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15/01/2020 | FRANCE | N°18LY03505

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 15 janvier 2020, 18LY03505


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 3 février 2017 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 21 décembre 2016 et a autorisé son licenciement.

Par jugement n° 1702026 du 16 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la requête de M. A....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 septembre 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
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2°) d'annuler la décision du 3 f...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 3 février 2017 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 21 décembre 2016 et a autorisé son licenciement.

Par jugement n° 1702026 du 16 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la requête de M. A....

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 septembre 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler la décision du 3 février 2017 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 21 décembre 2016 et a autorisé son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision du ministre du travail est insuffisamment motivée en droit et quant à l'absence de lien avec ses mandats ;

- la demande d'autorisation de licenciement n'était pas suffisamment motivée ;

- la procédure interne à l'entreprise, notamment la consultation du comité d'entreprise, était irrégulière dès lors que seule une note de présentation a été adressée aux membres de cette instance ;

- les faits reprochés ne sont pas établis ;

- le contexte litigieux au sein de l'entreprise est de nature à atténuer la gravité de la faute qui lui est reprochée ;

- l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire pour l'ensemble des faits dont il avait connaissance lors de la sanction disciplinaire du 17 mai 2016 ;

- les faits retenus à son encontre étaient prescrits en application des dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

M. A... ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public,

- les observations de Me C..., pour M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., employé par la société Compagnie du Mont-Blanc, exerçait depuis le 1er mars 2010 les fonctions de chef d'exploitation au sein de l'établissement Tramway du Mont-Blanc. Il détenait les mandats de représentant syndical au comité d'entreprise et de conseiller prud'homme. M. A... relève appel du jugement du 16 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 3 février 2017 par laquelle le ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 21 décembre 2016 refusant d'autoriser son licenciement et autorisé ce dernier.

2. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la demande d'autorisation de licenciement et de la décision en litige du ministre du travail ainsi que de l'irrégularité de la consultation du comité d'entreprise quant au licenciement de M. A... doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges qu'il y a lieu, pour la cour d'adopter.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la sanction disciplinaire d'avertissement infligée à M. A..., le 17 mai 2016, est fondée sur les propos grossiers et insultants tenus par ce dernier à l'encontre d'un prestataire de la compagnie du Mont-Blanc. Elle ne faisait dès lors pas obstacle, compte tenu de la faute sanctionnée, à ce que l'intéressé fasse l'objet d'une nouvelle procédure disciplinaire en raison des difficultés rencontrées par ce dernier avec ses collaborateurs.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance (...) ". L'employeur ne peut pas fonder une demande d'autorisation de licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, sauf si ces faits procèdent d'un comportement fautif de même nature que celui dont relèvent les faits non prescrits donnant lieu à l'engagement des poursuites disciplinaires. Ce délai de deux mois commence à courir lorsque l'employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié protégé.

5. Il ressort des pièces du dossier que, sur demande du directeur d'exploitation, le médecin du travail dans son courrier du 9 juin 2016, a alerté la direction de l'entreprise sur la situation " de souffrance au travail qui perdure et s'aggrave " après avoir reçu l'ensemble des agents de maîtrise affecté au Tramway du Mont-Blanc. Toutefois, ce courrier, s'il relate les propos retenus par ses agents quant à leurs conditions de travail, appelait des investigations complémentaires qui permettent à l'employeur de s'assurer de la réalité et de nature des faits reprochés à M. A.... Par suite, l'enquête diligentée à cette fin par la société Compagnie du Mont-Blanc, du 30 août au 6 septembre 2016 et les témoignages de salariés recueillis à cette occasion n'ont permis à l'employeur de connaître l'ampleur des agissements de M. A... qu'au début du mois de septembre 2016. Dès lors, ces faits n'étaient pas prescrits lorsque la procédure disciplinaire a été engagée, le 7 octobre suivant.

6. En quatrième lieu, en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

7. Il ressort des pièces du dossier, que si la Compagnie du Mont-Blanc avait à l'appui de sa demande d'autorisation de licenciement invoqué sept séries de griefs, la ministre du travail n'a retenu que les griefs tirés du dénigrement des chefs de secteurs, de la recherche permanente de conflits et de menaces. Ces faits, dont la matérialité est établie par les attestations concordantes du supérieur et des subordonnés de l'intéressé, ainsi que par plusieurs messages électroniques qu'il a lui-même envoyés en août 2016, sont, compte tenu de ses fonctions et responsabilités au sein de l'entreprise, d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement.

8. En dernier lieu, le lien avec le mandat n'est pas établi.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 16 juillet 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Les conclusions de la requête présentées aux mêmes fins doivent être rejetées.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A....

Copie sera adressée au ministre du travail et à la société Compagnie du Mont-Blanc.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 janvier 2020.

N° 18LY03505


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03505
Date de la décision : 15/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

66-07-01-04-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique. Obligation de reclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : GUICHARD AUDREY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-15;18ly03505 ?
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