Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La Sarl Créa Foncier a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le maire de la commune de Villerest a sursis à statuer sur sa demande de permis d'aménager ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 28 août 2017 contre cet arrêté.
Par un jugement n° 1707840 du 6 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté du 11 juillet 2017 ainsi que la décision rejetant son recours gracieux et a enjoint la commune de réexaminer la demande de la société Créa Foncier dans le délai de deux mois.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 10 janvier 2019, la commune de Villerest, représentée par la SCP Deygas Perrachon et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 novembre 2018 ;
2°) de mettre à la charge de la société Créa Foncier la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pas statué sur le moyen opposé en première instance suivant lequel elle demandait d'appliquer l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dans sa version issue de la loi du 21 janvier 2017 ;
- le projet de zonage, défini en mai 2017, classe la parcelle d'assiette du projet en zone naturelle (N) ; ce motif doit être substitué au motif du sursis à statuer initialement opposé et justifie le rejet des conclusions accueillies par le jugement.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 juillet 2019, la Sarl Créa Foncier, représentée par la Selas Legacité, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Villerest de lui délivrer le permis d'aménager conformément à sa demande du 27 avril 2017 dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ; la demande de substitution de motifs doit être écartée, dès lors que les projets de plans de zonage, non datés, de même que le support papier d'une réunion avec les services de l'Etat de janvier 2017 ne traduisent pas un état d'avancement suffisant du futur plan, s'agissant du classement en zone N de la parcelle du projet.
La clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 29 août 2019 par une ordonnance du 24 juillet précédent, prise en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... B..., première conseillère,
- les conclusions de Jean-Simon Laval, rapporteur public ,
- et les observations de Me E... représentant la commune de Villerest ainsi celles de Me A... représentant la Sarl Créa Foncier ;
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Villerest relève appel du jugement du 6 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 11 juillet 2017 par lequel le maire de la commune a sursis à statuer à sa demande de permis d'aménager un lotissement de dix-sept lots sur une parcelle cadastrée BD 221 au lieudit La Mirandole, ainsi que la décision implicite rejetant le recours gracieux de la société pétitionnaire du 28 août 2017.
Sur la régularité du jugement :
2. Les premiers juges se sont fondés sur les dispositions applicables à la date de l'arrêté du 11 juillet 2017 sans indiquer que la commune de Villerest le demandait. La commune soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur sa demande de substitution de base légale. Toutefois, un tel moyen ne peut qu'être écarté dès lors qu'il relève de l'office du juge de se fonder sur la version du code de l'urbanisme applicable à la décision. Dans ces conditions, la commune requérante ne peut se prévaloir d'une irrégularité du jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Villerest du 11 juillet 2017 décidant de surseoir à statuer sur la demande de permis d'aménager de la société Créa Foncier, les premiers juges ont retenu comme fondé le moyen selon lequel le maire s'est appuyé sur un projet de règlement et de PLU qui résultaient de la procédure abandonnée par une délibération du conseil municipal du 22 septembre 2016 et que le PADD en vigueur à la date du sursis en litige comportait des indications contradictoires avec les motifs de la décision de sursis.
4. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 109 de la loi du 21 janvier 2017 : " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ".
5. La commune de Villerest, qui ne conteste pas le motif d'annulation retenu par les premiers juges, demande que soit substitué, aux motifs initiaux de la décision de sursis à statuer contestée devant le tribunal administratif, celui tiré de ce que la parcelle d'implantation du projet de la société Créa Foncier a vocation à se situer en zone naturelle (N) et que ce classement a été envisagé par les auteurs du PLU dès janvier 2017.
6. La décision de surseoir à statuer sur une demande d'autorisation d'urbanisme prise, en application du premier alinéa de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme et sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme, lorsque la révision d'un plan local d'urbanisme a été prescrite, ne peut intervenir que si le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable a eu lieu et si les travaux d'élaboration du nouveau PLU étaient, à la date du sursis, suffisamment avancés.
7. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 22 septembre 2016, le conseil municipal issu des élections municipales de 2014 n'a pas souhaité approuver la révision du plan local d'urbanisme, eu égard à son désaccord concernant certains projets et il a relancé la procédure de plan local d'urbanisme au stade du débat sur le projet d'aménagement et de développement durable (PADD). Au cours de cette même séance du conseil municipal, un nouveau projet de PADD amendé a été présenté aux élus et a été débattu. Au soutien de sa demande de substitution de motifs, la commune de Villerest se borne à produire pour la première fois en appel des projets de plans de zonage non datés ainsi que le support d'une réunion avec les services de l'Etat du 26 janvier 2017 qui préconise le classement en zone naturelle de la parcelle du projet. Toutefois, ces documents sont contradictoires avec les cartes produites au soutien d'une réunion de concertation avec les habitants du 16 janvier 2017, versées dès la première instance et faisant état d'une large zone rouge où doit se développer l'urbanisation sur le secteur de la Mirandole, incluant une grande partie de la parcelle d'assiette du projet. Dans ces conditions, la commune de Villerest n'est pas fondée à soutenir que le projet de PLU était, à la date du sursis en litige, suffisamment avancé pour permettre d'identifier la parcelle concernée comme ayant vocation à être classée en zone N, et en l'état de l'instruction, le motif invoqué par le maire de la commune de Villerest n'est pas susceptible de fonder le sursis à statuer du 11 juillet 2017.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Villerest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé le sursis à statuer opposé à la demande de permis d'aménager de la société Créa Foncier.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions en annulation de la commune de Villerest dirigées contre le jugement du 6 novembre 2018 n'appelle aucune autre mesure d'exécution que celle prise par les premiers juges. Dès lors, les conclusions présentées en appel par la société Créa Foncier tendant à enjoindre la commune de lui délivrer le permis demandé doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Villerest demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de la société Créa Foncier, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Villerest le versement d'une somme de 2 000 euros à la société Créa Foncier, au titre des frais qu'elle a exposés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Villerest est rejetée.
Article 2 : La commune de Villerest versera la somme de 2 000 euros à la Sarl Créa Foncier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Créa Foncier est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Villerest et à la société Créa Foncier.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme D... F..., présidente de chambre ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme C... B..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2019.
1
2
N° 19LY00090
md