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25/07/2019 | FRANCE | N°19LY01406

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 25 juillet 2019, 19LY01406


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- d'annuler la décision du 22 décembre 2010 par laquelle le président de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay a refusé la prise en compte de services antérieurs effectués dans la gendarmerie nationale au titre de son ancienneté dans la fonction publique territoriale, ainsi que la décision du 15 juin 2011 rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision ;

- de lui enjoindre de prendre en

compte les services antérieurs en litige ;

- de condamner la communauté d'agglomération...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- d'annuler la décision du 22 décembre 2010 par laquelle le président de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay a refusé la prise en compte de services antérieurs effectués dans la gendarmerie nationale au titre de son ancienneté dans la fonction publique territoriale, ainsi que la décision du 15 juin 2011 rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision ;

- de lui enjoindre de prendre en compte les services antérieurs en litige ;

- de condamner la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay à l'indemniser du préjudice subi du fait du refus de prendre en compte ces services antérieurs.

Par un jugement n° 1101565 du 24 mars 2015, le tribunal administratif de Clermont -Ferrand a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 15LY01679 du 13 juin 2017, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de Mme C..., annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de la perte de rémunération qu'elle a subie à compter du 1er janvier 2006 (article 1er), condamné la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay à lui verser une indemnité de 11 264,34 euros (article 2), rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 3) et rejeté les conclusions de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4).

Par une décision n° 413252 du 10 avril 2019, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt de la cour du 13 juin 2017 et renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour.

Procédure devant la cour

Par un mémoire enregistré le 27 mai 2019, la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay, représentée par Me Renouard, avocat, conclut au rejet de la requête d'appel de Mme C... et à ce que soit mise à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que sa demande est dépourvue de fondement et que sa créance est prescrite.

Par un mémoire enregistré le 3 juin 2019, Mme C..., représentée par Me Olivier-Dovy, avocate, conclut :

- à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 mars 2015 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

- à la condamnation de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay à lui verser une somme de 19 202,40 euros ;

- à ce qu'il lui soit enjoint de la reclasser en prenant en compte ses services antérieurs pour le calcul de son ancienneté ;

- à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'interprétation restrictive opérée par le Conseil d'État de l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires est en totale est en contradiction avec l'article 6-1 du décret d'application du 30 décembre 1987 modifié par l'article 8 du décret du 22 décembre 2006, relatifs à la reprise d'ancienneté ; elle peut se prévaloir de son ancienneté en tant que militaire, comme l'avait d'ailleurs reconnu le président de la communauté d'agglomération dans sa décision du 15 juin 2011 ; d'autres personnes se trouvant dans la même situation ont bénéficié de cette ancienneté ;

- les manquements fautifs de la communauté d'agglomération lui ont causé un préjudice, sans que puisse lui être opposée la prescription quadriennale.

Par un mémoire enregistré le 5 juin 2019, qui n'a pas été communiqué, la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay conclut aux mêmes fins que précédemment.

La clôture de l'instruction a été fixée au 5 juin 2019 par ordonnance du 15 mai 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972 ;

- la loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 ;

- le décret n° 87-1107 du 30 décembre 1987 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Clot, président,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- les observations de Mme C... et celles de Me B..., substituant Me Renouard, avocat de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., qui a exercé comme engagée volontaire dans la gendarmerie nationale de 1981 à 1997, a été recrutée par la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay le 18 juin 2001 en qualité d'agent administratif non titulaire, puis titularisée dans le grade d'agent administratif territorial à compter du 1er janvier 2003. Elle a, le 7 avril 2010, sollicité la prise en compte, à compter de la date de sa titularisation, de bonifications d'ancienneté militaire. Elle a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 22 décembre 2010, réitérée le 15 juin 2011, par laquelle le président de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay a rejeté cette demande, d'enjoindre à la communauté d'agglomération de reconstituer sa carrière et de condamner cette dernière à l'indemniser des préjudices subis à raison de ce refus. Cette demande a été rejetée par jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 24 mars 2015. Sur appel de Mme C..., la cour a, par un arrêt du 13 juin 2017, annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de la perte de rémunération qu'elle a subie à compter du 1er janvier 2006 (article 1er), condamné la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay à lui verser une indemnité de 11 264,34 euros (article 2), rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 3) et rejeté les conclusions de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 4). Par une décision du 10 avril 2019, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt et renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour.

2. Les décisions du président de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay des 22 décembre 2010 et 11 juin 2011 ont eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de Mme C... qui, en formulant les conclusions indemnitaires ci-dessus analysées, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressée à percevoir la somme qu'elle réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions est inopérant.

