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05/12/2019 | FRANCE | N°19LY01145

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 05 décembre 2019, 19LY01145


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 11 décembre 2018 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1900039 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2

6 mars 2019, M. B..., représenté par Me C..., avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 11 décembre 2018 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1900039 du 28 février 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 26 mars 2019, M. B..., représenté par Me C..., avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 février 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions du 11 décembre 2018 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et lui a interdit le retour durant un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer, sur le fondement des articles L. 313-15 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un titre de séjour ou une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, d'ordonner au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler, et de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous la même condition d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à Me C..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

S'agissant du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire :

- le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire, qui se fondent à tort uniquement sur les attaches familiales qu'il aurait conservées dans son pays d'origine, méconnaissent les dispositions de l'article L. 313-15 dont il remplit les conditions, notamment quant à la formation qualifiante ;

- ces décisions sont intervenues en violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet n'a pas examiné sérieusement sa situation ;

- ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

S'agissant du refus de délai de départ volontaire :

- le jugement est irrégulier pour ne pas tirer les conséquences de l'annulation de la décision portant refus de délai de départ volontaire qui prive l'obligation de quitter le territoire de base légale ;

- il justifie d'un parcours continu en France ; la mesure méconnaît la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

S'agissant de l'interdiction de retour :

- le jugement attaqué comme la décision lui interdisant le retour durant un an sont insuffisamment motivés ;

- le préfet n'a pas pris en compte l'ensemble des critères prévus par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette interdiction est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation et est disproportionnée.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Le bureau d'aide juridictionnelle a prononcé la caducité de la demande d'aide juridictionnelle de M. B... par une décision du 30 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Josserand-Jaillet, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Entré irrégulièrement sur le territoire français selon ses déclarations le 9 juin 2015, et pris en charge par l'aide sociale à l'enfance en tant que mineur isolé, M. B..., ressortissant de la Guinée-Conakry né le 10 juin 1998 à Conakry, a sollicité le 3 mai 2016 un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de l'Isère lui a refusé le séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français par un arrêté du 6 avril 2017, devenu définitif après le rejet du recours de l'intéressé par un jugement du 9 juin 2017 et une ordonnance du 16 juin 2017 du tribunal administratif de Grenoble. Par un arrêté du 11 décembre 2018, le préfet de l'Isère a rejeté la nouvelle demande de titre de séjour formée par M. B... le 1er août 2018 sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire sans délai et a assorti cette mesure d'une interdiction de retour d'un an. M. B... relève appel du jugement du 28 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté son recours contre ces décisions.

Sur la régularité du jugement du 28 février 2019 :

2. M. B... doit être regardé comme soutenant que le jugement du 28 février 2019, en ne tirant pas les conséquences de l'annulation de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire, aurait ainsi omis de statuer sur un moyen dirigé contre l'interdiction de retour sur le territoire français par la voie de l'exception. Toutefois, il ressort de la lecture du jugement attaqué que celui-ci a rejeté l'ensemble des conclusions de M. B... sans, dès lors, prononcer l'annulation de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire. M. B..., en tout état de cause, n'est par suite pas fondé à faire grief aux premiers juges, qui dans ces conditions n'ont pas omis de statuer sur le moyen, de ne pas avoir annulé par voie de conséquence et par voie d'exception l'interdiction de retour sur le territoire en litige.

Sur la légalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire :

3. En premier lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté contesté que le préfet a pris explicitement en considération les éléments personnels, familiaux et professionnels de la situation de M. B..., dont les décisions du 6 avril 2017, pour statuer au regard de l'ensemble des circonstances de droit et de fait à la date de ses décisions sur la situation globale de l'appelant. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère n'aurait pas examiné sérieusement la situation globale particulière de celui-ci manque en fait et doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. (...) ".

5. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour, présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le cadre de l'examen d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans et qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle. Disposant d'un large pouvoir d'appréciation, il doit ensuite prendre en compte la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.

6. Pour écarter la demande de M. B..., présentée sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Isère a estimé que l'intéressé ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de ce titre de séjour en se fondant sur la situation de M. B... à la date de sa décision, en relevant que celui-ci avait présenté sa demande alors qu'il était âgé de vingt ans, qu'il ne justifiait pas suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, et ne se trouvait pas isolé dans son pays d'origine.

7. Ainsi, contrairement aux affirmations de M. B..., par cette pluralité de motifs, le préfet de l'Isère ne s'est pas borné à lui opposer l'existence d'attaches dans son pays d'origine.

8. Il ressort de la décision en litige, s'agissant de l'application de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en tout état de cause, que le préfet a opposé à M. B... la circonstance qu'il n'avait pas présenté sa demande dans sa dix -huitième année. Il est constant que M. B..., né le 10 juin 1998, a formé cette demande le 1er août 2018, à l'âge de vingt ans. Dès lors, quand bien même le préfet dispose d'un pouvoir de régularisation de la situation de ceux qui ne remplissent pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour, le refus opposé à M. B... de lui délivrer un titre de séjour à titre exceptionnel sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif principal qu'il ne remplissait pas cette première condition, nonobstant sa situation professionnelle et le surplus de sa situation personnelle, et, par suite, ne rentrait pas dans le champ d'application de cet article, n'est pas entaché d'erreur de droit non plus que d'une erreur manifeste d'appréciation.

9. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

10. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire.

11. M. B... invoque ses efforts d'intégration au sein de la société française, compte tenu de sa scolarisation, des stages qu'il a accomplis, et de la qualification professionnelle qu'il a obtenue, et fait valoir qu'il n'a plus de contact avec sa famille dans son pays d'origine. Toutefois, M. B..., qui s'est soustrait à la mesure d'éloignement prise à son encontre le 6 avril 2017, n'établit pas cette dernière affirmation. Dans ces conditions, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire qui lui ont été opposés ne peuvent pas être regardés comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels ils ont été pris. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

12. En premier lieu, aux termes de l'article 20 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. Il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre. La citoyenneté de l'Union s'ajoute à la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. 2. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par les traités. Ils ont, entre autres : / a) le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres ; (...) Ces droits s'exercent dans les conditions et limites définies par les traités et par les mesures adoptées en application de ceux-ci. " La directive du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres détermine les conditions dans lesquelles ceux-ci peuvent restreindre la liberté de circulation et de séjour d'un citoyen de l'Union européenne ou d'un membre de sa famille. L'article 27 de cette directive prévoit que, de manière générale, cette liberté peut être restreinte pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique, sans que ces raisons puissent être invoquées à des fins économiques. Ce même article prévoit que les mesures prises à ce titre doivent respecter le principe de proportionnalité et être fondées sur le comportement personnel de l'individu concerné, lequel doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. L'article 28 de la directive impose la prise en compte de la situation individuelle de la personne en cause avant toute mesure d'éloignement, notamment de la durée de son séjour, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. Ce même article prévoit une protection particulière pour les citoyens ayant acquis un droit de séjour permanent, à l'égard desquels des raisons impérieuses d'ordre public ou de sécurité publique doivent être établies, et pour ceux ayant séjourné dans l'État membre d'accueil pendant les dix années précédentes ainsi que pour les mineurs, dont l'éloignement doit reposer sur des motifs graves de sécurité publique.

13. Ces dispositions, qui ont d'ailleurs été transposées aux articles L. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne régissent que la situation des membres de la famille d'un ressortissant de l'Union. M. B..., dépourvu d'attaches familiales en France, ne peut, par suite, utilement s'en prévaloir.

14. En second lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

15. Il ressort de la motivation de l'arrêté du 11 décembre 2018 que, pour refuser à M. B... tout délai de départ volontaire, le préfet de l'Isère s'est fondé sur les dispositions du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 1703263 du 9 juin 2017, que M. B... a fait l'objet, le 6 avril 2017, d'une décision l'obligeant à quitter le territoire français qui doit être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée le 11 avril 2017, date de présentation du pli à l'adresse qu'il avait communiquée aux services préfectoraux et qui fait l'objet d'une attestation de domicile cosignée par l'intéressé portant sur cette période, qui a été retourné aux services préfectoraux portant la mention " avisé, non réclamé " à l'issue du délai de mise en instance. Il est constant que M. B... n'a pas exécuté cette mesure d'éloignement. Par suite, et en l'absence de circonstance particulière, il entrait dans le champ d'application du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B..., qui avait terminé sa formation professionnelle sans justifier d'une scolarité diplômante en cours à la date de sa demande, ne peut dès lors, et en tout état de cause, soutenir que son parcours qualifiant en France aurait été interrompu par l'intervention de la décision lui refusant un délai de départ volontaire. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que la décision en litige, compte tenu de ses effets, soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire :

16. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré ou que, titulaire d'un titre de séjour délivré sur le même fondement dans un autre Etat membre de l'Union européenne, il n'a pas rejoint le territoire de cet État à l'expiration de son droit de circulation sur le territoire français dans le délai qui lui a, le cas échéant, été imparti pour le faire. / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, (...) alinéas du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

17. Il résulte de ces dispositions qu'une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ volontaire, est, en principe, assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans l'hypothèse où des circonstances humanitaires justifieraient qu'il soit dérogé au principe. Seule la durée de cette interdiction de retour doit être appréciée au regard des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1 précité.

18. Au cas d'espèce, M. B... s'est vu refuser tout délai de départ volontaire pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Les circonstances dont il fait état ne peuvent être regardées comme des circonstances humanitaires, qui auraient pu justifier que l'autorité administrative ne prononçât pas d'interdiction de retour sur le territoire français. S'agissant de la durée de cette interdiction, la décision contenue dans l'arrêté en litige, qui ainsi est suffisamment motivée, fait référence à la durée de présence de M. B... sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France, à la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet et, par la mention du risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire prise par le même arrêté, au fait que sa présence sur le territoire français représente une menace pour l'ordre public. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni méconnu les dispositions précitées en fixant à un an la durée de l'interdiction de retour en France faite à l'appelant.

19. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.

Le président, rapporteur,

D. Josserand-JailletLe président assesseur,

Ph. Seillet

La greffière,

S. Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 19LY01145 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01145
Date de la décision : 05/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-05;19ly01145 ?
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