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12/03/2020 | FRANCE | N°19LY00225

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 12 mars 2020, 19LY00225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 11 mars 2016 à hauteur de 4 538,98 euros, de la décharger du paiement de cette somme et de condamner l'État à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice.

Par un jugement n° 1605180 lu le 6 août 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2019, Mme A..., r

eprésentée par Me C...'Abbé, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 août 2018 ains...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le titre de perception émis à son encontre le 11 mars 2016 à hauteur de 4 538,98 euros, de la décharger du paiement de cette somme et de condamner l'État à lui verser la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice.

Par un jugement n° 1605180 lu le 6 août 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2019, Mme A..., représentée par Me C...'Abbé, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 août 2018 ainsi que le titre de perception émis le 11 mars 2016 ;

2°) de condamner l'État à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en lui versant les sommes en cause sur son compte bancaire, l'administration lui a accordé un avantage financier et a manifesté sa volonté de lui maintenir un plein traitement ; ce faisant, elle ne pouvait pas, en émettant le titre en litige du 11 mars 2016, retirer les décisions individuelles créatrices de droits révélées par ses fiches de paie qui, si elles étaient illégales, ne pouvaient être retirées que dans le délai de quatre mois ;

- le titre de perception ne fournit pas le détail des sommes dues alors qu'elle a réglé une somme de 440,62 euros en février 2016 ;

- la responsabilité de l'administration est engagée pour négligence fautive ; elle n'a pas été correctement informée de la procédure à suivre pour la transmission de ses arrêts maladie à la caisse primaire d'assurance maladie ; ses bulletins de paie ont été établis par l'administration sans que celle-ci ne prenne soin de vérifier qu'elle relevait du statut des contractuels et non des agents titulaires ; l'administration a adressé les arrêts maladie à la caisse avec retard ; contrairement à ce qu'indique l'administration, elle n'a perçu des indemnités journalières qu'en mars 2016 réduites de moitié en raison du retard imputable au rectorat ; ce retard implique la décharge de la somme mise à sa charge ou une diminution de la somme exigée à hauteur de 50 % voire de 80 % ;

- la maladie au titre de laquelle des arrêts de travail lui ont été prescrits à compter de septembre 2015 relève de la responsabilité de l'administration ; elle a subi un harcèlement de la part de son chef d'établissement ce qui doit conduire la juridiction à faire preuve d'indulgence à son égard ;

- elle s'est retrouvée dans une situation financière difficile en raison du reversement demandé ; elle a subi des troubles dans ses conditions d'existence, par réduction considérable du niveau de vie de son foyer pendant quelques mois, et un préjudice moral qu'elle évalue à la somme totale de 3 000 euros.

Par un mémoire, enregistré le 15 novembre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 13 décembre 2019 par une ordonnance du 18 novembre 2019.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation du titre de perception émis le 11 mars 2016 par la trésorerie de Grenoble pour un montant de 4 538,98 euros.

Sur la légalité du titre de perception émis le 11 mars 2016 :

2. En premier lieu, si Mme A... conteste les bases de liquidation de la créance mise à sa charge en soutenant que le titre de perception ne fournit pas le détail des sommes dues alors qu'elle a réglé une somme de 440,62 euros en février 2016, il résulte de l'instruction que la somme de 440,62 euros dont elle s'est acquittée résulte d'un trop-perçu de rémunération qui lui avait été réclamé par un titre de perception émis le 28 janvier 2016 et qu'elle n'a pas contesté. Le titre en litige émis le 11 mars 2016 mentionne quant à lui précisément en annexe les bases de liquidation de la créance mise à la charge de Mme A... et permettait à l'intéressée de la contester, ce qu'elle a d'ailleurs fait en procédant à un recours gracieux.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État, " la réglementation du régime général de sécurité sociale ainsi que celle relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles sont applicables, sauf dispositions contraires, aux agents contractuels visés à l'article 1er du présent décret. Les agents contractuels : / 1° Sont, dans tous les cas, affiliés aux caisses primaires d'assurance maladie pour bénéficier des assurances maladie, maternité, invalidité et décès et de la couverture du congé de paternité ; (...) / Les prestations en espèces versées par les caisses de sécurité sociale en matière de maladie, maternité, paternité, adoption, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles ainsi que les pensions de vieillesse allouées en cas d'inaptitude au travail sont déduites du plein ou du demi-traitement maintenu par l'administration durant les congés prévus aux articles 12 à 15. / Les agents doivent communiquer à leur employeur le montant des prestations en espèces ou des pensions de vieillesse allouées pour inaptitude physique par les caisses de sécurité sociale. L'administration peut suspendre le versement du traitement jusqu'à la transmission des informations demandées. (...) " Aux termes de l'article 2 du même décret : " L'agent non titulaire en activité bénéficie, sur présentation d'un certificat médical, pendant une période de douze mois consécutifs si son utilisation est continue ou au cours d'une période comprenant trois cents jours de services effectifs si son utilisation est discontinue, de congés de maladie dans les limites suivantes : / Après quatre mois de services : - un mois à plein traitement ; - un mois à demi-traitement ; (...) ". Aux termes de l'article R. 321-2 du code de la sécurité sociale, " En cas d'interruption de travail, l'assuré doit envoyer à la caisse primaire d'assurance maladie, dans les deux jours suivant la date d'interruption de travail, et sous peine de sanctions fixées conformément à l'article L. 321-2, une lettre d'avis d'interruption de travail indiquant, d'après les prescriptions du médecin, la durée probable de l'incapacité de travail. / En cas de prolongation de l'arrêt de travail initial, la même formalité doit, sous peine des mêmes sanctions, être observée dans les deux jours suivant la prescription de prolongation. (...) ".

4. Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. Une décision administrative explicite accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage. En revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement. Pour l'application de ces règles à la détermination de la rémunération des agents publics, le maintien du versement d'un avantage financier ne peut être assimilé à une décision implicite accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation non créatrice de droits.

5. Mme A..., engagée comme professeur contractuel de lettres modernes du 14 novembre 2014 au 1er mars 2016, a été placée en congé de maladie ordinaire du 7 au 23 septembre 2015, du 9 au 20 octobre 2015, puis à compter du 2 novembre 2015. Elle ne conteste ni le principe ni le montant de la créance mise à sa charge pour une somme de 4 538,98 euros par le titre de perception émis le 11 mars 2016 résultant de trop-perçus en matière d'indemnités journalières non totalement déduites de son traitement et des traitements intégralement reçus du 2 novembre 2015 au 31 janvier 2016, alors qu'elle n'avait droit qu'à un demi-traitement jusqu'au 4 décembre 2015 et qu'à compter de cette date, elle n'avait plus droit à un traitement en vertu des dispositions précitées de l'article 12 du décret du 17 janvier 1986. Sur ce point, elle ne peut, ainsi que l'a relevé le tribunal, se prévaloir de décisions créatrices de droit qui auraient été révélées par ses fiches de paie sur la période en cause manifestant la volonté de l'administration de lui accorder un avantage financier constitué par le maintien d'un plein traitement alors que les indus en cause trouvent leur origine dans une erreur de liquidation quant au régime indemnitaire applicable à Mme A... que l'administration a rapidement corrigée.

6. En troisième lieu, Mme A... estime que le montant du titre de perception émis à son encontre doit être intégralement déchargé ou réduit à hauteur de 50 % voire 80 % en raison de plusieurs négligences imputables à l'administration. Toutefois, en l'espèce, l'erreur de liquidation en cause dans le traitement indemnitaire des arrêts maladie de Mme A... n'a duré qu'une période limitée à trois mois. Si Mme A... soutient que l'administration a commis une faute consistant à ne pas avoir ré-adressé à la caisse primaire d'assurance maladie les arrêts de travail qu'elle avait adressés à son employeur ou à ne pas les lui avoir restitués et qu'en raison du retard avec lequel elle les a finalement adressés ses indemnités journalières ont été réduites de moitié, de telles circonstances ne sont pas de nature à démontrer un comportement fautif de l'administration dans la récupération des indus versés pouvant ouvrir droit à réduction du montant mis à sa charge par le titre contesté. Au surplus, il appartenait à Mme A... d'adresser elle-même à la caisse primaire d'assurance maladie dont elle relevait les volets n° 1 et n° 2 de ses arrêts de travail, le volet n° 3 étant réservé à l'employeur, en vertu des dispositions précitées de l'article R. 321-2 du code de la sécurité sociale. De même, les circonstances, au demeurant non établies, selon lesquelles ses arrêts de travail seraient en lien avec les fonctions exercées et qu'elle aurait subi un harcèlement moral de la part de son chef d'établissement sont sans incidence sur la décharge partielle de l'obligation de paiement mise à sa charge par le titre contesté. Dans ces conditions, aucune négligence fautive de nature à permettre la réduction du montant mis à sa charge ne peut être relevée.

7. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit qu'aucune faute ne peut être mise à la charge de l'administration dans le retard des envois des arrêts de travail de Mme A... à la caisse primaire d'assurance maladie. Par suite, à défaut de démontrer l'existence d'une faute de l'administration de nature à ouvrir droit à réparation, Mme A... ne saurait solliciter une indemnisation au titre du préjudice financier subi constitué par le versement d'indemnités journalières réduites de moitié et l'absence de versement de son traitement qu'elle pensait acquis, des troubles dans ses conditions d'existence et d'un préjudice moral.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation du titre de perception émis le 11 mars 2016 ainsi que sa demande de condamnation de l'État à l'indemniser de ses préjudices.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Grenoble et à la trésorerie de Grenoble amendes et produits divers.

Délibéré après l'audience du 20 février 2020 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

Mme Burnichon, premier conseiller,

Mme Rémy-Néris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 mars 2020.

2

N° 19LY00225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00225
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : POULET-MERCIER-L'ABBE MARJOLAINE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-03-12;19ly00225 ?
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