaine, le SIEL, qui, par sa délibération du 22 décembre 1971, a seulement repris les dispositions précédemment rappelées, et plus particulièrement celles des articles 199 et 200 du code de l'administration communale alors en vigueur, tenait de ces mêmes dispositions la compétence pour instaurer une telle taxe et pour la percevoir en lieu et place des communes syndiquées comptant moins de 2 000 habitants agglomérées à leur chef-lieu. Dans ces conditions, et quelle que soit l'imprécision de la rédaction des statuts de celui-ci, le moyen tiré de l'incompétence du SIEL doit être écarté.

8. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment d'un courrier du préfet de la Loire du 24 décembre 2015 qu'aux termes des recensements réalisés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) en 1975 et en 1982, la commune de Saint-Martin-la-Plaine comptait alors moins de 2 000 habitants au titre de sa population agglomérée au chef-lieu. Si le recensement de 1990 indique qu'elle comptait désormais une population totale de 3 168 habitants, ce document ne comporte aucune précision sur la répartition entre la population agglomérée au chef-lieu et la population éparse. La commune de Saint-Martin-la-Plaine, qui ne saurait utilement se prévaloir de sa population totale, ne produit aucune pièce tendant à établir que sa population agglomérée au chef-lieu serait supérieure à 2 000 habitants, à l'exception d'un courrier du ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire du 31 août 1993, dépourvu de toute justification et de caractère décisoire et, par suite, insuffisant. Dans ces conditions, elle n'établit pas que le SIEL aurait inexactement appliqué sa décision du 22 décembre 1971 en conservant le produit de la taxe perçue sur son territoire.

9. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le SIEL percevait irrégulièrement la taxe collectée sur le territoire de la commune de Saint-Martin-la-Plaine au 31 décembre 2010. Par suite, la commune de Saint-Martin-la-Plaine, qui ne peut utilement se prévaloir d'un rapport d'observations rédigé par la chambre régionale des comptes à l'égard de la gestion du SIEL, qui ne contredit d'ailleurs pas les éléments cités au point précédent, ni d'une convention passée entre celui-ci et Electricité de France, n'est pas fondée à soutenir que la décision du 8 décembre 2014 est entachée d'illégalité.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que la commune de Saint-Martin-la-Plaine n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes à fin d'annulation.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de la commune de Saint-Martin-la-Plaine et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin de condamnation :

12. La commune de Saint-Martin-la-Plaine demande réparation des préjudices que lui auraient causés les refus opposés, selon elle illégalement, par le SIEL, à ses demandes de reversement. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de ces refus, ses conclusions à fin de condamnation doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SIEL, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Saint-Martin-la-Plaine. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le paiement des frais exposés par le SIEL, au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Saint-Martin-la-Plaine est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Martin-la-Plaine et au syndicat intercommunal d'énergies du département de la Loire.

Délibéré après l'audience du 25 février 2020, à laquelle siégeaient :

Mme C... A..., présidente de chambre,

Mme I..., présidente-assesseure,

Mme B... D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 avril 2020.

2

N° 18LY00395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00395
Date de la décision : 09/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-06 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxes ou redevances locales diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. THIERRY
Avocat(s) : SCP SEBAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-09;18ly00395 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award