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15/01/2020 | FRANCE | N°18LY01378

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 15 janvier 2020, 18LY01378


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Les Chandelles a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 septembre 2009, 2010 et 2011, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes fiscales mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011.

Par un jugement n° 1510693 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a rej

eté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 avril 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Les Chandelles a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 septembre 2009, 2010 et 2011, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes fiscales mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011.

Par un jugement n° 1510693 du 13 février 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 avril 2018, la société Les Chandelles, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 février 2018 ;

2°) de la décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Les Chandelles soutient que :

- le tribunal a omis de répondre, au stade de l'examen de la charge de la preuve, au moyen tiré de ce que le second avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires était irrégulier ;

- la proposition de rectification, qui ne justifie pas suffisamment les choix de la vérificatrice et ne contient pas les tableurs qui ont été élaborés par la vérificatrice afin de déterminer le ratio qui a servi de base aux redressements, n'est pas suffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, le contribuable n'ayant pas été mis à même de présenter utilement ses observations ;

- la charge de la preuve incombe à l'administration dès lors que le second avis émis par la commission, qui a mis à sa charge la preuve de l'exagération de l'imposition et ne répond pas aux interrogations émises dans le premier, est irrégulier ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires, qui ne se fonde que partiellement sur les données de l'entreprise, est radicalement viciée ;

- elle propose une méthode de reconstitution plus fiable, qui corrige les incohérences de la méthode retenu par l'administration ;

- l'amende pour manquement délibéré n'est pas justifiée ;

- le redressement n'étant pas justifié et la société ayant désigné le bénéficiaire des distributions, l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts n'est pas fondée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que les moyens soulevés par la SARL Les Chandelles ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 2 juillet 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 27 septembre 2019, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société Les Chandelles, qui exerce une activité de restauration traditionnelle, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration, après avoir écarté la comptabilité comme non probante et reconstitué le chiffre d'affaires de la société au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, a procédé à des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés, selon la procédure de taxation d'office, et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure contradictoire, et les a assortis de pénalités et d'une amende fiscale en application de l'article 1759 du code général des impôts. La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, après avoir renvoyé l'examen de certains points en litige qui lui étaient soumis pour supplément d'instruction, a émis le 8 juillet 2014 un avis favorable aux redressements. La société Les Chandelles relève appel du jugement du 13 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 septembre 2009, 2010 et 2011 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des amendes fiscales mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des pièces du dossier que dans sa demande présentée devant le tribunal, la société Les Chandelles a soutenu que le second avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires était irrégulier et qu'en conséquence, la charge de la preuve incombait à l'administration. Le tribunal, qui a écarté ce moyen au stade de l'examen de la régularité de la procédure d'imposition, a omis d'y répondre, s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, au stade de l'examen de la charge de la preuve. Par suite, en tant qu'il a statué sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités correspondantes, le jugement est irrégulier et doit, dans cette mesure, être annulé.

3. Il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement sur cette demande par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

5. La proposition de rectification du 4 septembre 2012 adressée à la société Les Chandelles indiquait qu'elle portait sur l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée et mentionnait les exercices et la période concernés. L'administration a exposé les raisons pour lesquelles elle a écarté la comptabilité comme non sincère et non probante. Elle a expliqué de façon détaillée la méthode qu'elle a employée pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société. Elle a joint en annexes le détail des opérations qu'elle a réalisées et les données sur lesquelles elle s'est fondée. Par suite, et alors que la circonstance que l'administration a refusé après l'envoi de la proposition de rectification de transmettre en format Excel les tableaux figurant en annexes 24, 25 et 26 de la proposition et qui avaient été communiqués en format PDF sur un CD-Rom joint à la proposition de rectification, est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation, cette proposition de rectification est suffisamment motivée.

6. En deuxième lieu, les vices de forme ou de procédure qui entachent l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

7. D'une part, aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". L'article R. 193-1 du même livre précise que : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ".