3. Aux termes de l'article 95 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires, alors en vigueur : " L'engagé ayant accompli des obligations d'une durée supérieure à celle du service actif bénéficie des dispositions relatives aux emplois réservés. (...) ". L'article 96 de cette loi dispose que : " Pour l'accès aux emplois de l'État, des collectivités locales, des établissements publics et des entreprises publiques dont le personnel est soumis à un statut réglementaire, l'engagé visé au premier alinéa de l'article précédent bénéficie, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, des dispositions suivantes : (...) ". Aux termes de l'article 97 de la même loi : " Le temps passé sous les drapeaux pour un engagé accédant à un emploi visé à l'article 96 ci-dessus est compté pour l'ancienneté : / a) Pour les emplois de catégories C et D, ou de même niveau de qualification, pour sa durée effective jusqu'à concurrence de dix ans (...) ". Ces dispositions ont été abrogées et remplacées par celles de la loi du 24 mars 2005 portant statut général des militaires, qui ont réservé ces avantages aux seuls militaires bénéficiant d'" emplois réservés " dans la fonction publique civile.

4. Le droit pour un agent public, ancien militaire, à la prise en compte de ses services militaires antérieurs pour le calcul de son ancienneté est régi par les dispositions en vigueur à la date de sa titularisation dans la fonction publique civile, sauf dispositions contraires. Par suite, les dispositions précitées de l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972, qui étaient toujours en vigueur à la date de la titularisation de Mme C... en qualité d'agent administratif territorial, lui sont applicables.

5. Toutefois, ces dispositions doivent être interprétées comme réservant le droit de bénéficier d'une reprise d'ancienneté au militaire qui, au moment où il a été nommé dans la fonction publique civile, a été placé en position de détachement dans l'attente de son intégration ou de sa titularisation et a ainsi conservé la qualité de militaire jusqu'à la date à laquelle celle-ci a été prononcée. Elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir cette possibilité de reprise d'ancienneté à l'agent qui, ayant demandé sa radiation des cadres de l'armée, n'a pas été placé en position de détachement durant la période précédant son intégration ou sa titularisation et n'avait donc plus, à la date de celle-ci, la qualité de militaire. °

6. Il ressort des pièces du dossier que le 1er janvier 2003, date à compter de laquelle Mme C... a été titularisée dans le grade d'agent administratif territorial, elle n'avait plus la qualité de militaire. Dès lors, l'intéressée ne pouvait bénéficier de la reprise d'ancienneté prévue par les dispositions de l'article 97 de la loi du 13 juillet 1972.

7. Aux termes de l'article 6-1 du décret du 30 décembre 1987, alors en vigueur, portant organisation des carrières des fonctionnaires territoriaux de catégorie C, dans sa rédaction issue du décret n° 2006-1687 du 22 décembre 2006 : " Les personnes nommées fonctionnaires dans un grade de catégorie C doté des échelles de rémunération 3, 4 ou 5 qui ont, ou avaient eu auparavant, la qualité d'agent public, sont classées avec une reprise d'ancienneté égale aux trois quarts de la durée des services civils qu'ils ont accomplis, le cas échéant après calcul de conversion en équivalent temps plein. Ce classement est opéré sur la base de la durée maximale de chacun des échelons du grade dans lequel ils sont intégrés. / Lorsque l'application de ces dispositions aboutit à classer les intéressés à un échelon doté d'un indice de traitement inférieur à celui dont ils bénéficiaient dans leur emploi précédent, ils conservent, à titre personnel, le bénéfice de leur traitement antérieur jusqu'au jour où ils bénéficient dans leur cadre d'emplois d'accueil d'un traitement au moins égal, sans que le traitement ainsi conservé puisse être supérieur au traitement indiciaire afférent au dernier échelon du grade du cadre d'emplois d'accueil. / La règle de la reprise des trois quarts des services antérieurs mentionnée au premier alinéa est applicable aux anciens fonctionnaires civils et, s'il ne peut leur être fait application du II de l'article 6 ci-dessus, aux anciens militaires, nommés dans un cadre d'emplois de fonctionnaires de catégorie C régi par le présent décret. "

8. Mme C... ne peut se prévaloir de ces dispositions, qui n'étaient pas applicables le 1er janvier 2003, date à laquelle elle a été titularisée dans le grade d'agent administratif territorial.

9. Le moyen tiré de ce que des personnes se trouvant dans la même situation que Mme C... auraient bénéficié de la reprise d'ancienneté qu'elle demande est inopérant.

10. Par suite, en refusant de prendre en compte, pour son reclassement, les services accomplis par Mme C... en tant qu'engagée volontaire dans la gendarmerie nationale, l'administration n'a pas commis de faute.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses conclusions indemnitaires. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay tendant à l'application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse C... et à la communauté d'agglomération du Puy-en-Velay.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juillet 2019.

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N° 19LY01406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01406
Date de la décision : 25/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-04 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : OLIVIER-DOVY

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-07-25;19ly01406 ?
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