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15/01/2020 | FRANCE | N°19LY03032

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 15 janvier 2020, 19LY03032


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 1903299 du 16 juillet 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Pro

cédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, M. A..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 15 avril 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 1903299 du 16 juillet 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er août 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 16 juillet 2019 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 15 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle méconnaît l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- cette décision ainsi que celle fixant le pays de renvoi méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- les décisions de ne pas lui accorder de délai de départ volontaire et d'interdiction de retour sur le territoire français sont entachées d'une insuffisance de motivation ;

- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire a été prise en méconnaissance du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi n'est pas motivée et n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une décision du 23 octobre 2019, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien, né le 20 octobre 1999, déclare être entré en France le 28 novembre 2016 à l'âge de 17 ans. Confié au service de l'aide sociale à l'enfance de l'Ain, il a sollicité du préfet de ce département un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 29 juin 2018, confirmé par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 janvier 2019 devenu définitif, le préfet de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Le 2 novembre 2018, il s'est présenté personnellement à la préfecture de l'Isère pour y déposer une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 avril 2019, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 16 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni de la décision litigieuse, que le préfet de l'Isère, qui a suffisamment motivé ses décisions en droit comme en fait, n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... compte tenu des éléments portés à sa connaissance.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. (...) ".

4. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

5. M. A... fait valoir qu'il est arrivé en France à l'âge de 17 ans, qu'il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance, a été scolarisé, dès janvier 2017, en unité pédagogique pour élèves allophones (UPE2A) au lycée professionnel Bérard d'Ambérieu-en-Bugey (01), s'est efforcé de suivre des stages en boulangerie et qu'il n'a plus de contact avec sa famille restée au Mali. Toutefois, ainsi que l'a jugé le tribunal, M. A..., qui a eu 19 ans le 20 octobre 2018 ne justifie pas, à la date de la décision en litige, suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère a méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 précitées ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, à la date des décisions en litige, M. A... réside en France depuis moins de trois ans après avoir vécu jusqu'à l'âge de 17 ans dans son pays d'origine où résident ses parents et ses frère et soeurs. Par ailleurs, il ne justifie d'aucune intégration particulière sur le territoire français, scolaire ou professionnelle, au-delà d'un stage en boulangerie du 24 au 29 avril 2017. Enfin, si M. A... soutient qu'il souffre d'intenses douleurs chroniques abdominales depuis plusieurs mois et qu'il bénéficie d'un suivi médical, il n'établit pas que ce suivi ne pourrait être assuré qu'en France. Le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère aurait entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doit donc être écarté.

7. En quatrième lieu, M. A... ne peut pas utilement se prévaloir d'une méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui ne lui fait pas obligation, par elle-même, de retourner dans son pays d'origine.

8. En cinquième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, que M. A... a fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, notifiée le 3 juillet 2018. A la date de la décision contestée, le délai de départ volontaire accordé à l'intéressé était expiré sans que ce dernier n'établisse, ni même n'allègue qu'il aurait mis à exécution la précédente mesure d'éloignement prononcée à son encontre. Ainsi, en n'accordant pas de délai de départ volontaire à M. A..., le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions précitées.

10. En cinquième lieu, M. A..., qui fait état de pathologies non identifiées et de l'absence de liens avec sa famille restée au Mali, n'établit ni qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un suivi médical dans son pays d'origine, ni qu'il serait dans l'impossibilité de poursuivre sa vie privée et familiale dans ce pays. Les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi doivent donc être écartés.

11. En dernier lieu, compte tenu de ce qui précède, M. A... n'est pas fondé à déduire, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, celle de la décision fixant le pays de renvoi.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience 19 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 janvier 2020.

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N° 19LY03032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03032
Date de la décision : 15/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : GHANASSIA

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-15;19ly03032 ?
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