8. La SARL Les Chandelles n'a pas déposé dans les délais les déclarations d'impôt sur les sociétés qu'elle était tenue de souscrire, ni régularisé la situation en déposant ces déclarations dans le délai de trente jours à compter de la notification des mises en demeure qui lui ont été adressées pour chacune des trois années. L'administration fiscale a, par suite, fait application de la procédure de taxation d'office prévue au 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales pour chacun des exercices vérifiés, sans que la requérante conteste la mise en oeuvre de cette procédure. Par suite, il appartient à la SARL Les Chandelles d'apporter la preuve du caractère exagéré des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge.

9. D'autre part, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) ".

10. Si le fait que la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition ait été établie conformément à l'avis de la commission est susceptible de transférer la charge de la preuve au contribuable, il n'en va ainsi qu'à la condition que l'avis de la commission ait été régulièrement exprimé. Si la commission départementale saisie du différend peut, pour parfaire son information ordonner des mesures d'instruction, ces mesures ne sauraient avoir pour objet ou pour effet de mettre à la charge du contribuable la preuve d'établir devant la commission l'exagération de ces rectifications.

11. Il résulte de l'instruction que les membres de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, réunie le 28 octobre 2013, ont émis un avis favorable au rejet de la comptabilité de la société et ont réservé leur avis s'agissant de la méthode de reconstitution de recettes retenue par l'administration. Ils ont ordonné un supplément d'instruction demandant à la contribuable de proposer une méthode de reconstitution alternative. Cette mesure d'instruction a eu pour effet de mettre à la charge du contribuable la preuve de l'exagération de ce redressement. Par suite, l'avis favorable aux redressements que la commission a prononcé à l'issue de sa seconde réunion le 8 juillet 2014, en se fondant notamment sur le fait que la société n'avait pas été en mesure de proposer une méthode de reconstitution plus précise de son chiffre d'affaires, est entaché d'irrégularité. Par voie de conséquence, la charge de la preuve du bien-fondé des redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée incombe à l'administration.

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

S'agissant de la méthode de reconstitution des recettes de l'administration :

12. Pour procéder à la reconstitution des recettes de la SARL Les Chandelles, dont la comptabilité était entachée de graves irrégularités, l'administration a procédé selon la méthode dite des " vins ". Cette méthode consiste à déterminer le montant du chiffre d'affaires des " recettes solides " en partant du montant des achats revendus de vins. Pour ce faire, à partir d'un échantillon de notes présentées, le ratio entre les ventes de vins et les ventes de solide est déterminé, puis appliqué au chiffre d'affaires reconstitué des ventes de vin, ce qui permet de calculer le montant du chiffre d'affaires des ventes de " solides ". L'administration a ensuite pris en compte l'existence de menus de groupe, en estimant que ceux-ci représentaient 10 % des ventes et qu'ils bénéficient d'une réduction de 15 %. Pour l'exercice clos en 2010, elle disposait d'éléments cohérents sur les achats de liquides, sur lesquels elle s'est fondée, mais faute de disposer de ces éléments en 2009, elle a procédé à une extrapolation des données de 2010, en retenant qu'ils représentaient 13 % de moins que 2010. Pour l'exercice clos en 2011, elle a dû corriger certaines incohérences dans les achats de liquide avant d'appliquer la méthode retenue.

13. Il ressort des termes de la proposition de rectification, et des explications détaillées et précises données par la vérificatrice que la comptabilité de la société présentait de graves irrégularités. Il a en particulier été démontré que les éléments comptabilisés par la société correspondaient aux encaissements bancaires de celle-ci, et non aux facturations établies auprès des clients, que les menus présentés à la vérificatrice comme ceux se rapportant à la période vérifiée ne correspondaient pas aux prix alors pratiqués dans les deux restaurants de la SARL, que les notes présentées comportaient de nombreuses anomalies, certaines notes étant absolument identiques à plusieurs reprises, et ne pouvaient être des notes originales, que les achats présentaient des incohérences importantes. Partant de ces constatations, la vérificatrice a reconstitué les recettes de la SARL en se fondant, à chaque fois qu'elle le pouvait, sur les conditions réelles d'exploitation. Si, ainsi que le fait valoir la SARL Les Chandelles, la reconstitution procède de plusieurs extrapolations, elles résultent du fait que la vérificatrice ne disposait que de données extrêmement parcellaires pour procéder à la reconstitution.

14. Pour déterminer le ratio entre la vente de vins et la vente de solides, avant prise en compte des repas de groupe, la vérificatrice s'est fondée sur les extrapolations, sur certains mois, des notes provenant des souches présentées par la société. Elle a indiqué avoir pris en compte les notes exploitables. Elle a abouti à un ratio unique pour les trois années de 5,37 et a indiqué que ce coefficient présentait un caractère réaliste, hors groupes, les recettes de vins représentant 17% du chiffre d'affaires généré par les solides et les vins. Ces souches représentent, sur les trois exercices vérifiés, sept mois répartis sur toute l'année. Il n'apparait pas que le choix de ces mois conduirait à une sous-estimation de la part des ventes de vin dans la part totale du chiffre d'affaires de la société. Si la vérificatrice n'a pas justifié la raison pour laquelle elle a retenu ces mois plutôt que d'autres mois, si ce n'est en indiquant que ces notes étaient " exploitables ", l'échantillon parait représentatif compte tenu du nombre de mois sélectionnés. Si la société fait grief à l'administration d'avoir calculé le ratio sur la base de ces données que la vérificatrice avait qualifiées de non fiables, ces données avaient été fournies par la société elle-même, la vérificatrice a vérifié que le ratio obtenu était réaliste, elle ne disposait d'aucun autre élément pour déterminer ce ratio et il n'apparait pas que la part de l'ensemble des ventes de vins et d'eaux dans l'activité de restauration au cours des mois qui n'ont pas fait l'objet d'un examen serait différente de celle observée pour ces sept mois.

15. Contrairement à ce qu'allègue la société, la vérificatrice a bien isolé, pour déterminer ce ratio, les repas de groupe dans lesquels sont inclus les boissons, et la circonstance que la prise en compte des repas de groupe n'aboutit qu'à une diminution de 1,5 % du chiffre d'affaires de la société ne démontre pas que la méthode retenue est erronée.

16. La vérificatrice a arrêté à 10 % la part des repas de groupe dans le chiffre d'affaires de l'entreprise généré pas les ventes de solides et de vins après avoir indiqué que la société avait produit quelques devis de repas de groupes, que seulement quelques factures de tels repas avaient été comptabilisées et uniquement en 2011, que le gérant n'avait pas donné d'estimation de la part des menus de groupe dans les recettes et qu'il n'était pas possible de s'appuyer sur les carnets de souche des notes pour établir la part de ces repas dès lors qu'il avait été démontré qu'il ne s'agissait pas des doubles des notes des clients. Si ces derniers arguments n'ont pas empêché la vérificatrice à défaut d'autre éléments de prendre en compte des données résultant de ces notes pour déterminer le ratio évoqué au point 14 , s'agissant des repas de groupe, il ressort des données figurant dans la proposition de rectification que les factures de vente pour des groupes comptabilisées en 2011 représentaient moins de 10 000 euros de recettes pour un chiffre d'affaires déclaré de 639 459 euros, soit moins de 2 % du chiffre d'affaires, tandis que les données figurant sur les carnets de souches faisaient apparaître, pour le seul mois de mars 2011, 15 811 euros de recettes provenant de ses repas. Si la SARL Les Chandelles fait valoir que les données provenant de ces carnets de souche démontrent que les repas de groupes ont représenté respectivement 27 % et 38 % du chiffre d'affaires des ventes de solides en 2010 et en 2011, ces données ne sont, ainsi qu'il vient d'être indiqué, pas cohérentes avec les factures comptabilisées par la société en 2011, les données provenant de ces mêmes souches font apparaître un taux de seulement 9 % en 2009 et ces ratios, qui comparent les ventes de menus, incluant des boissons, à la seule vente des " solides " ne sont pas pertinents. Dans ces conditions, le taux de 10 % retenu par l'administration n'apparaît pas infondé. La prise en compte dans cette mesure des repas de groupe, qui conduit à diminuer de 1,5 % le chiffre d'affaires total, n'apparait pas contraire à la réalité de l'entreprise.

S'agissant de la méthode de reconstitution des recettes proposée par la société :

17. La SARL Les Chandelle propose de recalculer son chiffre d'affaires, sur la base de la méthode retenue par l'administration, corrigée de certains aspects qu'elle estime erronés. Pour les motifs exposés au point 16, la première étape de la reconstitution qu'elle propose, qui consiste à retenir un pourcentage de repas de groupes résultant exclusivement des extrapolations des notes des clients, n'est pas justifiée. Si elle propose, à la seconde étape de sa reconstitution, d'isoler les vins inclus dans les repas de groupe, selon les pourcentages établis à la première étape, d'une part, ces pourcentages ne peuvent être retenus et, d'autre part, cette méthode n'est pas plus exacte que la méthode retenue par l'administration. A la troisième étape de sa reconstitution, elle ne justifie pas que le chiffre d'affaires des kirs ou communards soit réduit des ratios des repas de groupe dès lors que la vérificatrice a constaté que les menus de groupes proposés n'incluaient pas, pour la plupart, un apéritif. Si elle fait valoir que sa méthode permet de corriger le montant du chiffre d'affaires vins résultant des repas de groupe puisqu'ils sont compris dans le prix des repas de groupe, toutefois la méthode de l'administration permet également de prendre en compte cet élément dès lors qu'elle a estimé que 10 % des ventes de solides et de vin correspondaient à la vente de repas de groupe et qu'elle a appliqué au prix de ces repas de groupe un abattement de 15 % qui a nécessairement tenu compte des vins, eaux et apéritifs vendus dans les repas de groupe.

18. Il résulte de ce qui précède que l'administration apporte la preuve, s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, du bien-fondé des rehaussements en cause et que la société n'apporte pas la preuve, s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés que les rehaussements opérés seraient exagérés ou que la méthode de reconstitution retenue par l'administration serait sommaire ou radicalement viciée.

En ce qui concerne les pénalités :

19. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ;(...). ".

20. En faisant valoir les graves irrégularités entachant la comptabilité présentée ayant justifié qu'elle soit écartée, ainsi que l'importance et le caractère répété des minorations du chiffre d'affaires constatées, l'administration fiscale apporte la preuve qui lui incombe de la volonté délibérée de la société d'éluder l'impôt. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a fait application de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts aux rehaussements notifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée.

En ce qui concerne les amendes fiscales :

21. Aux termes de l'article 1759 du code général des impôts : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées (...) ". Aux termes de l'article 117 du même code : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution (...) ".

22. Il résulte de l'instruction que l'administration a infligé à la SARL Les Chandelles la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts au motif que celle-ci n'a pas désigné dans le délai imparti par l'article 117 du code général des impôts l'identité des bénéficiaires des distributions correspondant aux revenus distribués. D'une part, la SARL Les Chandelles se borne à indiquer qu'elle aurait satisfait à cette obligation dans les délais, sans toutefois produire aucun élément au soutien de ses allégations. D'autre part, dès lors, ainsi qu'il a été indiqué au point 18 que les redressements opérés par l'administration étaient justifiés, la SARL Les Chandelle n'est pas fondée à demander la décharge de ces amendes par voie de conséquence de la décharge des impositions principales.

23. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la SARL Les Chandelles tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée doivent être rejetées et qu'elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Les Chandelle la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 13 février 2018 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SARL Les Chandelles au titre de la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011.

Article 2 : La demande de la SARL Les Chandelle présentée devant le tribunal tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2008 au 30 septembre 2011 et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Les Chandelles et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme A..., présidente-assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 janvier 2020.

2

N° 18LY01378


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01378
Date de la décision : 15/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Pouvoirs de l'administration.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Établissement de l'impôt - Bénéfice réel.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ARTEM AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-15;18ly01378 ?
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